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04/02/2010 | FRANCE | N°09-11517

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 février 2010, 09-11517


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, tel que reproduit en annexe :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 14 novembre 2008) et les productions, que le 30 janvier 1991, la flèche de la remorque d'un ensemble routier appartenant à la société Vicking Trans express (la société Vicking), circulant sur une route nationale, s'est rompue, en suite de quoi ce véhicule, déporté sur la voie de sens contraire, a heurté le véhicule propriété de la société
X...
, conduit par Wilhelm X... (citoyen allemand),

lequel a été à son tour heurté à l'arrière par le véhicule suivant, conduit par Mme ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, tel que reproduit en annexe :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 14 novembre 2008) et les productions, que le 30 janvier 1991, la flèche de la remorque d'un ensemble routier appartenant à la société Vicking Trans express (la société Vicking), circulant sur une route nationale, s'est rompue, en suite de quoi ce véhicule, déporté sur la voie de sens contraire, a heurté le véhicule propriété de la société
X...
, conduit par Wilhelm X... (citoyen allemand), lequel a été à son tour heurté à l'arrière par le véhicule suivant, conduit par Mme Y... ; que Wilhelm X... et ses trois passagers, Heike Z... et les deux enfants Frederik et Nicolas X... sont décédés des suites de l'accident, tandis que Mme Y... n'a subi qu'un dommage matériel ; que la société UAP, assureur de la société Vicking, alors en redressement judiciaire et bénéficiaire d'un plan de redressement à compter du 30 novembre 1992, a indemnisé les victimes, ayants droit des familles X... et Z..., le dernier versement étant antérieur au 11 mai 1993 ; qu'un expert désigné au cours de l'enquête pénale a déposé le 28 mai 1993 son rapport établissant que les transformations irrégulières de la flèche de la remorque de l'ensemble routier étaient directement à l'origine de l'accident ; que par jugement du tribunal correctionnel du 6 juillet 1994, confirmé par arrêt de la cour d'appel du 23 mai 1995, M. Jacky A..., dirigeant de la société Vicking, a été condamné des chefs d'homicide par imprudence et de diverses infractions à la législation sur les transports routiers ; qu'au vu du rapport de l'expert, la société UAP a avisé le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le Fonds) de son intention d'opposer à la société Vicking un refus de garantie, puis a assigné, d'une part, cette société en annulation du contrat d'assurance, d'autre part, M. A..., Mme Y... et son assureur, la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF) en remboursement des indemnités versées pour le compte de qui il appartiendra aux victimes et à l'assureur de la société
X...
, la société Provinzial Versicherungs Anstalten (la société Provinzial) ; que par arrêt définitif du 3 septembre 1999, la cour d'appel a déclaré nul et de nul effet le contrat d'assurance de la société Vicking auprès de la société UAP sur le fondement des articles L. 113-2 et L. 113-8 du code des assurances pour omission intentionnelle de déclaration d'aggravation du risque et a confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait débouté la société Axa assurances, venue aux droits de la société UAP, de son action dirigée contre Mme Y... et la GMF ; que par acte du 30 juillet 2001, la société Axa assurances a assigné Mme Y... et la GMF, ainsi que la société
X...
et la société Provinzial, pour obtenir sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil, leur condamnation au paiement de la moitié des indemnités du sinistre qu'elle a prises en charge ; qu'elle a en outre, le 19 février 2003, appelé le Fonds en déclaration de jugement commun ;

Attendu que la société Axa France IARD, aux droits de la société Axa assurances, fait grief à l'arrêt infirmatif de la débouter de l'ensemble de ses demandes tendant au remboursement des sommes qu'elle avait versées en exécution d'un contrat depuis lors déclaré nul ;

Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation des articles 1235, 1250, 1251, 1351, 1371, 1376 du code civil, L. 211-30 du code des assurances, 1er à 6 de la loi n° 85-377 du 5 juillet 1985 et 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel qui, répondant aux conclusions, et sans être tenue de s'expliquer sur des moyens que ses constatations suffisaient à écarter, en a exactement déduit que la société Axa France IARD, assureur du coauteur fautif, n'avait d'action en remboursement ni contre la société
X...
propriétaire du véhicule impliqué conduit sans faute par Wilhelm X..., ni contre Mme Y... conductrice non fautive d'un autre véhicule impliqué dans l'accident de la circulation ;

D'où il suit que le moyen, qui est nouveau en ses cinquième, sixième et septième branches, et, mélangé de fait et de droit, comme tel irrecevable, qui est en outre inopérant en sa première branche, qui, enfin, manque en fait en ses deuxième et troisième branches, ne peut qu'être écarté pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD ; la condamne à payer aux sociétés
X...
et Provinzial Versicherungs Anstalten la somme globale de 2 500 euros, à la société GMF et Mme Y... la même somme globale et au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Odent, avocat aux Conseils pour la société Axa France IARD

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté l'ensemble des conclusions de la société AXA FRANCE IARD tendant au remboursement des sommes qu'elle avait versés en application d'un contrat depuis lors déclaré nul ;

AUX MOTIFS QUE la cour d''appel de Colmar, par un arrêt confirmatif du 3 septembre 1999, a débouté la société AXA FRANCE de son action contre Mme Y... et la GMF et définitivement jugé qu'elle ne pouvait recourir contre Mme Y..., non fautive, ni contre son assureur, si ce n'est sur le fondement des articles 1382 et 1251 du code civil ; qu'elle n'a pas non plus de recours contre M. X..., également non fautif, ni donc contre son assureur, la société PROVINZIAL ; que la loi du 5 juillet 1985 ne s'applique pas dans les recours entre coauteurs ni l'article 1384 al. 1er du code civil (invoqué en première instance), entre gardiens ; qu'elle ne peut exercer une action fondée sur la loi du 5 juillet 1985 contre Mme Y... et M. X... et leurs assureurs, en invoquant la subrogation dans les droits des victimes, car cette demande se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 3 septembre 1999 et qu'elle est mal fondée ; que le seul recours subrogatoire légal dont elle dispose est celui dans les droits de son assuré, après indemnisation de ce dernier, et que les conditions de la subrogation conventionnelle ne sont pas établies ; que la demande en restitution formée par la société AXA des sommes versées aux victimes après annulation du contrat conclu avec la société VICKING ne pouvait être poursuivie que contre cette dernière en vertu des règles de la nullité ; que celle-ci et son effet rétroactif n'ouvrent aucun recours à la société AXA contre les conducteurs ou propriétaires non fautifs des véhicules impliqués ;

1°/ ALORS QUE par l'arrêt définitif rendu par la cour d'appel de Colmar le 3 septembre 1999, le contrat d'assurance conclu entre la société AXA FRANCE et la société VICKING a été déclaré « nul et de nul effet » ; qu'il s'ensuit qu'en dépit du versement qu'elle a effectué pour l'indemnisation des victimes, la société AXA FRANCE n'avait pas la qualité d'assureur à l'égard de la société VICKING, qui n'était pas son assurée et qu'elle ne couvrait pas ; qu'en décidant dès lors de rejeter la demande de la société AXA fondée sur sa subrogation dans les droits des victimes, au motif erroné qu'elle lui était interdite par l'impossibilité pour un coauteur de recourir contre un coauteur, quand l'arrêt définitif du 3 septembre 1999 prononçant l'annulation du contrat d'assurance interdisait qu'elle pût être considérée comme étant l'assureur d'un coauteur, la cour a violé les articles 1351 et 1251 du code civil, ensemble les articles 1 à 6 de la loi du 5 juillet 1985 ;

2°/ ALORS QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a été tranché par le dispositif du jugement considéré, que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et qu'elle ait été formée par elles et contre elles en la même qualité ; que l'autorité de la chose jugée ne peut pas être opposée lorsque la demande a un autre objet ou est fondée sur une cause différente de celle qui a donné lieu au jugement ; qu'en l'espèce le dispositif de l'arrêt définitif du 3 septembre 1999 a décidé que l'action de la société AXA devait être rejetée en tant qu'elle était dirigée contre Mme Y... et son assureur, la GMF ; que, cependant, il avait été demandé à l'instance qui a donné lieu à cet arrêt le remboursement des sommes avancées sur le fondement du mécanisme de l'implication des véhicules ; qu'en revanche, dans la présente affaire, il a été demandé à la cour de satisfaire à cette demande parce qu'elle constituait la conséquence de la nullité du contrat d'assurance qui avait été constatée par l'arrêt précédent ; qu'ainsi cette demande intégrait à la fois une nouvelle cause et, à l'appui de cette dernière, une décision de justice définitive qui, par hypothèse, ne pouvait pas être dans les débats dans la précédente procédure et en laquelle elle trouvait son fondement nouveau ; qu'en décidant pourtant, malgré cette différence de cause, que la demande de la société AXA dirigée contre Mme Y... et la GMF se heurtait à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 3 septembre 1999, la cour a violé l'article 1351 du code civil ;

3°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, le juge ne peut décider qu'une demande se heurte à l'autorité de la chose jugée par une précédente décision sans avoir contrôlé l'identité de parties, d'objet et de cause ; qu'en l'espèce, pour opposer à la société AXA qu'elle ne pouvait pas agir contre Mme Y... et son assureur, la GMF, la cour s'est bornée à retenir que sa demande se heurtait, « en raison de l'identité d'objet et de parties », à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 3 septembre 1999 ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir recherché ni a fortiori retenu qu'il y avait également identité de cause, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351 du code civil ;

4°/ ALORS QUE la société AXA FRANCE, dans ses écritures, a insisté sur le fait qu'au regard de la nullité du contrat d'assurance conclu avec la société VICKING, elle a opéré des versements aux victimes, non pas en qualité de débiteur -n'étant obligée à rien, par aucune convention- mais uniquement en qualité de solvens d'une somme due par des tiers, en raison même de cette nullité, pour l'indemnisation des victimes d'un accident auquel cette dernière la rendait totalement étrangère ; qu'en laissant sans réponse cette argumentation justifiant son action en subrogation dans les droits des victimes, la cour a privé sa décision de motif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, l'assureur qui a procédé à une indemnisation pour le compte de qui appartiendra, et qui a ultérieurement bénéficié d'une décision de justice constatant que le contrat d'assurance en vertu duquel elle a cru devoir opérer cette indemnisation était nul, est fondé, par une action autonome, indépendante des règles de la subrogation, à demander le remboursement des sommes ainsi versées à l'assureur qui aurait dû prendre cette indemnisation à sa charge ; qu'en l'espèce, la société AXA a procédé, aux lieu et place de la société PROVINZIAL, à l'indemnisation des victimes, s'étant cru tenue d'agir ainsi en vertu d'une convention dont le juge a ultérieurement constaté la nullité, par un jugement définitif ; qu'en refusant dès lors de faire droit à sa demande de remboursement, au motif qu'elle ne serait pas justifiée par les règles de la subrogation, légale ou conventionnelle, la cour a violé les dispositions des articles 1250 du code civil et L.211-20 du code des assurances ;

6°/ ALORS QUE l'action de in rem verso est ouverte à celui qui, par un fait qui lui est personnel et dont il est résulté pour lui un appauvrissement, a fait entrer une valeur dans le patrimoine d'un autre ; que cette valeur s'entend de tout avantage appréciable en argent, tel que le fait de ne pas avoir engagé une dépense qui aurait été normalement à sa charge ; que cette action est ouverte par le seul fait que le demandeur ne jouit, pour obtenir ce qui lui est dû, d'aucune action naissant de la loi, d'un contrat, d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit ; qu'en l'espèce, il est constant, d'une part, que la société AXA, en raison de la nullité constatée du contrat conclu avec la société VICKING, a versé aux victimes une indemnisation qu'elle ne devait pas et qui aurait dû peser sur les assureurs des véhicules impliqués dans l'accident, lesquels, ne l'ayant pas versée, s'en sont enrichis ; que, d'autre part, selon les motifs mêmes de l'arrêt, la société AXA ne jouit, pour obtenir le remboursement qui lui est dû, d'aucune action naissant de la loi, d'un contrat, d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit ; qu'il s'ensuit que la demande en remboursement présentée par la société AXA, justifiée par la nullité du contrat, était fondée sur l'enrichissement sans cause des assureurs contre lesquels elle était dirigée ; qu'en se dispensant dès lors d'examiner la demande présentée sur ce fondement, comme l'appelaient ses propres constatations, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1371 du code civil ;

7°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, tout paiement suppose une dette, en sorte que ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition ; que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ; qu'en l'espèce, il est établi que le contrat conclu entre la société AXA FRANCE et la société VICKING a été déclaré nul et de nul effet par arrêt définitif du 3 septembre 1999 ; qu'il s'ensuit que le paiement qui a été fait par la société AXA FRANCE aux victimes du dommage provoqué par la société VICKING, auquel la société AXA FRANCE était étrangé, a été fait sans cause, cette dernière n'étant pas débitrice, et le paiement effectué ne pouvant avoir raison d'indemnité en l'absence de garantie ; que les victimes n'avaient donc aucun titre à recevoir de la société AXA FRANCE quelque paiement que ce soit ; qu'il s'ensuit qu'ayant reçu d'elle un paiement que cette dernière ne devait pas, le paiement était indu et donc sujet à répétition ; que dès lors que la cour constatait que les demandes de remboursement de la société AXA FRANCE, qui a indument payé les sommes qu'elle réclame, ne pouvaient aboutir sur le fondement de la subrogation, elle devait, nécessairement, tirant les conséquences de la nullité du contrat conclu avec la société VICKING, conclure que la société AXA FRANCE, simple solvens d'une somme dont elle n'était pas débitrice, payée pour une cause à laquelle elle était étrangère, à des victimes qui n'en étaient créancières à aucun titre, était fondée en ses demandes au titre de la répétition de l'indu ; qu'en se soustrayant à cette conséquence nécessaire, la cour a violé les articles 1235 et 1376 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-11517
Date de la décision : 04/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 14 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 fév. 2010, pourvoi n°09-11517


Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blanc, Me Foussard, Me Odent, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11517
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