LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 528 et 529 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en cas de significations effectuées à des dates différentes par les parties gagnantes, la signification profite à celui qui l'a faite et fait courir le délai contre celui qui l'a reçue, hors le cas de solidarité ou d'indivisibilité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 17 octobre 2006, les demandes de M. X..., liquidateur judiciaire de M. Y... (le liquidateur) à l'encontre de M. et Mme Z... ont été rejetées et l'appel en garantie de la SCP B... (le notaire) par ces derniers déclaré en conséquence sans objet ; que le 20 février 2007, le notaire a fait signifier le jugement au liquidateur qui n'a pas interjeté appel dans le délai que cette signification a fait courir ; que le 30 mars 2007, Mme A..., épouse Z... a fait signifier le jugement au liquidateur qui a interjeté appel le 16 avril 2007 et intimé M. et Mme Z... ; que Mme Z... a formé un appel provoqué à l'encontre du notaire ; que le notaire et M. et Mme Z... ont invoqué l'expiration du délai ayant couru de la première signification du 20 février 2007 et la tardiveté de l'appel principal du liquidateur ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel formé par le liquidateur, l'arrêt retient par motifs propres et adoptés qu'en l'espèce, le notaire a fait signifier le jugement du 17 octobre 2006 à M. X... par acte du 20 février 2007 de sorte que, par application des dispositions des articles 528, 640 et 641 du code de procédure civile, le délai d'appel expirait le 20 mars 2007 ; qu'en remettant la déclaration d'appel au greffe de la cour d'appel le 16 avril 2007, M. X... a accompli cette formalité après l'expiration du délai prévu par l'article 538 du code de procédure civile, le point de départ du délai ayant couru de la signification faite le 20 février 2007 ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors que la signification faite le 20 février 2007 n'avait fait courir le délai d'appel, hors le cas de solidarité ou d'indivisibilité, qu'à l'égard du notaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y a ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;
Condamne la SCP B... et M. et Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP B... à payer à M. X..., ès qualités, la somme de 2 500 euros, rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils, pour M. X..., ès qualités
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré Maître X... ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Y... irrecevable en son appel du jugement rendu le 17 octobre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de COMPIEGNE ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « A l'appui de son déféré, Me X... es qualité invoque les moyens suivants :
1) A l'occasion de son appel il n'a intimé que les époux Z..., de sorte que son appel ne peut être contesté par la SCP B....
Ce grief est à l'évidence erroné l'appelé en garantie par un défendeur pouvant utiliser toutes les voies de droit de celui qui l'a appelé.
Au surplus l'irrecevabilité d'un appel pour tardiveté du recours peut être soulevé d'office par le conseiller de la mise en état ou la cour en application de des art 125 et 539 du cpc. Enfin il sera noté que les époux Z... se sont associés à cette demande par acte du 31 octobre 2008. Le fait qu'ils aient conclu au fond dans un premier temps ne les déchoit pas de ce droit, s'agissant non d'une nullité devant être soulevée avant toute défense au fond, mais d'une irrecevabilité d'ordre publique pouvant être soulevée en tout état de cause.
2) La signification du jugement à lui faite par la SCP B..., n'est pas susceptible de forclore l'appel engagé par Me X... contre les époux Z.... Comme il a été mentionné par le conseiller de la mise en état « toute partie à un jugement » peut, en application de l'art 528 du cpc, le notifier et faire courir le délai d'appel. Le moyen n'est donc pas pertinent.
3) La signification faite par les époux Z... date du 30 mars 2007, de sorte que l'appel interjeté le 16 avril 2007 était recevable. Ce moyen est sans incidence dès lors que le point de départ du délai court de la signification faite par la SCP B... le 26 février 2007.
4) La SCP B... n'avait « aucune raison » de procéder à cette signification dans la mesure où elle n'était pas directement visée par la procédure. Le moyen est également inopérant : appelée en garantie aux fins d'indemniser le cas échéant les époux Z..., la SCP B... avait intérêt, au sens de l'art 31 du cpc, à faire courir le délai d'appel contre le demandeur principal » (arrêt attaqué p. 3 et 4).
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU PREMIER JUGE QU': « en vertu de l'article 550 du Code de procédure civile, invoqué par la SCP B..., l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal » ;
que « dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel « principal n'est pas lui-même recevable » ; qu'en réalité, ce texte, qui traite de la recevabilité de l'appel incident et de l'appel provoqué, n'est pas applicable aux faits de la cause dès lors que la SCP B... et Annie A..., épouse Z..., contestent la recevabilité de l'appel principal ;
(…) qu'en vertu de l'article 528 du Code de procédure civile, « le délai à l'expiration duquel un recours ne peut plus être exercé « court à compter de la notification du jugement... » ; qu'il s'infère de ce texte que toute partie à un jugement peut le notifier afin de faire courir le délai d'appel ; qu'aux termes de l'article 538 du même code, « le délai de recours par une voie ordinaire est d'un mois en « matière contentieuse » ;
(…) qu'en l'espèce, la SCP B... a fait signifier le jugement rendu le 17 octobre 2006 par le Tribunal de grande instance de COMPIEGNE à Maître Jean-Claude X... par acte du 20 février 2007 de sorte que, par application des dispositions des articles 528, 640 et 641 du Code de procédure civile, le délai d'appel expirait le 20 mars 2007 ; qu'en remettant la déclaration d'appel au greffe de la Cour le 16 avril 2007, Maître Jean-Claude X... a accompli cette formalité après l'expiration du délai prévu par l'article 538 du Code de procédure civile ;
Que, par voie de conséquence, il convient de déclarer Maître Jean-Claude X... ès qualités de liquidateur judiciaire de Philippe Y..., irrecevable en son appel » (Ordonnance du 3 octobre 2008 p. 3, § 4 à 7).
ALORS QU'en cas de significations effectuées à des dates différentes par les parties gagnantes, la signification profite à celui qui l'a faite et fait courir le délai contre celui qui l'a reçue, hors le cas de solidarité ou d'indivisibilité ; que l'appel interjeté par une partie contre celui qui lui a fait signifier le jugement, dans le délai d'un mois ouvert par cette signification, ne saurait être considéré comme irrecevable ; qu'en déclarant dès lors Maître X... ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Y... irrecevable en son appel interjeté le 16 avril 2007 contre les seuls époux Z... lesquels lui avaient fait signifier, par acte du 30 mars 2007, le jugement du Tribunal de Grande Instance de COMPIEGNE du 17 octobre 2006, soit dans le délai d'un mois requis, la Cour d'Appel a violé les dispositions des articles 528 et suivants du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté la confirmation de la vente du 8 février 1991 par Maître X... ès qualités de liquidateur à la liquidation judicaire de Monsieur Y... et de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir prononcer l'inopposabilité de la vente à la procédure collective ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : SUR L'INOPPOSABILITE Lorsqu'il a vendu le bien immobilier le 8 février 1991, Monsieur Y... était dessaisi de l'administration de tous ses biens par le jugement prononçant sa liquidation judiciaire en date du 21 juillet 1989, laquelle décision avait nommé Maître X... en qualité de liquidateur ce qui lui conférait un monopole pour les initiatives propres à permettre la réalisation des actifs du débiteur et le désintéressement des créanciers.
Il est unanimement admis que la conséquence de la violation du dessaisissement du débiteur est l'inopposabilité à la procédure collective de l'acte passé.
Mais, Maître X... avait écrit au notaire le 27 / 02 / 91 qu'il pourrait faire avaliser par le juge commissaire la transaction intervenue hors sa vue si l'officier ministériel était en mesure de certifier que la valeur vénale du bien cédé correspond bien à la somme de 650. 000 francs net vendeur ce que le notaire faisait le 15 avril suivant en écrivant que la vente est très favorable aux créanciers (…) compte (tenu) de la situation de l'immeuble.
En outre, le notaire adressait au liquidateur un chèque de la somme de 223. 069, 07 francs représentant le solde du compte après règlement des créanciers hypothécaires que Maître X... aurait dû désintéresser prioritairement aux créanciers chirographaires s'il avait été destinataire de la totalité du prix.
Ainsi que le soutient le notaire le liquidateur a manifesté une volonté non équivoque de confirmer l'acte, au sens des dispositions de l'article 1338 du Code civil, à une unique condition dont tout indique qu'elle a été remplie, validation dont le notaire avait pris acte.
La vente litigieuse est, dès lors, consolidée ce qui impose le rejet des prétentions du liquidateur et rend inutile l'examen de la demande de garantie du notaire et des objections opposées à celle-ci » (jugement p. 4, 3 derniers § et p. 5, § 1 à 4).
ALORS QUE les actes juridiques accomplis par le débiteur en liquidation judiciaire, dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, sont frappés d'inopposabilité à la procédure collective ;
que la confirmation d'un acte inopposable exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer ; que les juges du fond ont rappelé les conditions dans lesquelles Maître X... ès qualités aurait accepté de ratifier la vente effectuée par Monsieur Y..., en violation du dessaisissement de la disposition de ses biens : « si l'officier ministériel était en mesure de certifier que la valeur vénale du bien cédé correspond bien à la somme de 650. 000 francs net vendeur » (jugement p. 4, dernier § et p. 5, § 1er) ; que les juges ont cependant considéré que Maître X... ès qualités aurait ainsi manifesté une volonté non équivoque de confirmer la vente motifs pris de ce que « le notaire adressait au liquidateur un chèque de la somme de 223. 069, 07 francs représentant le solde du compte après règlement des créanciers hypothécaires » (jugement p. 5, § 2) ; qu'en statuant ainsi cependant que Maître X... ès qualités, seul habilité à appréhender et répartir le prix de vente, n'avait pu accepter en connaissance de cause la diminution conséquente en résultant, les juges du fond ont violé les dispositions de l'article L. 622-9 du Code de commerce, ensemble celles de l'article 1338 du Code civil.