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24/03/2010 | FRANCE | N°08-70089

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-70089


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 3211-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Attendu, d'une part, que l'employeur ne peut procéder à une baisse du taux horaire de base du salarié sans son accord ; d'autre part, que ce taux supporte les effets des augmentations générales et de la réduction du temps de travail sans diminution de salaire, applicables au salarié ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Lidl à compter du 4 jan

vier 1995 en qualité de chef de magasin adjoint suivant contrat de travail fixant à 178...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 3211-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Attendu, d'une part, que l'employeur ne peut procéder à une baisse du taux horaire de base du salarié sans son accord ; d'autre part, que ce taux supporte les effets des augmentations générales et de la réduction du temps de travail sans diminution de salaire, applicables au salarié ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Lidl à compter du 4 janvier 1995 en qualité de chef de magasin adjoint suivant contrat de travail fixant à 178,35 heures l'horaire mensuel moyen ; qu'après avoir été promu chef de magasin, il a signé, en mars 1997, un avenant fixant forfaitairement la durée hebdomadaire du travail à 46 heures soit 200,10 heures mensuelles "sans incidence sur les modes de rémunération en vigueur" ; que le 28 février 2002, soutenant que la société qui avait maintenu son salaire antérieur avait mécaniquement baissé son taux horaire contractuel, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en rappel de salaire, à compter de mars 1997, sur la base de son taux horaire de février 1997 ;

Attendu que pour faire droit à cette demande jusqu'en février 2001 seulement et compte tenu des réductions d'horaires intervenues à salaire constant les 1er janvier 1998 (44 heures) et 1er octobre 1999 (42 heures) ainsi que de l'augmentation de son salaire, l'arrêt retient que le salarié ne peut appliquer uniformément le manque à gagner généré par la différence entre le taux de février 1997 et celui de mars 1997 (8,18 francs) sans tenir compte des réductions d'horaires à salaire constant de 1998 et 1999, ni de l'augmentation de son salaire et qu'à partir de mars 2001 le taux horaire effectivement payé (10,8810) a dépassé le taux de février 1997, majoré des augmentations générales (10,7043) ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié devait bénéficier de l'augmentation générale de 1,5 % en mars 1997 et des réductions du temps de travail sans diminution de salaire intervenues en octobre 1998 et octobre 1999, ainsi que des augmentations décidées ultérieurement, la cour d'appel, qui ne pouvait limiter la demande du salarié à la période courant de février 1997 à l'année 2001, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne la société Lidl aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Lidl à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 8 581,56 €, outre 858,15 € à titre de congés payés afférents, le rappel de salaire dû à M. X... :

AUX MOTIFS QU'en février 97, le salaire de base de M X... était de 11 303 F pour 178,35 H mensuelles dont 8,70 H à 25 % ; QUE Le taux horaire mentionné est de 62,60 F ; QUE ce taux correspond au taux normal appliqué pour les 169,65 premières heures, les 8,70 H supplémentaires ayant été payées au taux de 78,25 F ; QU'en mars 97, le salaire de base versé a été de 11 473 F soit une augmentation de 1,5 % par rapport à février 97 ; QUE ce salaire rémunère 200,10 H de travail dont 30,45 heures supplémentaires ; QUE le taux horaire -qui ne figure pas sur le bulletin de paie- a été de 55,23 F, les heures supplémentaires étant rémunérées au taux de 69,04 F ; QUE de février à mars 97, le taux horaire a donc baissé de 7,37 F voire de 8,18 F si l'on fait abstraction des 1,5 % de majoration correspondant à l'augmentation annuelle des salaires ; QU'en mars 97, M. X... a signé un avenant à son contrat de travail stipulant : - que son horaire de travail serait désormais de 46 H hebdomadaires - qu'il recevrait en contrepartie une rémunération forfaitaire correspondant à 46 H hebdomadaires, la grille de rémunération correspondant au salaire forfaitaire étant jointe étaient annexés à cet avenant, un extrait de l'avenant du 1/11/96 à la convention collective nationale et un extrait de l'accord d'entreprise du 6/3/97 reprenant ces nouvelles dispositions ; QUE l'extrait annexé à l'avenant du 1/11/96; se contente, quant au salaire, de préciser que la rémunération forfaitaire du personnel d'encadrement doit être calculée conformément à diverses dispositions figurant à l'annexe de la convention et doit comprendre les majorations pour heures supplémentaires ; QUE l'extrait de l'accord d'entreprise annexé stipule qu'il est convenu que cette modification des horaires hebdomadaires n'aura aucune incidence sur les modes de rémunération en vigueur ; QU'ainsi, les salaires forfaitaires versés en contrepartie de 46 heures de travail hebdomadaire seront les salaires des Adjoints Chef de magasin et des Chefs de magasin augmentés de l'augmentation générale du 01.03.1997 (+ 1,5 %) ; Grille en annexe" ; QUE les exemplaires de l'avenant produits par les deux parties ne comportent pas la grille de rémunération correspondant au salaire forfaitaire visé dans l'avenant, ni les annexes de la convention collective nationale, ni enfin la grille annexée à l'accord d'entreprise ; QUE M. X... n'avait donc aucun élément chiffré lui permettant de connaître la rémunération qui lui serait versée à la suite de l'augmentation de son temps de travail ; QUE l'avenant en lui-même lui permettait de penser, faute de précision contraire, que sa nouvelle rémunération "correspondant à 46 H hebdomadaires" s'élèverait à 46 fois le taux horaire précédemment appliqué ; QUE l'accord d'entreprise, enfin, est ambigu ; QU'au lieu de stipuler clairement que la modification des horaires hebdomadaires n'aurait aucune incidence sur la rémunération, qui ne serait majorée que de l'augmentation générale de 1,5 %, cet accord prévoit que cette modification horaire n'aura aucune incidence sur "les modes de rémunération en vigueur" ; QU'or, le contrat de travail de M. X... prévoyait un horaire de travail précis (178,35 H) et un salaire, correspondant à ces heures de travail, quoique qualifié de forfaitaire ; QUE ses bulletins de salaire mentionnaient un taux horaire ; QUE dès lors, contrairement aux allégations de la SNC Lidl, les "modes de rémunération en vigueur" incluaient une référence au taux horaire, explicitement dans les bulletins de salaire, implicitement dans le contrat de travail ; QU'en conséquence, l'accord d'entreprise peut s'interpréter comme ne modifiant pas le taux horaire, l'un des éléments du mode de rémunération ; QUE M X... n'ayant pas eu les renseignements et éclaircissements qui lui auraient permis de savoir qu'en signant cet avenant il acceptait de travailler plus pour gagner autant -l'augmentation générale ayant vocation à s'appliquer, que l'avenant ait ou non été signé -, il n'a pu donner un accord exprès, clair et exempt de vices du consentement à une baisse de son salaire horaire ; QUE cette baisse du taux horaire n'ayant pas été consentie par M X..., la SNC Lidl ne pouvait valablement l'appliquer. M X... est donc fondé à obtenir un rappel de salaire à ce titre ; QUE le calcul qu'il propose ne peut toutefois être retenu ; QU'en effet, M X... a appliqué le "manque à gagner" généré par la différence entre le taux horaire de février et celui de mars 97 (8,18 F), uniformément, sur toutes les heures travaillées depuis lors ; QU'il a ainsi fait abstraction des réductions d'horaire intervenues le 1/10/98 (44 H) et le 1/10/99 (42 H) à salaire constant et de l'augmentation de son salaire ; QUE le tableau comparatif établi par la SNC Lidl démontre ainsi qu'à compter de mars 2001, le taux horaire effectivement payé à M X... (10,8810 €) a dépassé le taux horaire d'avant mars 97 majoré des augmentations générales (10,7043 €) ; QUE M X... est donc fondé à obtenir un rappel de salaires de mars 97 à février 01 ; QUE ce rappel s'élève à 7 995,03 € selon le chiffrage établi par la SNC Lidl ; QU' il convient d'y ajouter les rappels de salaires dus au titre des 13èmes mois, omis par l'employeur dans son calcul ; QUE ce treizième mois est payé en novembre chaque année ; QUE son montant est égal au salaire de base du mois de novembre ; QUE doivent ainsi être ajoutés : 238,98 € (97), 196,837 € (98), 78,51 € (99), 72,20 € (00) ; QU'au total, le rappel de salaires est donc de 8 581,56 € auxquels s'ajoutent 858,16 € au titre des congés payés afférents ; QUE cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 5/3/02, date de réception par la SNC Lidl de sa convocation devant le bureau de conciliation ; QUE M X... sera débouté de son autre demande, tendant à une modification pour l'avenir de son taux horaire ; QU'il serait inéquitable de laisser à sa charge ses frais irrépétibles. De ce chef, la SNC LIDL sera condamnée à lui verser 3000€ ;

1) ALORS QUE le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun ; que les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'à moins d'être spécifiquement destinées à remédier à la baisse de taux horaire subie, en mars 1997 par rapport au taux horaire contractuellement du à M. X..., les diminutions de l'horaire de travail avec maintien de la rémunération devaient être calculées en prenant pour base la rémunération contractuellement due avant la diminution du temps de travail, c'est-à-dire celle obtenu à partir du taux horaire contractuellement dû ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 121-1, recodifié L. 1221-1 du code du travail, et 1134 du code civil ;

2) ALORS QUE de même, qu'à moins d'être spécifiquement destinées à remédier à la baisse de taux horaire subie, en mars 1997 par rapport au taux horaire contractuellement dû à M. X..., les augmentations de salaire intervenues après cette date devaient s'appliquer sur le taux horaire qui lui était contractuellement dû ; que dès lors, en énonçant que « la SNC Lidl démontre qu'à compter de mars 2001, le taux horaire effectivement payé à M X... (10,8810 €) a dépassé le taux horaire d'avant mars 97 majoré des augmentations générales (10,7043 €) », sans rechercher les causes des augmentations ayant permis d'atteindre ce nouveau taux horaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-1, recodifié L. 1221-1 du code du travail, et 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-70089
Date de la décision : 24/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Caen, Chambre sociale, 27 juin 2008, 07/03064

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 27 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mar. 2010, pourvoi n°08-70089


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.70089
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