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01/12/2009 | FRANCE | N°07-42796;08-41060

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 décembre 2009, 07-42796 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n° N 07 42.796 et W 08 41.060 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé en septembre 2004 en qualité d'électricien par la société Entreprise générale de travaux électriques Serradori et Cie ("EGTE Serradori"), pour laquelle il avait déjà travaillé antérieurement, a démissionné le 13 avril 2005 ; qu'après avoir adressé à l'employeur, le 21 avril 2005, un courrier expliquant sa démission par des retenues sur salaires injustifiées et le non paiem

ent d'heures supplémentaires, il a saisi la juridiction prud'homale, le 19 mai 2005...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n° N 07 42.796 et W 08 41.060 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé en septembre 2004 en qualité d'électricien par la société Entreprise générale de travaux électriques Serradori et Cie ("EGTE Serradori"), pour laquelle il avait déjà travaillé antérieurement, a démissionné le 13 avril 2005 ; qu'après avoir adressé à l'employeur, le 21 avril 2005, un courrier expliquant sa démission par des retenues sur salaires injustifiées et le non paiement d'heures supplémentaires, il a saisi la juridiction prud'homale, le 19 mai 2005, de diverses demandes liées à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail ;

Sur le pourvoi principal de l'employeur :

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié un rappel de salaire pour les mois de mars et d'avril 2005, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut opposer à l'employeur l'existence d'un usage ou d'un engagement unilatéral qu'à condition de relever les caractéristiques propres à ces actes, tenant pour le premier à l'existence d'une pratique fixe, générale et constante et, pour le second, à la formalisation écrite ou verbale d'un engagement de l'employeur ; qu'il ressortait, en l'espèce, des dispositions de l'accord collectif d'entreprise de réduction et d"aménagement du temps de travail du 22 janvier 2001 (cf. pages 7 et 8) que le droit à des jours de réduction de temps de travail n'était ouvert qu'aux salariés justifiant avoir effectué 1600 heures de travail effectif annuel ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait (cf. conclusions d'appel, pages 7 à 9) et offrait de démontrer que le salarié n'avait pas atteint le seuil de 1600 heures au titre de l'exercice 2004/2005, de sorte qu'il s'était indûment reconnu le droit de prendre 8 jours de RTT au titre de ce même exercice ; qu'en se fondant, pour reconnaître au salarié le droit d'obtenir la restitution de la somme retenue sur son salaire au titre de ces 8 jours de RTT, sur le constat que le tableau produit par l'employeur démontrait que pour la période considérée, « chaque salarié avait bien droit à 8 jours de RTT », sans à aucun moment relever les éléments caractéristiques d'un engagement unilatéral de l'employeur ou d'un usage de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 140 1 du code du travail ;

2°/ que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; qu'à supposer que le motif susvisé puisse être lu comme l'affirmation d'une rupture dans l'égalité de traitement au préjudice du salarié, la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'identité de situation existant entre le salarié et ceux auxquels ce dernier était comparé, a privé derechef sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 140 1 du code du travail ;

3°/ qu'il ressortait, en l'espèce, des dispositions de l'accord collectif d'entreprise de réduction et d'aménagement du temps de travail du 22 janvier 2001 (cf. pages 7 et 8) que le droit à des jours de réduction de temps de travail n'était ouvert qu'aux salariés justifiant avoir effectué 1600 heures de travail effectif annuel ; que l'employeur soutenait (cf. conclusions d'appel, pages 7 à 9) et offrait d'établir, par la production de divers tableaux, que le salarié n'avait pas atteint, au titre de l'exercice 2004/2005 ce seuil de 1600 heures, ce, même en assimilant ses jours d'absence pour maladie à du temps de travail effectif ; qu'en opposant à l'employeur la disposition de cet accord collectif prévoyant que « toute absence, rémunérée ou non, hormis les congés payés ou jours fériés, ayant pour effet d'abaisser la durée effective du travail à 35 heures au plus entraînera une réduction proportionnelle des jours de repos » et le constat du défaut d'absence de ce type en dehors de 10 heures au mois d'août 2004, quand elle aurait dû rechercher si le salarié avait bien atteint le seuil de 1600 heures de travail annuel au titre de l'exercice litigieux, jours d'absence pour maladie compris, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 140 1 du code du travail ;

4°/ que l'article L. 144 1 du code du travail ne prohibe la compensation qu'entre le montant des salaires et les sommes qui seraient dues à l'employeur " pour fournitures diverses " ; que ce texte est inapplicable aux retenues de salaire pratiquées au titre des jours de réduction du temps de travail pris indûment par le salarié ; qu'en affirmant le contraire pour mettre à la charge de l'employeur l'obligation d'informer le salarié de ce qu'il estimait trop importantes les périodes de réduction du temps de travail dont il avait bénéficié et de convenir avec lui des modalités de récupération, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu qu'ayant relevé le défaut d'absences du type de celles prévues par l'accord d'entreprise du 22 janvier 2001, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser au salarié des sommes au titre d'heures supplémentaires et congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1°/ que constitue un temps de travail effectif le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en l'espèce, il était constant que l'accord collectif d'entreprise mis en place dans le cadre de l'application de la loi Aubry II offrait aux salariés la possibilité de passer, avant de se rendre sur les chantiers, au siège de l'entreprise pour y bénéficier du transport par un véhicule de la société ; que l'employeur soutenait que la composition des équipes de salariés ainsi transportés se faisait librement, suivant les désirs et affinités respectifs des intéressés et que ces regroupements n'avaient pas le moindre lien avec la constitution des équipes de travail ou encore avec les lieux de situation des
chantiers ; qu'en affirmant que c'était pendant ce temps de présence des salariés au siège de l'entreprise que se constituaient les équipes de travail et qu'étaient chargés les camions pour en conclure que les salariés étaient dès lors, pendant ce temps, à la disposition de l'employeur et ne pouvaient vaquer librement à leurs occupations personnelles, sans à aucun moment constater que pendant le laps de temps litigieux, les salariés étaient obligés de répondre aux directives données par l'employeur aux fins, notamment, de constituer les équipes de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 140 1 et L. 212 4 du code du travail ;

2°/ qu'en l'état de l'accord collectif d'entreprise reconnaissant aux salariés la possibilité de passer, avant de se rendre sur les chantiers, au siège de l'entreprise pour y bénéficier du transport par un véhicule de la société, il appartient au salarié de supporter la charge de la preuve de ce que les salariés se trouvaient, en pratique, obligés de procéder à ce passage préalable au siège de l'entreprise faute d'avoir été avisés par avance de l'organisation de leur journée de travail ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir démontré qu'il donnait aux salariés le moyen de se rendre directement sur les chantiers à 7h45, notamment en leur indiquant à l'avance l'organisation des journées de travail, quand l'accord collectif d'entreprise applicable précisait que ce passage par le siège n'était qu'une simple faculté abandonnée à la volonté discrétionnaire des salariés, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ensemble les articles L. 140 1 et L. 212 4 du code du travail ;

3°/ qu'en tout état de cause l'employeur faisait valoir sans être contesté et offrait d'établir en preuve, par la production de diverses attestations, que le salarié avait l'habitude de quitter le chantier avant l'horaire normal de fin de journée de travail ; qu'en condamnant l'employeur à payer au salarié une certaine somme au titre de son temps de présence au siège de l'entreprise entre 7h15 et 7h45, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la somme prétendument due à ce titre ne pouvait pas être, au moins en partie, compensée avec celle due par le salarié lui même au titre des heures de travail qu'il s'était dispensé d'effectuer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 140 1, L. 144 1 et L. 212 4 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté, par une appréciation souveraine des attestations produites, qu'entre son arrivée au siège de l'entreprise à 7h15 et son départ pour les chantiers à 7h45, période au cours de laquelle seulement se constituaient les équipes et étaient chargés les camions, le salarié n'était plus libre de son activité et se tenait à la disposition de l'employeur sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, de sorte qu'il se trouvait en situation de travail effectif au sens de l'article L. 212 4 devenu L. 3121 1 du code du travail, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer une recherche non demandée et que ses constatations ne rendaient pas nécessaire, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident et du pourvoi propre du salarié :

Vu les articles L. 1231 1, L. 1237 2 et L. 1232 1 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes tendant à la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement et au paiement d'indemnités de rupture et de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel retient que la lettre de démission de M. X... était claire et non équivoque, sans aucune réserve liée à l'attitude de l'employeur ou aux conditions de travail et que ce n'est que postérieurement à cette démission que le salarié a établi une liste de griefs ;

Attendu, cependant, que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses énonciations que dès le 21 avril 2005, soit 8 jours seulement après l'envoi de sa lettre de démission du 13 avril 2005, M. X... reprochait à son employeur des retenues sur le salaire du mois de mars et le non paiement d'heures supplémentaires en lui imputant la responsabilité de la rupture, et que ses demandes en paiement de rappel de salaire ont été reconnues fondées, circonstances qui, caractérisant l'existence d'un différend contemporain de la démission, rendaient celle-ci équivoque et obligeaient à l'analyser en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes tendant à la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement et au paiement d'indemnités de rupture et de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 10 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix en Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Entreprise générale de travaux électriques Serradori et Compagnie aux dépens ;

Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Entreprise générale de travaux électriques Serradori et Compagnie à payer à la SCP Gatineau et Fattaccini la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits aux pourvois principaux n° N 07 42.796 et W 08 41.060 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'Entreprise générale de travaux électriques Serradori et compagnie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société E.G.T.E. SERRADORI à payer au salarié les sommes de 149,80 et 898,80 euros bruts de rappel de salaire pour les mois de mars et avril 2005 et de 104,86 euros bruts à titre de congés payés y afférents et à lui remettre les bulletins de paie rectifiés pour les mois de mars et avril 2005, outre d'AVOIR alloué au salarié la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

AUX MOTIFS QUE « M. X... expose qu'au mois de mai 2004, lui a été retenu sur son salaire une somme de 278,25 euros avec le libellée « remboursement trop perçu PRO-BTP », mais que son employeur ne lui a pas fourni d'explication sur cette retenue ; qu'en mars 2005, lui a été retenu une somme de 149, 80 euros au titre .... « heures d'absences à déduire », alors qu'il n'avait pas été absent comme le démontre notamment le paiement de ses primes de panier ; que pour avril 2005, il manque également 84 heures sur son bulletin de salaire, soit la somme de 898,90 euros ; que la position de l'employeur qui prétend que ces retenues correspondent à des jours de RTT dont il aurait bénéficié et qui ne lui étaient pas dus, ne peut être approuvée car les jours de RTT sont la contrepartie de 38 heures hebdomadaires de travail et ne peuvent dont être déduits de la rémunération des salariés, même si, comme cela a été le cas, il y a eu une période de maladie, l'accord collectif sur ce point stipulant que « toute période d'absence sera déduite de la rémunération mensuelle lissée », que de toute façon, ces jours de RTT sont pris avec l'accord de l'employeur et il ne peut être victime d'une erreur de calcul de ce dernier ;

QUE l'employeur réplique qu'en ce qui concerne la somme retenue en 2004, elle correspondait à un complément de salaire perçu deux fois par M. X..., une fois de sa part et une fois de la part de PRO-BTP, que donc la régularisation était légitime ; qu'en ce qui concerne les déductions opérées en mars et avril 2005, il existe dans l'entreprise un accord de réduction du temps de travail qui prévoit que les salariés doivent travailler 1600 heures sur l'année, que les semaines de travail pouvant varier entre 32, 39 et 42 heures sur l'année, il est accordé des journées de RTT ; que cependant, pour que ces journées soient effectivement acquises au salarié, encore faut-il qu'il ait effectivement travaillé 1600 heures dans l'année ; qu'en l'espèce, et même en tenant compte des absences pour maladie, qui sont assimilées à du temps de travail effectif, M. X... reste bien redevable, au terme de l'exercice 2004-2005, durant lequel il a travaillé 1505, 20 heures, de 56 heure de travail ; que donc, compte tenu de 35 heures supplémentaires que le salarié revendiquait, et qu'elle a retenu pour couper court à toute discussion, elle devait retenir 98 heures dues ventilées sur deux mois, que cependant une erreur s'est produite puisque des vendredis non travaillés sur des semaines de 32 heures ont été aussi comptabilisés comme jours de RTT, et la retenue s'est opérée sur 133 heures moins 35 au lieu de 56 ; qu'elle reconnaît donc bien devoir 42 heures ; que donc le jugement qui a fait droit à cette partie de la demande du salarié, doit sur ce point être confirmé ;

QUE si la retenue opérée au titre du trop perçu de l'année 2004 apparaît justifiée, en ce qui concerne les retenues de salaire de mars et avril 2005, se pose le 7/29 problème de leur bien fondé ; qu'en effet, l'employeur a retenu, sur le mois de mars, 14 heures et, sur le mois d'avril, 84 heures au titre d' « heures d'absence à déduire » ; qu'il apparaît aujourd'hui qu'il entend justifier ces retenues non pas par des heures d'absence injustifiées sur les mois concernés, mais par des journées de RTT prises par le salarié durant la période « 2004-2005 » ; qu'après avoir dans un premier temps considéré que 19 jours avaient ainsi été pris sans être dus, il a finalement reconnu en avoir retenu 11 de trop qui correspondaient au vendredi des semaines de 32 heures ; qu'il ne resterait en conséquence que 8 jours, donc 56 heures, de RTT indûment prise ; que cependant, il résulte de ses propres pièces que le calcul du temps de travail et des horaires de l'entreprise est collectif ; qu'ainsi, c'est l'entreprise qui fixe la durée de travail hebdomadaire et les journées de RTT qui en découlent, qu'il produit ainsi un tableau duquel il résulte que pour la période considérée, chaque salarié avait bien droit à 8 jours de RTT ; que si l'accord collectif sur le temps de travail dans l'entreprise, dont le Conseil a justement retenu qu'il avait bien été soumis au vote des salariés, contrairement à ce qui est aujourd'hui soutenu par M. X..., prévoit que « toute absence rémunérée ou non, hormis les congés payés ou jours fériés, ayant pour effet d'abaisser la durée effective du travail à 35 heure ou plus entraînera une réduction proportionnelle des jours de travail », l'analyse des bulletins de salaire de la période considérée ne fait état d'aucune absence de ce type en dehors de 10 heures au mois d'août 2004 ; que si le salarié ne conteste pas avoir été absent 19 jours pour maladie, ces absences maladie doivent, elles, être, comme le soutient le salarié, lissées, c'est-à-dire neutralisées dans le calcul du temps de travail, faute de quoi cela entraînerait pour le salarié absent pour maladie, une obligation de compenser sur ces jours de RTT, lesdites absences ; que, dès lors, les retenues que l'employeur a opérées sont infondées ; qu'elles le sont d'autant plus que, même si le calcul de l'employeur avait été validé, elles seraient contraires aux dispositions de l'article L. 144-1 du Code du travail ; qu'il appartenait, en effet, si l'employeur considérait que son salarié avait bénéficié de périodes de RTT trop importantes de l'en informer et de convenir avec lui de modalités de récupération, mais en aucun cas de retenir d'office une partie du salaire ; que dès lors, il sera alloué au salarié les sommes de 149, 80 et 898, 90 euros qu'il réclame à ce titre, ainsi que les congés payés y afférents, que la Cour allouera ....office »,

1°. ALORS QUE le juge ne peut opposer à l'employeur l'existence d'un usage ou d'un engagement unilatéral qu'à condition de relever les caractéristiques propres à ces actes, tenant pour le premier à l'existence d'une pratique fixe, générale et constante et, pour le second, à la formalisation écrite ou verbale d'un engagement de l'employeur ; qu'il ressortait, en l'espèce, des dispositions de l'accord collectif d'entreprise de réduction et d'aménagement du temps de travail du 22 janvier 2001 (cf. pages 7 et 8) que le droit à des jours de réduction de temps de travail n'était ouvert qu'aux salariés justifiant avoir effectué 1600 heures de travail effectif annuel ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait (cf. conclusions d'appel, pages 7 à 9) et offrait de démontrer que le salarié n'avait pas atteint le seuil de 1600 heures au titre de l'exercice 2004/2005, de sorte qu'il s'était indûment reconnu le droit de prendre 8 jours de RTT au titre de ce même exercice ; qu'en se fondant, pour reconnaître au salarié le droit d'obtenir la restitution de la somme retenue sur son salaire au titre de ces 8 jours de RTT, sur le constat que le tableau produit par l'employeur démontrait que pour la période considérée, « chaque salarié avait bien droit à 8 jours de RTT », sans à aucun moment relever les éléments caractéristiques d'un engagement 8/29 unilatéral de l'employeur ou d'un usage de l'entreprise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 140-1 du Code du travail ;

2°. ALORS QUE l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; qu'à supposer que le motif susvisé puisse être lu comme l'affirmation d'une rupture dans l'égalité de traitement au préjudice du salarié, la Cour d'appel, qui n'a pas constaté l'identité de situation existant entre le salarié et ceux auxquels ce dernier était comparé, a privé derechef sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 140-1 du Code du travail ;

3°. ALORS QU'il ressortait, en l'espèce, des dispositions de l'accord collectif d'entreprise de réduction et d'aménagement du temps de travail du 22 janvier 2001 (cf. pages 7 et 8) que le droit à des jours de réduction de temps de travail n'était ouvert qu..aux salariés justifiant avoir effectué 1600 heures de travail effectif annuel ; que l'employeur soutenait (cf. conclusions d'appel, pages 7 à 9) et offrait d..établir, par la production de divers tableaux, que le salarié n'avait pas atteint, au titre de l'exercice 2004/2005 ce seuil de 1600 heures, ce, même en assimilant ses jours l'absence pour maladie à du temps de travail effectif ; qu'en opposant à l'employeur la disposition de cet accord collectif prévoyant que « toute absence, rémunérée ou non, hormis les congés payés ou jours fériés, ayant pour effet d'abaisser la durée effective du travail à 35 heures au plus entraînera une réduction proportionnelle des jours de repos » et le constat du défaut d'absence de ce type en dehors de 10 heures au mois d'août 2004, quand elle aurait dû rechercher si le salarié avait bien atteint le seuil de 1600 heures de travail annuel au titre de l'exercice litigieux, jours d'absence pour maladie compris, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 140-1 du Code du travail ;

4°. ALORS QUE l'article L. 144-1 du Code du travail ne prohibe la compensation qu'entre le montant des salaires et les sommes qui seraient dues à l'employeur " pour fournitures diverses " ; que ce texte est inapplicable aux retenues de salaire pratiquées au titre des jours de réduction du temps de travail pris indûment par le salarié ; qu'en affirmant le contraire pour mettre à la charge de l'employeur l'obligation d'informer le salarié de ce qu'il estimait trop importantes les périodes de réduction du temps de travail dont il avait bénéficié et de convenir avec lui des modalités de récupération, la Cour d'appel a violé le texte susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société E.G.T.E. SERRADORI à verser au salarié les sommes de 3.422,93 euros bruts au titre des heures supplémentaires et de 342,29 euros bruts à titre de congés payés y afférents, outre d'AVOIR alloué au salarié la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

AUX MOTIFS QUE « M. X... expose qu'il a systématiquement effectué chaque jour une demi-heure supplémentaire, qu'en effet, alors qu'il était dans l'entreprise à 7h15, heure à laquelle tous les salariés devraient être présents pour recevoir les instructions de l'employeur et assurer le chargement des camions, mais qu'il n'était payé qu'à partir de 7h 45, heure de départ de l'entreprise ; que ce temps qui ne lui était pas réglé était cependant un temps de travail effectif durant lequel il était sous la subordination de l'employeur, qu'il lui est donc bien dû 3.422,93 euros à ce titre ; qu'en effet, c'est à tort que le Conseil a considéré que l'accord d'entreprise mis en place dans le cadre de la loi AUBRY II dispensait l'employeur de payer la demi-heure de travail supplémentaire du matin, car bien que contradictoire, l'audition du délégué du personnel a bien montré que les salariés avaient lobligation de se rendre au dépôt chaque matin, dépôt où se décidait la répartition des salariés sur les chantiers ; que le temps de trajet entre l'entreprise et les chantiers constitue donc, de toute façon, un temps de travail effectif et ce d'autant qu'il se faisait dans des véhicules de chantier chargés de matériel ; qu'en réalité l'accord collectif conclu n'a eu pour objectif que de maintenir le même horaire de travail en faisant croire à des réductions ;

QUE l'employeur réplique que M. X.....quittait fréquemment l'entreprise avant la fin normale de sa journée de travail quand les chantiers étaient terminés ; qu'en ce qui concerne les départs du matin, si elle met à la disposition des salariés des fourgons qui leur permettent de rejoindre depuis leur domicile, le siège de l'.entreprise, puis de ce siège les chantiers où ils sont affectés, il n'impose pour sa part aucune obligation et notamment pas celle de passer nécessairement au siège de l'entreprise, que donc le temps de transport entre le siège et le chantier ne peut être considéré comme du temps de travail effectif ; que c'est d'ailleurs ce qu'a indiqué clairement l'accord collectif et ce qu'a confirmé M. Y... ;

QU'il n'est pas contesté par l'employeur que M. X... se rendait chaque matin au siège de l'entreprise à 7h15, mais qu'il soutient qu'il ne s'agissait nullement d'une obligation et que le salarié pouvait se rendre, s'il le souhaitait, directement sur le chantier ; que les salariés entendus par le Conseil ont indiqué :

- Mme Z..., secrétaire, déléguée du personnel : « je commence mon travail à 8h15. Il faut que les salariés soient sur le chantier à 7h45. Les salariés vont rejoindre leur chef d'équipe quand ils arrivent le matin. Je ne vois pas les choses de faire puisque je ne suis pas là au moment où cela se passe mais je le sais car je suis secrétaire depuis 33 ans..Les salariés sont payés à partir de 8h moins le quart. Les salariés n..ont pas l'obligation de se rendre au dépôt. C'est seulement pour arranger les salariés » ;

- M. A..., conducteur d'engin, délégué du personnel titulaire : « le démarrage du chantier : 7h45. Je pars de chez moi avec mon véhicule. Je suis à l'entrepôt aux environs de 7h20. Au dépôt, je pars avec mon équipe et le véhicule de l'entreprise. Mon chef d'équipe est là quand j'arrive. En principe tout le monde passe par l'entreprise. Mais ce n'est pas obligatoire. Aucun salarié ne va directement au chantier, c'était pour arranger les salariés..on en prenait certains sur la route.. Les chauffeurs ont l'obligation d'aller au dépôt. Il arrive que les camions soient chargés le matin. Les équipes sont constituées le matin, quand j'arrive le matin je sais déjà ce que sera l'équipe ».

QU'il est produit aussi une attestation de M. Y... qui indique « si on embauche à 7h15 environ, c'est pas une obligation mais un choix pour faire les équipes le matin, parce que presque tous les employés, groupés par quartier, sont amenés avec des véhicules de l'entreprise, mais ils peuvent aller sur le chantier avec leurs véhicules personnels » ;

QUE M. X... pour sa part produit plusieurs attestations de salariés qui indiquent qu'ils embauchent à 7h15 ; que l'accord collectif prévoit aussi que l'arrivée à 7h15 n'est qu'une faculté pour les salariés ; que s'il apparaît qu'un système de ramassage par les camions de l'entreprise permettait aux salariés de se rendre au siège de l'entreprise et que ce temps de ramassage ne peut être considéré comme du temps et n'a pas à être rémunéré, l'heure à laquelle les salariés arrivaient au siège pose, elle, problème dans la mesure où ce n'est pas l'heure que l'employeur considère comme l'heure d'embauche, puisqu'il retient comme telle, 7h45, heure de départ vers les chantiers ; qu'il apparaît, au vu des témoignages recueillis, qu'en réalité c'est entre 7h15 et 7h45 que se constituaient, au siège de l'entreprise, les équipes et qu'étaient chargés les camions ; que donc, les salariés, à compter de 7h15, n'étaient plus libres de leur activité et à la disposition de l'employeur ; qu'il n'a jamais non plus été démontré par ce dernier qu'il leur ait donné le moyen de se rendre directement sur les chantiers à 7h45 notamment en leur indiquant à l'avance l'organisation des journées de travail »,

1°. ALORS QUE constitue un temps de travail effectif le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en l'espèce, il était constant que l'accord collectif d'entreprise mis en place dans le cadre de l'application de la loi Aubry II offrait aux salariés la possibilité de passer, avant de se rendre sur les chantiers, au siège de l'entreprise pour y bénéficier du transport par un véhicule de la société ; que l'employeur soutenait que la composition des équipes de salariés ainsi transportés se faisait librement, suivant les désirs et affinités respectifs des intéressés et que ces regroupements n'avaient pas le moindre lien avec la constitution des équipes de travail ou encore avec les lieux de situation des chantiers (cf. conclusions d'appel de l'employeur, page 11) ; qu'en affirmant que c'était pendant ce temps de présence des salariés au siège de l'entreprise que se constituaient les équipes de travail et qu'étaient chargés les camions pour en conclure que les salariés étaient dès lors, pendant ce temps, à la disposition de l'employeur et ne pouvaient vaquer librement à leurs occupations personnelles, sans à aucun moment constater que pendant le laps de temps litigieux, les salariés étaient obligés de répondre aux directives données par l'employeur aux fins, notamment, de constituer les équipes de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 140-1 et L. 212-4 du Code du travail ;

2°. ALORS QU'en l'état de l'accord collectif d'entreprise reconnaissant aux salariés la possibilité de passer, avant de se rendre sur les chantiers, au siège de l'entreprise pour y bénéficier du transport par un véhicule de la société, il appartient au salarié de supporter la charge de la preuve de ce que les salariés se trouvaient, en pratique, obligés de procéder à ce passage préalable au siège de l'entreprise faute d'avoir été avisés par avance de l'organisation de leur journée de travail ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir démontré qu'il donnait aux salariés le moyen de se rendre directement sur les chantiers à 7h45, notamment en leur indiquant à l'avance l'organisation des journées de travail, quand l'accord collectif d'entreprise applicable précisait que ce passage par le siège n'était qu'une simple faculté abandonnée à la volonté discrétionnaire des salariés, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ensemble les articles L. 140-1 et L. 212-4 du Code du travail ;

3°. ALORS en tout état de cause QUE l'employeur faisait valoir (cf. conclusions d'appel, page 10) sans être contesté et offrait d'établir en preuve, par la production de diverses attestations, que le salarié avait l'habitude de quitter le chantier avant l'horaire normal de fin de journée de travail ; qu'en condamnant l'employeur à payer au salarié une certaine somme au titre de son temps de présence au siège de l'entreprise entre 7h15 et 7h45, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la somme prétendument due à ce titre ne pouvait pas être, au moins en partie, compensée avec celle due par le salarié lui-même au titre des heures de travail qu'il s'était dispensé d'effectuer, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 140-1, L. 144-1 et L. 212-4 du Code du travail.

Moyen produit au pourvoi incident n° N 07 42.796 par Me Hemery, avocat aux Conseils pour M. Salah X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement et au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS QUE « M. X... soutient que les différents manquements de son employeur justifient que la rupture du contrat de travail soit imputée aux torts de ce dernier et produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que l'intimée réplique que comme le montrent la démission puis la réintégration dans l'entreprise de M.
X...
en 2004, il n'existait aucune difficulté entre les parties ; que la lettre du 14 avril est une démission pure et simple et manifeste une volonté claire et non équivoque du salarié, qui en outre n'avait été précédée d'aucune réclamation puisque les erreurs, dont se prévaut aujourd'hui M. X..., n'ont été commises qu'à l'occasion de l'établissement de son solde, que donc le jugement qui l'a débouté de ses demandes au titre de la rupture devra être confirmé ; que la lettre de démission de M. X... est claire et non équivoque, qu'il n'y apparaît aucune restriction liée à l'attitude de l'employeur, ni aucune contestation des conditions de travail ; que ce n'est que postérieurement à cette démission que le salarié a établi une liste des griefs qu'il entendait soutenir à l'encontre de son employeur, que dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes au titre de la rupture ; »

ALORS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en énonçant que la lettre de démission de M. X... était claire et non équivoque, sans aucune réserve liée à l'attitude de l'employeur ou aux conditions de travail et que ce n'est que postérieurement à cette démission que le salarié a établi une liste de griefs, quand il résultait des constatations de l'arrêt que dès le 21 avril 2005, soit 8 jours seulement après l'envoi de sa lettre de démission du 13 avril 2005, M. X... reprochait à son employeur des retenues sur le salaire du mois de mars et le non paiement d'heures supplémentaires en lui imputant la responsabilité de la rupture, qu'il avait saisi le Conseil de Prud'hommes dès le 19 mai suivant et que ses demandes en paiement de rappel de salaire ont été reconnues fondées, circonstances antérieures à la démission qui rendaient celle-ci équivoque et obligeait à l'analyser en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'Appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses constatations, a violé les articles L 122-4, L 122-13 et L 122-14-3 du Code du Travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-42796;08-41060
Date de la décision : 01/12/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 avril 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 déc. 2009, pourvoi n°07-42796;08-41060


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Hémery, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.42796
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