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18/05/2010 | FRANCE | N°08-44619

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mai 2010, 08-44619


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 juin 2008), que M. B..., engagé par la société Agence pour l'agro-alimentaire (la société) le 1er janvier 1992, a été licencié pour faute grave le 25 octobre 1994 ; que contestant son licenciement, le salarié a fait convoquer le 22 décembre 1994 la société devant le conseil de prud'hommes de Montmorency afin d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes ; que la société a déposé plainte contre M. B... avec constitution de partie civile le 26 décembre

1995 pour faux, usage de faux, abus de confiance et tentative d'escro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 juin 2008), que M. B..., engagé par la société Agence pour l'agro-alimentaire (la société) le 1er janvier 1992, a été licencié pour faute grave le 25 octobre 1994 ; que contestant son licenciement, le salarié a fait convoquer le 22 décembre 1994 la société devant le conseil de prud'hommes de Montmorency afin d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes ; que la société a déposé plainte contre M. B... avec constitution de partie civile le 26 décembre 1995 pour faux, usage de faux, abus de confiance et tentative d'escroquerie et qu'une information a été ouverte contre X le 20 janvier 1996 ; que par jugement du 5 février 1996, le conseil de prud'hommes de Montmorency a ordonné le sursis à statuer et le retrait du dossier du rang des affaires en cours et dit que l'affaire pourra être réintroduite sur simple demande à l'issue de l'instance pénale par la partie la plus diligente ; que le 30 janvier 2002, la chambre criminelle de la Cour de cassation a déclaré irrecevable le pourvoi formé contre la décision de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris qui, par arrêt en date du 28 novembre 2000, avait confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue le 15 juin 1998 par le juge d'instruction saisi ; que le 8 novembre 2004, le salarié a fait réinscrire l'affaire au rôle du conseil de prud'hommes ; que celui-ci a dit l'instance périmée, par jugement du 21 novembre 2005 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de péremption d'instance alors selon le moyen, que constitue une diligence au sens de l'article R. 1452-8 du code du travail, la charge de réinscrire l'affaire au rôle à l'issue de l'instance pénale, ordonnée par la juridiction pour mettre l'affaire en état d'être jugée ; qu'ayant relevé que, par jugement avant dire droit du 5 février 1996, le conseil de prud'hommes a sursis à statuer dans l'attente de l'issue pénale et a mis à la charge de la partie la plus diligente, la réinscription de l'affaire au terme de cette instance, et en décidant cependant que l'exception de péremption d'instance n'était pas opposable à M. B... (fils) qui a sollicité la reprise de la procédure prud'homale, le 8 novembre 2004, soit plus de deux ans après l'extinction de la procédure pénale le 30 janvier 2002, au motif qu'aucune diligence particulière n'aurait été imposée aux parties, la cour d'appel a violé l'article R. 1452-8 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la décision ordonnant le sursis à statuer et le retrait du rôle n'imposait aucune diligence particulière aux parties autre que celle nécessaire à la réinscription de l'affaire, a exactement décidé que la péremption de l'instance n'était pas acquise ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'écarter la faute grave, de dire que le licenciement de M. B... est sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer diverses sommes alors selon le moyen :
1° / que les juges du fond sont tenus d'examiner l'ensemble des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la société APA reprochait à M. B... (fils) non seulement ses violences verbales au cours de la réunion du 10 octobre mais également son insubordination marquée par son refus de sortir de la salle de réunion, ce qui avait contraint le gérant de la société APA à faire appel à la police ; qu'en se bornant à dire qu'existait un doute sur la réalité des violences sans examiner la réalité et la gravité du grief d'insubordination, en présence d'autres membres du personnel, figurant dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
2° / que le juge doit procéder à l'examen complet des éléments de preuve invoqués par l'employeur afin d'établir la réalité de la faute grave ; qu'en déduisant l'existence d'un doute sur l'existence des violences verbales commises par le salarié, de la circonstance que les attestations de MM. X... et D... étaient contradictoires avec celles de Mme Y... et de l'absence de procès-verbal de la police qui n'était pas tenue d'en faire un, sans s'expliquer sur la nullité des attestations de MM. X... et D... qui ont reconnu les avoir rédigées au profit de M. B... (fils), sous sa dictée, et sans examiner les témoignages de Mmes Y... et Z..., de M. A... et des sociétés Servimag et Gersauto, qui attestaient du comportement agressif et violent de M. B... (fils), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, examinant l'ensemble des griefs énoncés dans la lettre de licenciement et appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans être tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle a choisi d'écarter, a estimé qu'il existe un doute sur la réalité des faits reprochés au salarié et n'a fait qu'user du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, pour dire que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Agence pour l'agro alimentaire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Agence pour l'agro alimentaire à payer à M. B... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Agence pour l'agro alimentaire
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté l'exception de péremption l'instance et, statuant sur le fond, d'avoir condamné la société APA à verser au salarié diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE, par jugement en date du 5 février 1996, le Conseil de prud'hommes, après avoir été informé de la plainte avec constitution de partie civile déposée par la société Agence pour l'Agro-alimentaire, a :
- ordonné le sursis à statuer et le retrait de l'affaire du rôle de la juridiction,- dit que l'affaire pourra être rétablie sur simple demande par la partie la plus diligente à l'issue de l'instance pénale ;

que l'issue de l'instance pénale est constituée au cas présent par le rejet le 30 janvier 2002 par la Cour de cassation du pourvoi formé par la société Agence pour l'Agro-alimentaire contre l'arrêt rendu le 28 novembre 2000 par la cour d'appel de Paris, chambre de l'accusation, qui, confirmant l'ordonnance de non lieu du juge d'instruction, a dit que les délits de faux, usage de faux, escroquerie, tentative d'escroquerie et tentative d'escroquerie et subornation de témoins, objet de la plainte, n'étaient pas constitués et que par ailleurs les faits ne paraissaient susceptibles de revêtir aucune autre qualification pénale ; que cependant, la décision de retrait du rôle prise le 5 février 1996 n'imposait aux parties aucune diligence particulière, autre que celle nécessaire à la réinscription de l'affaire, qu'en conséquence, Monsieur
B...
(fils) ayant satisfait à la seule obligation mise à sa charge postérieurement à l'issue de l'instance pénale, le Conseil de prud'hommes ne pouvait, par sa décision du 21 novembre 2005, constater la péremption de l'instance et déclarer irrecevables les demandes renouvelées par le demandeur ;
ALORS QUE constitue une diligence au sens de l'article R. 1452-8 du Code du travail, la charge de réinscrire l'affaire au rôle à l'issue de l'instance pénale, ordonnée par la juridiction pour mettre l'affaire en état d'être jugée ; qu'ayant relevé que, par jugement avant dire droit du 5 février 1996, le Conseil de prud'hommes a sursis à statuer dans l'attente de l'issue pénale et a mis à la charge de la partie la plus diligente, la réinscription de l'affaire au terme de cette instance, et en décidant cependant que l'exception de péremption d'instance n'était pas opposable à Monsieur
B...
qui a sollicité la reprise de la procédure prud'homale, le 8 novembre 2004, soit plus de deux ans après l'extinction de la procédure pénale le 30 janvier 2002, au motif qu'aucune diligence particulière n'aurait été imposée aux parties, la Cour d'appel a violé l'article R. 1452-8 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR écarté la faute grave, jugé que le licenciement de Monsieur
B...
(fils) était sans cause réelle et sérieuse et condamné la société APA à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la société APA a notifié à Monsieur
B...
(fils) son licenciement pour faute grave en visant les violences verbales proférées par celui-ci vis à vis du gérant de l'entreprise au cours de la réunion du 10 octobre 1994 ; que Monsieur
B...
(fils) a toujours contesté ces faits dès la réception de la convocation à l'entretien ; que les attestations établies par Messieurs X... et D... et par Madame Y... sont contradictoires ; qu'aucun procès – verbal n'a été établi par les services de police lors de leur intervention réalisée le 10 octobre 1994 à la demande de Jacques C..., gérant de l'entreprise ; qu'en conséquence, il existe un doute quant à la réalité des violences verbales reprochées à Monsieur
B...
(fils) ;
ALORS D'UNE PART QUE les juges du fond sont tenus d'examiner l'ensemble des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la société APA reprochait à Monsieur
B...
(fils) non seulement ses violences verbales au cours de la réunion du 10 octobre mais également son insubordination marquée par son refus de sortir de la salle de réunion, ce qui avait contraint le gérant de la société APA à faire appel à la police ; qu'en se bornant à dire qu'existait un doute sur la réalité des violences sans examiner la réalité et la gravité du grief d'insubordination, en présence d'autres membres du personnel, figurant dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART le juge doit procéder à l'examen complet des éléments de preuve invoqués par l'employeur afin d'établir la réalité de la faute grave ; qu'en déduisant l'existence d'un doute sur l'existence des violences verbales commises par le salarié, de la circonstance que les attestations de Messieurs X... et D... étaient contradictoires avec celles de Madame Y... et de l'absence de procès-verbal de la police qui n'était pas tenue d'en faire un, sans s'expliquer sur la nullité des attestations de Messieurs X... et D... qui ont reconnu les avoir rédigées au profit de Monsieur
B...
(fils), sous sa dictée, et sans examiner les témoignages de Mesdames Y... et Z..., de Monsieur A... et des sociétés SERVIMAG et GERSAUTO, qui attestaient du comportement agressif et violent de Monsieur
B...
(fils), la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44619
Date de la décision : 18/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 05 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mai. 2010, pourvoi n°08-44619


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44619
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