LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 3 du code civil, 12 du code de procédure civile et 5 de la convention franco-monégasque du 13 septembre 1950 relative à la faillite et à la liquidation judiciaire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le Crédit foncier de France (le Crédit foncier) a consenti, le 2 octobre 1990, à M.
X...
, commerçant français, un prêt notarié d'un montant de 8 millions de francs (1 219 592,14 euros), garanti par une hypothèque conventionnelle portant sur un immeuble lui appartenant situé en France ; que, par jugement du 3 novembre 1994, le tribunal de première instance de la Principauté de Monaco, dans laquelle M.
X...
avait son principal établissement, a prononcé sa liquidation des biens, le Crédit foncier ayant déclaré sa créance le 12 décembre 1994 ; que, par jugement du 21 mars 1996, revêtu de l'exequatur, M.
Y...
a été désigné syndic en remplacement du précédent syndic ; que M.
Y...
, ès qualités, a été autorisé à vendre de gré à gré cet immeuble hypothéqué selon acte des 3 août et 6 octobre 2000 ; que, le 4 juillet 2002, ce dernier a assigné le Crédit foncier devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de voir dire que, par application de la loi monégasque, le prix serait intégralement payé au Trésor public par préférence au Crédit foncier, créancier hypothécaire de premier rang ; que, par jugement du 19 septembre 2006, le tribunal a dit que cette créance hypothécaire primait celle du Trésor public, garantie par le privilège mobilier de l'article 1920 du code général des impôts, et serait payée par préférence sur le prix de l'immeuble ; que le Trésor public ayant fait appel du jugement le 6 octobre 2006 avant de se désister le 14 novembre 2006, M.
Y...
, ès qualités, en a alors fait appel le 4 janvier 2007 ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel interjeté par le syndic à l'encontre du jugement du 19 septembre 2006 qui l'avait débouté de sa demande, l'arrêt, après avoir constaté que le Trésor public s'était désisté de son appel, se borne à retenir que M.
Y...
, ès qualités, n'a plus intérêt à en faire appel et à soutenir une argumentation juridique que seul le Trésor public peut soutenir ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser le droit applicable au litige qui lui était soumis au regard de la qualité et de l'intérêt à agir du syndic d'un débiteur français soumis à une liquidation judiciaire relevant du droit monégasque à l'occasion de la mise en œuvre d'un droit de préférence résultant d'une hypothèque conventionnelle souscrite avant l'ouverture d'une procédure collective par une banque française sur un immeuble du débiteur situé en France, dont M.
Y...
, ès qualités, soutenait dans ses écritures qu'il relevait du droit monégasque en application de l'article 5 de la convention franco-monégasque du 13 septembre 1950, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne le Crédit foncier de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à M.
Y...
, ès qualités, la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour M.
X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel de Monsieur
Y...
, syndic à la liquidation des biens de Monsieur
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, du jugement qui l'avait débouté de sa demande tendant à ce que le prix de vente d'un immeuble du débiteur soit distribué au Trésor Public par préférence au Crédit Foncier de France.
Aux motifs que le Trésor Public, qui avait fait appel du jugement, s'en était désisté ; que Monsieur
Y...
n'avait plus intérêt à faire appel et à soutenir une argumentation juridique que seul le Trésor Public pouvait soutenir.
Alors que le juge français, devant qui est invoquée une loi étrangère, doit rechercher la solution donnée à la question litigieuse par le droit positif en vigueur dans l'Etat concerné ; que la cour d'appel n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si le code de commerce monégasque, applicable en la cause en vertu de l'article 5 de la convention franco-monégasque du 13 septembre 1950, ne donnait pas compétence au syndic pour régler l'ordre des créanciers et ne lui conférait pas ainsi qualité et intérêt à agir, même en l'absence de contestation du créancier intéressé (manque de base légale au regard des articles 3 du code civil, 12 du code de procédure civile et 5 de la convention susvisée).