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30/03/2010 | FRANCE | N°09-14287

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 mars 2010, 09-14287


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... s'est rendu caution à l'égard la Banque populaire du Massif Central (la banque), de trois engagements de la société Globe Trotter productions (la société) dont il était le gérant ; que la société ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire, la banque a assigné M. X... en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 29 272,40 euros, avec intérêts au taux légal à

compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... s'est rendu caution à l'égard la Banque populaire du Massif Central (la banque), de trois engagements de la société Globe Trotter productions (la société) dont il était le gérant ; que la société ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire, la banque a assigné M. X... en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 29 272,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009, alors selon le moyen :
1°/ que les juges du fond sont liés par les conclusions prises devant eux et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; qu'en énonçant que la caution ne discutait pas "autrement" la somme de 158,14 euros admise par la banque au titre de la déchéance des intérêts échus, cependant que M. X... demandait dans ses conclusions récapitulatives, que la banque soit déchue non seulement des intérêts échus au titre des échéances impayées pour un total de 158,14 euros mais également des intérêts prélevés à tort depuis l'origine des engagements, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 313-22 du code monétaire et financier emporte dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ; que la cour d'appel ayant constaté que la banque ne rapportait pas la preuve qu'elle avait communiqué chaque année les informations nécessaires à la caution, que ce soit au titre du prêt du 25 août 1997 ou celui du 31 mars 1998 et qu'elle encourait en conséquence la déchéance des intérêts échus, en limitant cette déchéance à la somme de 158,14 euros correspondant aux intérêts échus au titre des échéances impayées déclarées par l'établissement de crédit sans prononcer celle des intérêts conventionnels prélevés à tort depuis l'origine des engagements, la cour d'appel a violé l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
3°/ que dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit, les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés affectés prioritairement au principal de la dette ; que tout en constatant que la Banque populaire du Massif Central ne rapportait pas la preuve qu'elle avait communiqué chaque année les informations nécessaires à la caution, la cour d'appel a dit sans effet ce manquement de l'établissement de crédit sur le prêt du 30 septembre 1998, la dette en résultant étant supérieure au maximum d'engagement de la caution, dont l'obligation ne s'impute ainsi que sur le capital ; qu'en ne vérifiant pas, comme elle y était invitée, si le principal de la dette réclamée à la caution ne devait pas être réduit pour tenir compte des paiements effectués par le débiteur principal, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le montant du capital restant dû au titre du prêt du 30 septembre 1998, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, après avoir relevé que la banque soutenait qu'aucun intérêt autre que ceux déclarés dans le cadre de la liquidation n'avait été prélevé, a retenu que depuis la déclaration de créance et la liquidation judiciaire aucun intérêt n'avait été comptabilisé depuis 2000 et que cette déchéance ne touchait en pratique que les deux premiers prêts pour un total admis par la banque et non autrement discuté de 158,14 euros et qu'en conséquence la déchéance des intérêts encourue par la banque demeurait sans effet sur la troisième dette, très supérieure au maximum d'engagement de la caution, de sorte que son obligation ne s'imputait que sur le capital ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à de simples arguments, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 1382 du code civil et L. 313-12 du code monétaire et financier ;
Attendu que pour condamner M. X... au paiement de la somme de 29 272,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009, l'arrêt retient que, compte tenu de l'engagement limité de la caution, l'interruption de crédit n'avait pas aggravé son préjudice et, qu'en toute hypothèse, elle n'avait perdu aucune chance de ne pas être poursuivie à hauteur du montant de son engagement limité ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la rupture brutale du crédit n'avait pas compromis les chances de poursuite de la société débitrice et fait perdre une chance à la caution de ne pas être appelée dans le cadre de son engagement, fût-il limité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. X... à payer à la Banque populaire du Massif Central la somme de 29 272,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009, l'arrêt rendu le 25 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la Banque populaire du Massif Central aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné monsieur X... à payer à la Banque populaire du Massif Central la somme de 29.272,40 € avec intérêts aux taux légal à compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009 ;
AUX MOTIFS QU'en cause d'appel, l'appelant est recevable à invoquer un moyen nouveau, qui ne constitue pas une demande nouvelle ; qu'ainsi peut-il solliciter que faute d'information à la caution, telle que prévue par l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, la Banque populaire du Massif Central soit, non pas déboutée de ses demandes, mais déchue de son droit aux intérêts ; qu'en l'espèce, faute de ce que la preuve de la délivrance annuelle des informations prescrites ait été effectuée, cette déchéance est encourue ; que sa portée est néanmoins limitée, en ce que d'une part, depuis la déclaration de créance et la liquidation judiciaire aucun intérêt n'a été comptabilisé depuis 2000, et d'autre part en ce que cette déchéance ne touche en pratique que les deux premiers prêts, du 25 août 1997 et du 31 mars 1998, pour un total admis par la banque et non autrement discuté, de 158,14 €, ce qui sera donc retenu, mais demeure sans effet sur la troisième dette, très supérieure au maximum d'engagement de la caution de sorte que son obligation ne s'impute que sur le capital ;
1°) ALORS QUE les juges du fond sont liés par les conclusions prises devant eux et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ;qu'en énonçant que la caution ne discutait pas « autrement » la somme de 158,14 € admise par l'établissement de crédit au titre de la déchéance des intérêts échus, cependant que monsieur X... demandait, dans ses conclusions récapitulatives, signifiées le 8 janvier 2009, que la Banque populaire du Massif Central soit déchue non seulement des intérêts échus au titre des échéances impayées, pour un total de 158,14 €, mais également des intérêts conventionnels prélevés à tort depuis l'origine des engagements, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 313-22 du code monétaire et financier emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ; que la cour d'appel ayant constaté que la Banque populaire du Massif Central ne rapportait pas la preuve qu'elle avait communiqué chaque année les informations nécessaires à la caution, que ce soit au titre du prêt du 25 août 1997 ou de celui du 31 mars 1998, et qu'elle encourait en conséquence la déchéance des intérêts échus, en limitant cette déchéance à la seule somme de 158,14 € correspondant aux intérêts échus au titre des échéances impayées déclarées par l'établissement de crédit, sans prononcer celle des intérêts conventionnels prélevés à tort depuis l'origine des engagements, la cour d'appel a violé l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
3°) ALORS QUE dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit, les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés affectés prioritairement au principal de la dette ; que tout en constatant que la Banque populaire du Massif Central ne rapportait pas la preuve qu'elle avait communiqué chaque année les informations nécessaires à la caution, la cour d'appel a dit sans effet ce manquement de l'établissement de crédit sur le prêt du 30 septembre 1998, la dette en résultant étant supérieure au maximum d'engagement de la caution, dont l'obligation ne s'impute ainsi que sur le capital ; qu'en ne vérifiant pas, comme elle y était invitée, si le principal de la dette réclamée à la caution ne devait pas être réduit pour tenir compte des paiements effectués par le débiteur principal, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le montant du capital restant dû au titre du prêt du 30 septembre 1998, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné monsieur X... à payer à la Banque populaire du Massif Central la somme de 29.272,40 € avec intérêts aux taux légal à compter du 26 mars 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 7 janvier 2009 ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X... soutient reconventionnellement que la banque a commis une faute en interrompant brusquement ses crédits et a ainsi compromis la situation du débiteur principal ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier que tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours ; qu'en l'espèce l'appelant énonce que la Banque populaire du Massif Central a brusquement et sans avis préalable rejeté des chèques, révoquant ainsi l'ouverture du crédit de la société ; que pour une caution, la faute commise par la banque par interruption brutale de crédit, si elle est établie, constitue une simple perte de chance de ne pas être poursuivie dans le cadre de son engagement de caution ; qu'en l'espèce, compte tenu du montant de débit atteint par le compte courant, soit 243.835 F au moment du rejet des chèques, et alors que l'engagement de la caution était limité à 100.000 F, ladite interruption de crédit n'a pas aggravé le préjudice de la caution ; qu'en toute hypothèse, celle-ci n'est pas tenue à hauteur de toute la dette ; qu'elle n'a donc perdu aucune chance de ne pas être poursuivie à hauteur du montant de son engagement limité ; que par ailleurs le débit important du compte était atteint sans convention qui en limiterait le montant, de sorte que le gérant de la société débitrice, qui n'était autre que la caution, monsieur X..., savait que ce crédit pouvait être interrompu et connaissait les risques qu'il prenait à poursuivre sur un débit aussi important ; que la banque, en cas de poursuite de l'octroi durable d'un crédit de cette importance, prenait le risque de se rendre fautive d'octroi de crédit abusif ; que monsieur X... doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive de crédit ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU PREMIER JUGE QUE dans ses conclusions, monsieur X... déclare que les comportements de la BPMC sont à l'origine de la mise en liquidation de la SARL Globe Trotter Productions ; que monsieur X... ne produit pas la moindre pièce venant en appui de ses affirmations (courriers de dénonciation de la banque, extraits de compte et bordereaux, courrier d'engagement d'un éventuel investisseur) ; que le tribunal ne retiendra pas ces arguments ;
1°) ALORS QUE commet une faute l'établissement de crédit qui retire brutalement son crédit à une entreprise, en l'absence de comportement gravement répréhensible ou de situation irrémédiablement compromise de celle-ci ; que la caution ayant soutenu, dans ses conclusions récapitulatives, signifiées le 8 janvier 2009, que la Banque populaire du Massif Central avait commis une faute, non pas en interrompant le crédit du débiteur principal, mais en l'interrompant brusquement et sans avis préalable, en retenant, pour écarter la faute invoquée, que l'établissement de crédit, en cas de poursuite de l'octroi durable d'un crédit important, prenait le risque de se rendre fautif d'octroi de crédit abusif, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2°) ALORS QU' en l'absence de convention limitant le montant du débit autorisé, commet une faute l'établissement de crédit qui supprime brusquement tout crédit à une entreprise, bien que le découvert maximum antérieurement consenti n'ait pas été atteint ; qu'en retenant, pour écarter la faute invoquée, que la caution, qui n'était autre que le gérant de la société débitrice, savait que le crédit pouvait être interrompu et connaissait les risques qu'il prenait à poursuivre sur un débit aussi important, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en l'absence de convention limitant le montant du débit autorisé, le débit ayant justifié la révocation brutale du crédit n'était pas inférieur à celui antérieurement autorisé par la Banque populaire du Massif Central, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1382 du code civil ;
3°) ALORS QU' engage sa responsabilité à l'égard de la caution l'établissement de crédit qui fait perdre à la société débitrice, par la cessation brutale de ses concours, toute chance de se redresser en la privant des moyens de son exploitation ; qu'en énonçant, pour écarter la responsabilité de la Banque populaire du Massif Central, que, compte tenu de l'engagement limité de la caution, l'interruption de crédit n'avait pas aggravé son préjudice et, en toute hypothèse, qu'elle n'avait perdu aucune chance de ne pas être poursuivie à hauteur du montant de son engagement limité, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la rupture brutale du crédit n'avait pas compromis les chances de poursuite de la société débitrice, et fait perdre une chance à la caution ainsi de ne pas être appelée dans le cadre de son engagement, fût-il même limité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-14287
Date de la décision : 30/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 25 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 mar. 2010, pourvoi n°09-14287


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.14287
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