LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° J 07 44.771 à Q 07 44.776 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Attendu, selon les jugements attaqués (conseil de prud'hommes de Nanterre, 29 juin 2007), qu'en vue de promouvoir la mobilité au sein du groupe Snecma, les partenaires sociaux ont signé le 27 juin 2001 un texte intitulé "Dispositif transitoire relatif aux écarts de participation en cas de mobilité groupe" ayant pour objet l'attribution d'un complément de prime de participation aux résultats en cas de différentiel dans le versement de la participation aux salariés faisant l'objet de mutations tant individuelles que collectives au sein du groupe ; qu'en avril 2002, un apport partiel d'actif a eu pour conséquence le transfert de salariés du site de Snecma moteurs de Villaroche vers la société Hispano Suiza, autre société du groupe ; que ce transfert ayant généré, pour l'année 2003 certaines disparités de participation au sein de la société Hispano Suiza, et à la suite d'un mouvement de grève du personnel, un relevé de conclusions intitulé "Participation 2003" a été signé entre les partenaires sociaux, le 31 mars 2004, aux termes duquel "compte tenu des différences de participation résultant de l'application de la loi et de l'accord groupe de 2001 et, dans un souci de meilleure équité", était allouée aux salariés des sites de Colombes/Bezons et de Réau, une prime d'un montant de 800 euros qui "sera versée sur la paye d'avril pour le personnel présent en avril 2004 au prorata de son temps de présence en 2003" ; que M. X... et cinq autres salariés dont le contrat de travail avait pris fin avant avril 2004, estimant qu'ils devaient bénéficier de cette prime, ont saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la société Hispano Suiza fait grief aux jugements d'avoir accueilli ces demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le relevé de conclusions du 31 mars 2004, ayant valeur d'accord collectif d'entreprise, dispose que la prime serait versée sur la paye d'avril pour le personnel en activité présent en avril 2004, au prorata de son temps de présence en 2003 ; qu'ainsi, la présence du salarié dans l'entreprise en 2003, si elle était prise en compte au titre du calcul du montant de la prime, ne suffisait pas à elle seule à ouvrir droit à son versement, lequel était subordonné à la présence du salarié dans l'entreprise en avril 2004 ; qu'en considérant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé par fausse interprétation l'accord collectif d'entreprise du 31 mars 2004, ensemble l'article 1134 du code civil et l'article 132-4 du code du travail ;
2°/ que le conseil de prud'hommes qui, après avoir considéré à tort que le relevé de conclusions comportait une ambiguïté sur la question de savoir si le personnel qui n'était plus présent dans l'entreprise en avril 2004 pouvait percevoir la prime qu'il instaurait, a énoncé que, "par suite", elle ne démontrait pas avoir fait application de critères objectifs l'ayant autorisée à ne pas verser la prime litigieuse à une partie de son personnel, a violé par fausse application le principe "à travail égal, salaire égal" ;
Mais attendu qu'interprétant l'accord collectif au regard de l'intention commune des parties et à la lumière du principe "à travail égal, salaire égal", le conseil de prud'hommes a retenu que l'accord collectif conclu le 31 mars 2004 avait pour objet de compenser des disparités entre les montants servis au titre de la participation au sein de la société pour l'exercice 2003 ; qu'il en a justement déduit que M. X... et les cinq autres salariés, du fait de leur présence dans l'entreprise en 2003 avaient droit à la prime litigieuse, l'accord n'en ayant aucunement subordonné l'attribution à une condition de présence lors de son versement mais ayant seulement organisé les modalités de paiement "sur la paye d'avril pour le personnel en activité présent en avril 2004" ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Hispano Suiza aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hispano Suiza à payer aux défendeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Hispano Suiza
Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR dit que la société Hispano Suiza était redevable envers les salariés ayant bénéficié du versement de la participation au titre de l'exercice 2003 mais n'étant plus présents dans l'entreprise en avril 2004, du versement de la prime complémentaire négociée le 31.03.04 et d'AVOIR mis en conséquence à la charge de la société le paiement de la somme de 800 au profit de chaque salarié ;
AUX MOTIFS QUE le groupe Snecma devenu groupe Safran avait mis en place un système incitatif à la mobilité géographique ; que le relevé de conclusions signé le 31 mars 2004 avait valeur d'un accord collectif d'entreprise s'imposant aux parties ; qu'il résultait des termes de l'accord que la négociation ayant donné lieu à la signature de ce texte avait eu pour objectif de répondre à une « situation exceptionnelle liée au montant de la participation pour l'exercice 2003 » ; que l'employeur, eu égard à l'effort financier consenti, avait eu pour objectif de « reconnaître et d'encourager l'implication de chacun nécessaire à la réussite des importants challenges » qui devaient être relevés ; qu'ainsi l'intention des parties n'était pas strictement identique du moins en ce qui concernait ce dernier élément et cette ambiguïté s'était traduite dans le présent litige ; que dans le préambule, les conditions ayant conduit à la différence de participation des salariés aux résultats des entreprises pour lesquels ils avaient oeuvré avaient été exposés ainsi que le constat que l'accord de participation groupe de 2001 n'avait pu pallier les différences de traitement relevées ; que c'était donc déjà en application du principe « à travail égal, salaire égal » que le personnel avait obtenu de l'employeur la compensation du traitement inégalitaire, non contesté entre les parties, moyennant le versement d'une somme forfaitaire et globale de 800 devant être versé « sur la paye d'avril pour le personnel en activité présent en avril 2004 au prorata de son temps de présence en 2003 » ; que cependant, il avait été conclu entre les parties que « Compte tenu du caractère particulier de la situation et eu égard au fait que la forte remontée du plancher concerne la grande majorité du personnel, la Direction a accepté le versement d'une prime d'un montant unique de 800 euros bruts » ; qu'il ne ressortait pas des termes clairs et précis de ce paragraphe, que l'employeur avait entendu exclure du bénéfice de cet accord, certains des salariés ayant été touchés par la situation ayant conduit à la signature de l'accord ; qu'il ressortait des explications données à l'audience que les salariés ayant intégré les sites en cause postérieurement au 31 décembre 2003 ne pouvaient être concernés, s'agissant du versement de la participation au titre de l'exercice 2003 ; que le paragraphe suivant indiquant que la prime devait être versée « sur la paye d'avril pour le personnel présent en avril 2004 au prorata de son temps de présence en 2003 » pouvait dans ce contexte se comprendre comme visant les salariés en activité dans l'entreprise Hispano Suiza en avril 2004, pour lesquels le versement de cette prime devait être mentionné sur le bulletin de paie d'avril 2004, le montant de la prime étant calculé au prorata du temps de présence ; que dès lors que n'avait pas été évoquée la situation du personnel, ayant été employé dans l'entreprise dans le courant de l'année 2003, mais ne faisant plus partie du personnel en avril 2004, et ne pouvant compter cette prime sur leur « paye » du mois d'avril qui ne pouvait leur être versée que par leur nouvel employeur, ou sous forme de pension dans le cas d'une cessation d'activité ; que par suite, la société Hispano Suiza ne démontrait pas avoir fait application de critères objectifs l'ayant autorisée à ne pas verser la prime litigieuse à une partie de son personnel, la situation d'une partie du personnel concerné par le versement de cette prime n'ayant pas été clairement prise en compte dans le texte de l'accord ; que l'ambiguïté du texte soumis à l'approbation des partenaires sociaux envers cette catégorie de personnel ne permettait pas de définir des conditions de présence et d'activité susceptibles d'être opposées par l'employeur aux salariés concernés ; qu'il convenait de dire que : 1° les parties avaient eu pour objectif de fixer les conditions de détermination d'une participation complémentaire au titre de l'exercice 2003 au sein de l'entreprise ; 2° les négociations concernaient l'ensemble du personnel de l'entreprise ayant bénéficié du versement de la participation au titre de l'exercice 2003 ainsi qu'il était précisé dans le préambule et avaient répondu à un souci d'équité de la part de l'employeur (dispositif) ; 3° le texte signé n'avait pas déterminé clairement les conditions de présence et d'activité pour l'attribution de cette prime mais avait mentionné les modalités de versement de la prime pour les salariés en activité présents en avril 2004 ; 4° qu'en conséquence, le texte n'avait pas mentionné les modalités de versement de la prime pour les salariés qui n'étaient pas présents dans l'entreprise en avril mais qui n'avaient pas été expressément exclus du champ d'application de l'accord, étant rappelé que la dénonciation de l'accord ne pouvait avoir d'effet rétroactif ; que par suite il y avait lieu de faire droit à la demande pécuniaire du salarié ;
1°) ALORS QUE le relevé de conclusions du 31 mars 2004, ayant valeur d'accord collectif d'entreprise, dispose que la prime serait versée sur la paye d'avril pour le personnel en activité présent en avril 2004, au prorata de son temps de présence en 2003 ; qu'ainsi, la présence du salarié dans l'entreprise en 2003, si elle était prise en compte au titre du calcul du montant de la prime, ne suffisait pas à elle seule à ouvrir droit à son versement, lequel était subordonné à la présence du salarié dans l'entreprise en avril 2004 ; qu'en considérant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé par fausse interprétation l'accord collectif d'entreprise du 31 mars 2004, ensemble l'article 1134 du Code civil et l'article 132-4 du Code du travail.
2°) ALORS QUE le conseil de prud'hommes qui, après avoir considéré à tort que le relevé de conclusions comportait une ambiguïté sur la question de savoir si le personnel qui n'était plus présent dans l'entreprise en avril 2004 pouvait percevoir la prime qu'il instaurait, a énoncé que, « par suite », la société Hispano Suiza ne démontrait pas avoir fait application de critères objectifs l'ayant autorisée à ne pas verser la prime litigieuse à une partie de son personnel, a violé par fausse application le principe « à travail égal, salaire égal ».