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05/05/2010 | FRANCE | N°08-45202

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mai 2010, 08-45202


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 décembre 1963 par la société Léo François en qualité de contremaître ; qu'il a quitté l'entreprise le 31 décembre 1969, et l'a réintégrée en qualité de responsable planning le 3 mai 1983 ; qu'il a été placé en arrêt maladie à compter du 16 mai 1994 et a bénéficié d'un mi-temps thérapeutique jusqu'au 1er novembre 1994 ; que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes le 30 juin 1999, afin d'obtenir le paiement de créances salariales et

de dommages-intérêts ; qu'une décision de radiation est intervenue le 4 avril 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 décembre 1963 par la société Léo François en qualité de contremaître ; qu'il a quitté l'entreprise le 31 décembre 1969, et l'a réintégrée en qualité de responsable planning le 3 mai 1983 ; qu'il a été placé en arrêt maladie à compter du 16 mai 1994 et a bénéficié d'un mi-temps thérapeutique jusqu'au 1er novembre 1994 ; que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes le 30 juin 1999, afin d'obtenir le paiement de créances salariales et de dommages-intérêts ; qu'une décision de radiation est intervenue le 4 avril 2000 en raison du défaut de diligences des parties ; que M. X... a été licencié le 7 juillet 2000 pour inaptitude ; qu'il a sollicité la réinscription au rôle de l'affaire par requête du 18 février 2005 ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 2246, 2277 du code civil et L. 3245-1 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer prescrites les demandes à caractère salarial de M. X..., l'arrêt retient que l'ordonnance de radiation du 4 avril 2000, simple mesure d'administration judiciaire n'avait eu aucun effet suspensif sur le cours de la prescription et que les demandes avaient subi les effets de la prescription quinquennale à compter de début juillet 2004 ;
Attendu, cependant, que l'effet interruptif de la prescription résultant d'une action portée en justice se prolonge pendant la durée de l'instance ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors que le cours de la prescription avait été interrompu par l'introduction de l'instance prud'homale, le 30 juin 1999, la radiation de l'affaire du rôle étant sans effet sur la poursuite de cette interruption, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt retient que la demande avait été formée 7 ans après que M. X... avait cessé son activité ; que le salarié se prévalait de la seule attestation de M. Y... et que la sincérité du témoin était susceptible d'être remise en cause dès lors qu'il avait fait l'objet d'un licenciement pour faute grave ; que même s'il faisait état d'une situation de tension entre M. X... et la société Léo François, les faits relatés par ce dernier et la production d'une seule et unique attestation ne suffisaient pas à caractériser l'existence d'éléments répétés susceptibles de constituer des indices pouvant laisser à penser à l'existence d'un harcèlement moral de la part de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié invoquait une autre attestation, rédigée par M. Z..., au soutien de son allégation de harcèlement moral, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes à caractère salarial (maintien du salaire en cas de maladie, retenue CSG, prime d'ancienneté et journées d'ancienneté, primes Saint-Eloi, revenu de remplacement jusqu'à son licenciement) et débouté le salarié de sa demande de condamnation au titre du harcèlement moral, l'arrêt rendu le 30 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société Léo François aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Léo François à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré prescrites les demandes à caractère salarial (maintien du salaire en cas de maladie, retenue CSG, prime d'ancienneté et journées d'ancienneté, primes Saint Eloi, revenu de remplacement jusqu'à son licenciement) formées par un salarié, Monsieur X..., à l'encontre de son employeur, la Société LEO FRANCOIS, suite à son licenciement pour inaptitude à tout poste dans l'entreprise ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 143-14 du Code du travail, l'action en paiement des salaires se prescrit par cinq ans, conformément à l'article 2277 du Code civil ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces du dossier que le 1er juillet 1999, la Société LEO FRANCOIS a été convoquée par devant le Conseil de prud'hommes de Fourmies afin qu'il soit statué sur le paiement de créances salariales invoquées par Monsieur X... ; que la prescription quinquennale liée à celles-ci s'est donc vue interrompue par l'effet de la saisine du Conseil de prud'hommes (5 juillet 1999, pour ce qui concerne les demandes formées devant cette juridiction) ; que l'ordonnance de radiation du 4 avril 2000, simple mesure d'administration judiciaire, n'a eu aucun effet suspensif sur le cours de la prescription ; que dans ces conditions, les créances salariales de Monsieur X... ont subi les effets de la prescription quinquennale à compter de début juillet 2004 ; qu'en l'espèce, Monsieur X... n'a à nouveau saisi le Conseil de prud'hommes que le 18 février 2005 ; que le salarié a formé des demandes de rappel de salaires à hauteur de 4. 107, 06 euros pour la période d'août 1994 à mai 1998 ; qu'en application des dispositions susvisées, ces demandes doivent être déclarées irrecevables ;
ALORS QUE l'effet interruptif de la prescription quinquennale applicable aux actions en paiement de salaires et résultant d'une action portée en justice se prolonge jusqu'à ce que le litige trouve sa solution par le prononcé d'un jugement ; que tout en constatant que la juridiction prud'homale, saisie par Monsieur X... d'une demande de rappel de salaires pour les années 1994-1998 par acte du 1er juillet 1999, avait rendu une ordonnance de radiation le 4 avril 2000, la Cour d'appel a cependant déclaré prescrite la nouvelle demande en paiement formulée dans le nouvel acte de saisine de la juridiction prud'homale, le 4 février 2005, pourtant formulée dans le délai requis de cinq ans ; qu'en se déterminant ainsi, et en faisant courir la nouvelle prescription quinquennale à compter de l'acte de saisine de 1999 et non à compter de l'ordonnance de radiation du 4 avril 2000 pour déclarer prescrite la demande formée le 4 février 2005, la Cour d'appel a méconnu le principe susvisé de la poursuite de l'effet interruptif de la prescription quinquennale jusqu'à cette ordonnance de radiation, en violation des articles 2244, 2277 du Code civil et l'article L. 3245-1 (ancien article L. 143-14) du Code du travail pris ensemble.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de condamnation de la Société LEO FRANCOIS au titre du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QU'il convient en premier lieu de constater que la demande a été formée sept ans après que Monsieur X... ait cessé son activité ; que pour solliciter la somme de 45. 734, 70 euros à titre de dommages-intérêts, Monsieur X... se prévaut de la seule attestation de Monsieur Y... ; que cependant la sincérité du témoin est susceptible d'être remise en cause dès lors que ce dernier a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave ; qu'en tout état de cause, même s'il fait état d'une situation de tension entre Monsieur X... et la Société LEO FRANCOIS, les faits relatés par ce dernier et la production d'une seule et unique attestation ne suffisent pas à caractériser l'existence d'éléments répétés susceptibles de constituer des indices pouvant laisser penser à l'existence d'un harcèlement moral de la part de l'employeur ;

ALORS D'UNE PART QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en se fondant sur un motif inopérant tiré du laps de temps observé par Monsieur X... pour invoquer les faits de harcèlement moral dont il avait été l'objet au sein de la Société LEO FRANCOIS, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1152-1 (ancien article L. 122-49) du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QUE, si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe, au vu de ces éléments, à l'employeur, partie défenderesse, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en se fondant, pour déclarer inadmissible aux débats comme nécessairement entachée de partialité l'attestation péremptoire de Monsieur Y... fournie aux débats par Monsieur X..., sur le motif inopérant tiré de la sanction disciplinaire dont celui-ci avait fait l'objet, la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 (ancien article L. 122-49) du Code du travail ;
ALORS ENCORE QUE l'objet du litige est déterminé par les moyens et prétentions des parties ; que Monsieur X... avait produit aux débats, une attestation qu'il avait cité de surcroît dans ses conclusions d'appel, émanant de Monsieur Z... ; qu'en affirmant que Monsieur X... se prévalait de la seule attestation de Monsieur Y... pour conclure à l'inexistence de faits constitutifs de harcèlement moral, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS ENSUITE QUE les juges du fond doivent examiner l'ensemble des éléments de preuve produits aux débats par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, Monsieur X... avait produit aux débats et fait état dans ses conclusions d'appel d'une attestation d'un tiers objectif, Monsieur Z..., corroborant l'attestation de Monsieur Y..., faisant présumer des faits répétés de harcèlement moral ; qu'en s'abstenant d'analyser même sommairement cette attestation, la Cour d'appel n'a pas motivé son arrêt, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE, dans ses conclusions d'appel, Monsieur X... avait fait valoir que sa rétrogradation non contestée à un poste inférieur, accompagnée d'une baisse de responsabilité contribuant à vider sa mission et de dénigrements systématique assortis d'insultes étaient de nature à faire présumer l'existence de faits constitutifs d'un harcèlement moral ; qu'en laissant sans réponse ces moyens péremptoires, la Cour d'appel a violé les articles 455 du Code de procédure civile et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45202
Date de la décision : 05/05/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mai. 2010, pourvoi n°08-45202


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45202
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