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23/09/2009 | FRANCE | N°08-43055

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2009, 08-43055


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 30 avril 2008), que Mme X..., engagée le 2 novembre 1995 par la société Antonelle en qualité de responsable de magasin, a été licenciée pour faute grave le 13 avril 2004 ;

Attendu que la société Antonelle fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de Mme X... est sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1° / que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que les juges du fond doivent ex

aminer tous les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'aux termes de la let...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 30 avril 2008), que Mme X..., engagée le 2 novembre 1995 par la société Antonelle en qualité de responsable de magasin, a été licenciée pour faute grave le 13 avril 2004 ;

Attendu que la société Antonelle fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de Mme X... est sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1° / que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que les juges du fond doivent examiner tous les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'aux termes de la lettre de licenciement du 13 avril 2004, l'employeur reprochait à la salariée, outre d'avoir méconnu la procédure interne de règlement des factures des retoucheuses, de ne pas avoir enregistré en caisse toutes les retouches réglées par les clientes aux mois de décembre 2003, janvier et février 2004 ; que la cour d'appel qui n'a pas examiné ce second grief, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-14-2, L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 (devenus L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9) du code du travail ;

2° / que les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce l'employeur avait qualifié les pratiques reprochées à la salariée de " frauduleuses " dans la mesure où, comme il l'expliquait dans ses écritures reprises à l'audience, ces pratiques permettaient à Mme X..., " d'en tirer profit " et de " récupérer des fonds supplémentaires à chaque fin de mois en prenant une partie du montant des retouches qui étaient réglées directement par les clientes en espèces ou en chèques sans ordre ", " d'encaisser elle-même les espèces ou les chèques libellés sans ordre, correspondant à des retouches et après, de (lui) demander de payer l'intégralité des retouches confiées par les clientes à la retoucheuse " ou encore " d'encaisser pour son compte personnel l'argent de certaine retouches " ; qu'en affirmant que la société Antonelle ne soutenait pas que des sommes afférentes à des retouches versées par les clientes auraient été retenues indûment par la salariée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions susvisées et violé les articles 4 et 5 du code de procédure ;

3° / que les juges doivent examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour démontrer qu'avant l'incident du mois de mars 2004, Mme X... avait toujours respecté, y compris pendant les soldes, la procédure consistant à envoyer au siège les factures des retoucheuses qui étaient réglées par chèque par le siège, l'employeur produisait plusieurs factures de Mme Y..., correspondant à des retouches effectuées en périodes de soldes (janvier-février et juin-juillet), adressées par Mme X... au siège de la société et réglées par chèque par le service comptable de celle-ci (factures des mois de janvier février 2002, juin 2002, juin 2003) ; qu'en affirmant que l'employeur n'établissait pas que, pendant les périodes de soldes, les retouches étaient centralisées et payées directement par le siège aux retoucheuses, sans examiner ces factures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4° / que les juges doivent examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'afin d'établir que les retouches avaient toujours été directement réglées par le siège, y compris en période de soldes, et qu'il n'y avait jamais eu aucune tolérance de l'employeur pour une pratique différente, (elle) produisait une attestation de Mme Z..., comptable de la société ; qu'elle attestait avoir indiqué à Mme Y... que la procédure de règlement des retouches n'avait pas été modifiée et que toutes les factures continuaient d'être réglées par le siège en chèque ; qu'en jugeant que l'employeur n'établissait pas la preuve que la pratique de la salariée n'était pas connue de lui, sans examiner cette attestation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5° / que le doute au bénéfice du salarié doit avoir un caractère irréductible ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a accordé à Mme X... le bénéfice du doute sur la réalité des griefs invoqués à son encontre par l'employeur ; qu'elle a néanmoins considéré que " la SA Antonelle avait parfaitement la possibilité de démontrer que la pratique suivie par Mme Dalila X... n'était pas connue d'elle en démontrant que durant les périodes des soldes postérieures à mars 2002 les retouches étaient centralisées et payées par ses services directement aux retoucheuses et que le comportement de la salariée durant les soldes d'hiver 2003-2004 contrevenait donc à ses instructions respectées jusqu'à la période litigieuse ", ce qui " aurait apporté une preuve indiscutable " ; qu'ayant ainsi estimé qu'il existait une possibilité de lever le doute sur la réalité des faits reprochés à la salariée, la cour d'appel aurait dû enjoindre à l'employeur de produire les documents permettant de lever ce doute, quitte à tirer les conséquences d'un défaut de production ; qu'en se prononçant au bénéfice du doute, sans avoir cherché à lever le doute, le cas échéant en ordonnant toute mesure d'instruction utile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 (devenus L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9) du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve soumis à son examen sans être tenue de recourir à une mesure d'instruction, ni de s'expliquer sur les pièces qu'elle a choisi d'écarter, après avoir relevé d'une part qu'il n'était pas établi que Mme X... avait eu connaissance de la note instaurant une procédure au sein de l'entreprise pour le paiement des retouches pendant la période des soldes, et d'autre part que l'employeur ne rapportait pas la preuve que la pratique suivie par la salariée n'était pas connue de lui, a pu décider, usant des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que son licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Antonelle aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Antonelle.

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de madame X... pour faute grave ne repose en réalité sur aucune faute réelle et sérieuse et, en conséquence, d'AVOIR condamné la SA ANTONELLE à verser à madame X... les sommes de 2. 397, 58 euros au titre du salaire relatif à la mise à pied, 4. 640, 57 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1. 997, 22 euros au titre de l'indemnité de licenciement, 27. 600 euros au titre du licenciement intervenu irrégulièrement, ainsi qu'à la somme de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

AUX MOTIFS QUE en l'espèce, le 13 avril 2004, madame Dalila X... a été destinataire d'une lettre de licenciement pour faute grave portant les motifs suivants : « le 11 mars 2004, la retoucheuse Fabienne Y... nous a contacté pour nous faire part de son étonnement quant à la nouvelle procédure de paiement de ses retouches ; quand elle s'est présentée, comme chaque fin de mois, à la boutique dont vous avez la responsabilité afin de vous remettre sa facture du mois de février 2004, vous lui avez rendu sa facture accompagnée de 50 euros en espèces et de 8 chèques de clientes de la boutique dont l'ordre était laissé en blanc et vous lui avez demandé de refaire une facture pour la différence ; ce faisant vous avez enfreint la procédure qui devait être suivie et que vous connaissez parfaitement qui consiste à transmettre les factures reçues du retoucheur au siège de l'entreprise qui règle ensuite celui-ci et vous avez gardé des chèques sans ordre dans votre caisse ; ces retouches ne sont pas les seules que vous n'avez pas enregistrées, des écarts importants ayant été constatés pour les mois de décembre 2003 et février 2004 entre les retouches facturées à la société et réglées par elle et celles enregistrées ;- le montant des retouches réglées par la société n'a pas été retrouvé en caisse ;- n'ayant reçu de votre part aucune explication, ces pratiques frauduleuses justifient un licenciement pour faute grave » ; que la lettre de licenciement fixe les limites du litige, ce qui interdit à l'employeur d'invoquer de nouveaux griefs, et ce qui interdit au juge d'examiner d'autres griefs non évoqués dans la lettre ; que la faute disciplinaire est constituée par la violation des règles de discipline de l'entreprise ; que le licenciement peut être la sanction ultime des agissements fautifs du salarié ; que la non exécution d'une de ses obligations par le salarié est constitutive d'une faute légère, sérieuse (ou simple) grave ou lourde, selon la nature du manquement et les circonstances ; qu'il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir de la faute grave de l'autre partie d'en apporter seul la preuve alors qu'il n'a, par ailleurs, pas la charge exclusive de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement ; que la loi du 13 juillet 1973 (L. n° 73-680, 13 juillet 1973, JO 18 juill.) en effet a confié au juge le soin « d'apprécier la régularité de la procédure » de licenciement et le « caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur » (C. trav. Art. L. 122-14-3). Ce contrôle s'applique à tous les licenciements, même à ceux qui ne relèvent pas des sanctions spécifiques de l'article L. 122-14-4 du code du travail ; que la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du motif n'incombe pas spécialement à l'une ou à l'autre des parties ; que selon l'article L. 122-14-3 du code du travail en effet, le juge forme sa conviction « au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il juge utile » ; que la loi du 2 août 1989 a introduit dans l'article L. 122-14-3 une disposition calquée sur celle de l'article L. 122-43 du code du travail en matière disciplinaire aux termes de laquelle le doute profite au salarié ; qu'il n'y a pas pour autant renversement de la charge de la preuve au détriment de l'employeur ; que c'est seulement dans le cas où le juge est dans l'impossibilité au terme d'une instruction contradictoire, de former avec certitude sa conviction sur l'existence d'une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement qu'il sera conduit à faire application du principe selon lequel le doute profite au salarié ; que le doute sur la réalité des faits invoqués devant profiter au salarié, il appartient à l'employeur de fournir au juge des éléments permettant à celui-ci de constater la réalité et le sérieux du grief ; que dans l'espèce, la SA ANTONELLE expose que Mme Dalila X... n'a pas respecté la procédure prescrite pour le paiement des retouches, procédure que, d'après elle, madame Dalila X... connaissait parfaitement puisqu'il s'agit de celle suivie depuis toujours, puisque celle-ci avait été rappelée dans une note interne adressée le 20 mars 2002 à l'ensemble des responsables de boutiques ; qu'en liminaire, il convient d'observer que la SA ANTONELLE ne soutient nullement, alors que le terme « frauduleux » mentionné dans la lettre de licenciement implique des agissements préjudiciables à son égard, qu'il y a eu des sommes afférentes à des retouches versées par les clientes qui ont été retenues indûment par madame Dalila X... ; que la SA ANTONELLE en effet n'entreprend nullement de démontrer en quoi le comportement de madame Dalila X... a été étymologiquement frauduleux : « acte entaché de fraude, acte de mauvaise foi accompli en contrevenant à la loi au aux règlements et nuisant aux droits d'autrui » ; qu'en réalité faute de soutenir et de tenter de démontrer que madame Dalila X... a nui à ses droits, la SA ANTONELLE soutient que celle-ci a méconnu ses instructions en organisant le paiement direct des retouches par les clientes au moment des soldes et en ne respectant pas la note précitée du 20 mars 2002 qui impose que la totalité des retouches, même en période de soldes, fasse l'objet s'une facturation, soit centralisée et payée à la retoucheuse par le service comptable de la société ; que madame Dalila X..., quant à elle, soutient que la note du 20 mars 2002 ne lui a pas été adressée et qu'elle a adopté une pratique ancienne, connue et acceptée de la SA ANTONELLE durant les soldes, ceci afin de rendre service aux clientes, dès lors que, durant cette période particulière, les soldes ne sont pas comprises dans le prix de vente ; que la Cour constate tout d'abord que la réalité des paiements directs des retoucheuse au moyen d ‘ espèces ou de chèques, dont l'ordre était laissé en blanc, remis par les clientes à madame Dalila X... est établi et non contesté ; que le litige repose alors sur le point de savoir si la note du 20 mars 2002 a bien existé, si madame Dalila X... a eu connaissance de cette note, quel était le contenu exact de cette note, si le comportement reproché à madame Dalila X... était connu de la SA ANTONELLE et toléré ; qu'il conviendra ensuite de qualifier les faits à les supposer établis ; que sur la connaissance par la SA ANTONELLE des pratiques anciennes de madame Dalila X... au moment des soldes, la Cour observe que la présente procédure contient de la part du témoin principal qu'est la couturière (madame Y...) un florilège de déclarations suivies de contre déclarations, d'auditions suivies de démentis, parachevé par l'affirmation finale selon laquelle elle a formulé ses premières déclarations sous la contrainte morale de la SA ANTONELLE, sous la dictée, par peur de perdre le marché des retouches, crainte au demeurant avérée ; que la Cour ne peut, en présence, de contradictions importantes et qui créent le doute sur la véracité des faits reprochés, procéder comme l'a fait le Conseil de prud'hommes qui a décidé que madame Y... mentait à tel moment et disait la vérité à tel autre ; que la Cour considère qu'un doute existe sur la totalité des faits rapportés par madame Y... ; que madame Saïda B..., ancienne salariée de la SA ANTONELLE, atteste que la procédure suivie par madame Dalila X... au moment des soldes était connue par la SA ANTONELLE ; que cette position est confortée par celle de Mme Suzanne C..., autre ancienne salariée ; que la SA ANTONELLE ne peut utilement soutenir qu'il convient d'écarter, par principe, ces attestations dès lors qu'elle est en litige prud'homal avec ces personnes ; qu'en effet, le livre des entrées et sorties de la SA ANTONELLE démontre qu'à l'exception d'une seule salariée, aucune des personnes ayant fait partie du personnel de la SA ANTONELLE n'en fait partie encore aujourd'hui ; qu'aussi, sauf à priver madame Dalila X... de la possibilité de se défendre en justice, les attestations en question doivent être prises en considération, quitte à les apprécier au vu des arguments critiques développés par la SA ANTONELLE ; que ces attestations, en réalité et après examen, génèrent un doute sur le fait que la pratique de madame Dalila X... était occulte, n'était pas connue de la SA ANTONELLE ; que d'autre part, la SA ANTONELLE n'établit nullement le mode de transmission de la note du 20 mars 2002 et ne justifie pas de ce que cette note a été transmise à madame Dalila X... ; que les documents émanant d'autres responsables de boutique ne démontrent pas de manière indubitable que cette note a bien été transmise à madame Dalila X... ; qu'au surplus la généralité des termes de cette note ne permet pas d'en conclure, sans aucune marge d'erreur, que la pratique ponctuelle des paiements directs au moment des soldes était prohibée ou était tolérée ; qu'en réalité en présence de ces éléments de fait générateurs de doute, la SA ANTONELLE avait parfaitement la possibilité de démontrer que la pratique suivie par madame Dalila X... n'était pas connue d'elle en démontrant que durant les périodes des soldes postérieures à mars 2002 (été 2002, hiver 2002-2003, été 2003) les retouches étaient centralisées et payées par ses services directement aux retoucheuses et que le comportement de madame Dalila X... durant les soldes d'hiver 2003-2004 contrevenait donc à ses instructions respectées jusqu'à la période litigieuse ; Or, la SA ANTONELLE n'apporte sur ce point aucun élément de preuve, alors même que cela n'aurait représenté pour elle aucune difficulté et aurait apporté une preuve indiscutable, insusceptible du débat récurrent dans ce dossier sur l'existence de pressions sur les témoins et sur la bonne foi des uns et des autres ; qu'à cet égard, dès lors que durant les soldes les articles ayant donné lieu à paiement direct ont constitué la majorité des ventes, la diminution, voire l'absence de retouches payantes ne pouvait qu'attirer l'attention de la SA ANTONELLE ; que par ailleurs, sur l'ensemble de la période des soldes postérieures à la note de service, il n'existe aucun contentieux sur les sommes totales qui ont été versées en définitive aux retoucheuses ; ce qui implique que le système de paiement a fonctionné normalement au vu et au su de tous et n'a donné lieu à aucune observations de la part de tous ses acteurs : responsable de magasin, retoucheuses, direction ; que l'absence de tout élément objectif et incontestable de preuve crée un doute supplémentaire ; que faute d'avoir fourni les preuves qu'elle pouvait apporter, en présence d'un doute sur la réalité et la portée des instructions donnée à madame Dalila X..., sur la connaissance qu'avait la SA ANTONELLE des pratiques de madame Dalila X..., au regard de l'absence de preuve d'une quelconque fraude, notre Cour estime que le licenciement ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse ; que madame Dalila X... est donc fondée à solliciter le versement du salaire non versé du fait de sa mise à pied, de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement, des dommages et intérêts au titre du licenciement irrégulier ; que les sommes sollicitées à titre de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité légale de licenciement sont dues incontestablement ; que le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse est sanctionné différemment selon qu'il intervient dans une entreprise occupant plus ou moins de 11 salariés ou affecte un salarié ayant plus ou moins deux ans d'ancienneté ; que l'article L. 122-14-4 du code du travail prévoit des sanctions spécifiques dans l'hypothèse d'un licenciement survenant dans une entreprise de 11 salariés et plus et concernant un salarié ayant au moins deux ans d'ancienneté et ce dans ces termes : « si ce licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le tribunal peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; en cas de refus par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie au salarié une indemnité. Cette indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité prévue à l'article L. 122-9 ; L'indemnité de six mois étant une indemnité minimale, c'est au juge qu'il appartient de fixer le montant de l'indemnité effective. Ces dommages et intérêts seront, au dessus du plancher de six mois, évalués conformément aux règles du droit commun en fonction du préjudice subi. Ce préjudice doit être apprécié souverainement par le juge au jour de la décision, ce qui autorise, notamment, le juge à tenir compte en particulier des difficultés rencontrées par le salarié pour retrouver un emploi » ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le licenciement concerne une personne, âgée de 53 ans qui avait 8 années d'ancienneté et qui exerçait son activité dans le secteur de l'habillement dans lequel il est difficile de retrouver du travail passé un certain âge ; par ailleurs, l'ambiguïté des termes mêmes de la lettre de licenciement qui introduit de manière inappropriée le terme « frauduleux » avec sa surcharge de transgression grave, a été de nature à créer un préjudice supplémentaire ; qu'eu égard à ces éléments la Cour estime devoir réparer le préjudice subi par madame Dalila X... par l'allocation de la somme de 27. 600 euros ;

1. – ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que les juges du fond doivent examiner tous les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'aux termes de la lettre de licenciement du 13 avril 2004, l'employeur reprochait à la salariée, outre d'avoir méconnu la procédure interne de règlement des factures des retoucheuses, de ne pas avoir enregistré en caisse toutes les retouches réglées par les clientes aux mois de décembre 2003, janvier et février 2004 ; que la Cour d'appel qui n'a pas examiné ce second grief, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-14-2, L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 (devenus L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9) du Code du travail ;

2. – ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce l'employeur avait qualifié les pratiques reprochées à la salariée de « frauduleuses » (conclusions p. 13 § 5) dans la mesure où, comme il l'expliquait dans ses écritures reprises à l'audience (cf. arrêt p. 2 in fine et p. 3 § 1), ces pratiques permettaient à madame X..., « d'en tirer profit » (voir conclusions p. 9) et de « récupérer des fonds supplémentaires à chaque fin de mois en prenant une partie du montant des retouches qui étaient réglées directement par les clientes en espèces ou en chèques sans ordre » (conclusions p. 11), « d'encaisser elle-même les espèces ou les chèques libellés sans ordre, correspondant à des retouches et après, de demander à la société ANTONELLE de payer l'intégralité des retouches confiées par les clientes à la retoucheuse » (conclusions p. 13) ou encore « d'encaisser pour son compte personnel l'argent de certaine retouches » (conclusions p. 12) ; qu'en affirmant que la SA ANTONELLE ne soutenait pas que des sommes afférentes à des retouches versées par les clientes auraient été retenues indûment par la salariée, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions susvisées et violé les articles 4 et 5 du nouveau code de procédure ;

3. – ALORS QUE les juges doivent examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour démontrer qu'avant l'incident du mois de mars 2004, madame X... avait toujours respecté, y compris pendant les soldes, la procédure consistant à envoyer au siège les factures des retoucheuses qui étaient réglées par chèque par le siège, l'employeur produisait plusieurs factures de madame Y..., correspondant à des retouches effectuées en périodes de soldes (janvier-février et juin-juillet), adressées par madame X... au siège de la société et réglées par chèque par le service comptable de celle-ci (factures des mois de janvier février 2002, juin 2002, juin 2003) ; qu'en affirmant que l'employeur n'établissait pas que, pendant les périodes de soldes, les retouches étaient centralisées et payées directement par le siège aux retoucheuses, sans examiner ces factures, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

4. – ALORS QUE les juges doivent examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'afin d'établir que les retouches avaient toujours été directement réglées par le siège, y compris en période de soldes, et qu'il n'y avait jamais eu aucune tolérance de l'employeur pour une pratique différente, la société ANTONELLE produisait une attestation de madame Z..., comptable de la société ; qu'elle attestait avoir indiqué à madame Y... que la procédure de règlement des retouches n'avait pas été modifiée et que toutes les factures continuaient d'être réglées par le siège en chèque ; qu'en jugeant que l'employeur n'établissait pas la preuve que la pratique de la salariée n'était pas connue de lui, sans examiner cette attestation, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

5. – ALORS en tout état de cause QUE le doute au bénéfice du salarié doit avoir un caractère irréductible ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a accordé à madame X... le bénéfice du doute sur la réalité des griefs invoqués à son encontre par l'employeur ; qu'elle a néanmoins considéré que « la SA ANTONELLE avait parfaitement la possibilité de démontrer que la pratique suivie par Madame Dalila X... n'était pas connue d'elle en démontrant que durant les périodes des soldes postérieures à mars 2002 les retouches étaient centralisées et payées par ses services directement aux retoucheuses et que le comportement de la salariée durant les soldes d'hiver 2003-2004 contrevenait donc à ses instructions respectées jusqu'à la période litigieuse », ce qui « aurait apporté une preuve indiscutable » ; qu'ayant ainsi estimé qu'il existait une possibilité de lever le doute sur la réalité des faits reprochés à la salariée, la Cour d'appel aurait dû enjoindre à l'employeur de produire les documents permettant de lever ce doute, quitte à tirer les conséquences d'un défaut de production ; qu'en se prononçant au bénéfice du doute, sans avoir cherché à lever le doute, le cas échéant en ordonnant toute mesure d'instruction utile, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 (devenus L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9) du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43055
Date de la décision : 23/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 30 avril 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2009, pourvoi n°08-43055


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.43055
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