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23/09/2009 | FRANCE | N°08-41528

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2009, 08-41528


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 29 janvier 2008), que M. X..., employé depuis le 15 octobre 1991 par la société France réducteurs en dernier lieu en qualité de responsable de production, et M. Y..., responsable de maintenance depuis le 10 septembre 2001 dans la société, ont été licenciés le 9 décembre 2004 pour faute grave pour avoir principalement commandé en avril 2003 un télécopieur à l'insu de leur employeur en faisant établir un bon de livraison et u

ne facture pour une armoire câblée ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 29 janvier 2008), que M. X..., employé depuis le 15 octobre 1991 par la société France réducteurs en dernier lieu en qualité de responsable de production, et M. Y..., responsable de maintenance depuis le 10 septembre 2001 dans la société, ont été licenciés le 9 décembre 2004 pour faute grave pour avoir principalement commandé en avril 2003 un télécopieur à l'insu de leur employeur en faisant établir un bon de livraison et une facture pour une armoire câblée ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit les licenciements sans cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné à payer des indemnités à ce titre, alors, selon les moyens communs :

1°/ que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du contrat pendant la durée du préavis ; que constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la période limitée du préavis, le fait, pour un salarié, d'acquérir du matériel à l'insu de son employeur en maquillant son achat par l'établissement d'une fausse facture, fût-ce dans l'intérêt de l'entreprise ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9 et L. 122-40 du code du travail ;

2°/ que l'employeur est seul juge de ses choix économiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que "la commande a été effectuée non pour satisfaire des besoins personnels des appelants, mais uniquement dans l'intérêt du service maintenance, dont l'activité et la situation dans les locaux de l'entreprise justifie l'utilité d'un tel équipement", la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3 et L. 122-40 du code du travail ;

3°/ qu'en toute hypothèse, constitue une faute, susceptible de justifier un licenciement disciplinaire, le manquement par le salarié aux obligations nées du contrat de travail ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que les salariés avaient recouru "à un stratagème" pour acquérir un fax en faisant établir un bon de livraison et une facture relatifs à une armoire câblée, ce dont il résultait qu'ils avaient fait preuve de déloyauté vis-à-vis de leur employeur, et avait ainsi commis une faute justifiant leur licenciement disciplinaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé les dispositions des articles L. 122-14-3, L. 122-14-4 et L. 122-40 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la dissimulation de l'achat du télécopieur par les salariés à la seule direction financière ne relevait pas d'une intention de détournement mais d'un simple stratagème pour effectuer une acquisition utile pour l'entreprise, a pu, faisant usage des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, en l'absence de caractère frauduleux et somptuaire de la dépense, considérer que la faute ne présentait pas un caractère de gravité suffisant pour justifier les licenciements ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société France réducteurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société France réducteurs à payer à M. X... et à M. Y... la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat de la société France réducteurs

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR dit les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse et condamné la société FRANCE REDUCTEURS à payer à M. X... la somme de 1.146,77 à titre de rappel de salaires, les congés payés correspondants à hauteur de 114,67 , une indemnité de préavis à hauteur de 11.709,75 , les congés payés y afférents de 1.170,97 , une indemnité de licenciement de 11.908,81 et des dommages-intérêts pour rupture abusive à hauteur de 70.000

AUX MOTIFS QU'aux termes des lettres de rupture du 9 décembre 2004, il est reproché à Messieurs X... et Y... d'avoir, au mois d'avril 2003, commandé à l'insu de l'employeur un fax en faisant établir avec la complicité du fournisseur un bon de livraison et une facture concernant une armoire câblée, la commande ayant été passée par Monsieur Y... avec l'accord de Monsieur X... ; qu'il était reproché en outre à ce dernier d'avoir passé au mois d'octobre 2004, sans autorisation de la direction, une commande modificative de 3.400 dans le cadre de l'aménagement d'un local bureau atelier ; qu'à juste titre, le Juge Départiteur a dit que les faits n'étaient pas prescrits, la société FRANCE REDUCTEURS justifiant par les courriers qu'elle produit n'avoir eu connaissance des modalités de la commande du fax qu'à l'occasion d'un inventaire de certains matériels effectué à la demande de son assureur et plus précisément par un courrier du 30 Novembre 2004 dans lequel le fournisseur reconstituait le stratagème utilisé avec la complaisance de son commercial ; que par ailleurs, s'il est effectivement établi par diverses attestations précises et concordantes que l'employeur a fait connaître sa décision de licencier Messieurs X... et Y... plusieurs jours avant la notification des lettres de rupture, cela ne saurait constituer qu'une irrégularité de la procédure ; qu'en revanche, il n'est pas contestable que la commande a été effectuée non pour satisfaire des besoins personnels des appelants mais uniquement dans l'intérêt du service Maintenance, dont l'activité et la situation dans les locaux de l'entreprise justifient l'utilité d'un tel équipement ; que par ailleurs, si en raison de l'importance de l'entreprise il ne peut être déduit de ce que certains bons de commande portant le numéro de ce fax ont été contresignés par des membres de la direction que celle-ci en connaissait précisément l'existence, il n' en reste pas moins que le fax n'a jamais été dissimulé et qu'il était utilisé par les membres d'autres services ; que dans ces conditions, l'explication donnée par les appelants, qui affirment avoir recouru à un stratagème parce que, bien qu'ayant obtenu l'accord du dirigeant, ils se voyaient opposer systématiquement un refus par son épouse, directrice financière de la Société, est non seulement plausible mais encore confirmée par les attestations de plusieurs salariés ; qu'au vu de ces éléments, la faute commise par Messieurs X... et Y... dont le travail ni le comportement n'avaient jamais fait l'objet de la moindre observation, ne justifiaient pas leur licenciement ; que quant a la commande non autorisée reprochée a Monsieur X..., son caractère irrégulier n'est pas établi, et de plus elle était indispensable dès lors qu'une partie de l'équipement initialement prévu avait été attribué au Comité d'Entreprise et qu'il convenait donc de le remplacer ; qu'il y a lieu, en définitive, d'infirmer totalement le jugement du 23 Janvier. 2006 et partiellement celui du 13 Février, les licenciements de Messieurs X... et Y... étant dépourvus de cause réelle et sérieuse ;

1°) ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait, ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du contrat pendant la durée du préavis ; que constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la période limitée du préavis, le fait, pour un salarié, d'acquérir du matériel à l'insu de son employeur en maquillant son achat par l'établissement d'une fausse facture, fût-ce dans l'intérêt de l'entreprise ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L.122-6, L.122-8, L.122-9 et L.122-40 du Code du travail.

2°) ALORS QUE l'employeur est seul juge de ses choix économiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « la commande a été effectuée non pour satisfaire des besoins personnels des appelants, mais uniquement dans l'intérêt du service maintenance, dont l'activité et la situation dans les locaux de l'entreprise justifie l'utilité d'un tel équipement », la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L.122-6, L.122-8, L.122-9, L.122-14-3 et L.122-40 du Code du travail ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, constitue une faute, susceptible de justifier un licenciement disciplinaire, le manquement par le salarié aux obligations nées du contrat de travail ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que le salarié avait recouru « à un stratagème » pour acquérir un fax en faisant établir un bon de livraison et une facture relatifs à une armoire câblée, ce dont il résultait qu'il avait fait preuve de déloyauté vis-à-vis de son employeur, et avait ainsi commis une faute justifiant son licenciement disciplinaire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé les dispositions des articles L.122-14-3, L.122-14-4 et L.122-40 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, partiellement confirmatif,

D'AVOIR dit les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse, condamné la société FRANCE REDUCTEURS à payer à M. Y... 30.000 à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.206,88 au titre de l'annulation de la mise à pied, 120,68 au titre des congés payés y afférents, 4.375,20 à titre d'indemnité compensatrice de préavis 437,52 au titre des congés payés y afférents et 755,89 à titre d'indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU'aux termes des lettres de rupture du 9 décembre 2004, il est reproché à Messieurs X... et Y... d'avoir, au mois d'avril 2003, commandé à l'insu de l'employeur un fax en faisant établir avec la complicité du fournisseur un bon de livraison et une facture concernant une armoire câblée, la commande ayant été passée par Monsieur Y... avec l'accord de Monsieur X... ; qu'il était reproché en outre à ce dernier d'avoir passé au mois d'octobre 2004, sans autorisation de la direction, une commande modificative de 3.400 dans le cadre de l'aménagement d'un local bureau atelier ; qu'à juste titre, le Juge Départiteur a dit que les faits n'étaient pas prescrits, la société FRANCE REDUCTEURS justifiant par les courriers qu'elle produit n'avoir eu connaissance des modalités de la commande du fax qu'à l'occasion d'un inventaire de certains matériels effectué à la demande de son assureur et plus précisément par un courrier du 30 novembre 2004 dans lequel le fournisseur reconstituait le stratagème utilisé avec la complaisance de son commercial ; que par ailleurs, s'il est effectivement établi par diverses attestations précises et concordantes que l'employeur a fait connaître sa décision de licencier Messieurs X... et Y... plusieurs jours avant la notification des lettres de rupture, cela ne saurait constituer qu'une irrégularité de la procédure ; qu'en revanche, il n'est pas contestable que la commande a été effectuée non pour satisfaire des besoins personnels des appelants mais uniquement dans l'intérêt du service Maintenance, dont l'activité et la situation dans les locaux de l'entreprise justifient l'utilité d'un tel équipement ; que par ailleurs, si en raison de l'importance de l'entreprise il ne peut être déduit de ce que certains bons de commande portant le numéro de ce fax ont été contresignés par des membres de la direction que celle-ci en connaissait précisément l'existence, il n' en reste pas moins que le fax n'a jamais été dissimulé et qu'il était utilisé par les membres d'autres services ; que dans ces conditions, l'explication donnée par les appelants, qui affirment avoir recouru à un stratagème parce que, bien qu'ayant obtenu l'accord du dirigeant, ils se voyaient opposer systématiquement un refus par son épouse, directrice financière de la Société, est non seulement plausible mais encore confirmée par les attestations de plusieurs salariés ; qu'au vu de ces éléments, la faute commise par Messieurs X... et dont le travail ni le comportement n'avaient jamais fait l'objet de la moindre observation, ne justifiaient pas leur licenciement ; que, quant a la commande non autorisée reprochée a Monsieur X..., son caractère irrégulier n'est pas établi, et de plus elle était indispensable dès lors qu'une partie de l'équipement initialement prévu avait été attribué au Comité d'Entreprise et qu'il convenait donc de le remplacer ; qu'il y a lieu, en définitive, d'infirmer totalement le jugement du 23 Janvier. 2006 et partiellement celui du 13 Février, les licenciements de Messieurs X... et Y... étant dépourvus de cause réelle et sérieuse ;

1°) ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait, ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du contrat pendant la durée du préavis ; que constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la période limitée du préavis, le fait, pour un salarié, d'acquérir du matériel à l'insu de son employeur en maquillant son achat par l'établissement d'une fausse facture, fût-ce dans l'intérêt de l'entreprise, qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L.122-6, L.122-8, L.122-9 et L.122-40 du Code du travail.

2°) ALORS QUE l'employeur est seul juge de ses choix économiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « la commande a été effectuée non pour satisfaire des besoins personnels des appelants, mais uniquement dans l'intérêt du service maintenance, dont l'activité et la situation dans les locaux de l'entreprise justifie l'utilité d'un tel équipement », la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L.122-6, L.122-8, L.122-9, L.122-14-3 et L.122-40 du Code du travail ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, constitue une faute, susceptible de justifier un licenciement disciplinaire, le manquement par le salarié aux obligations nées du contrat de travail ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que le salarié avait recouru « à un stratagème » pour acquérir un fax en faisant établir un bon de livraison et une facture relatifs à une armoire câblée, ce dont il résultait qu'il avait fait preuve de déloyauté vis-à-vis de son employeur, et avait ainsi commis une faute justifiant son licenciement disciplinaire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé les dispositions des articles L.122-14-3, L.122-14-4 et L.122-40 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41528
Date de la décision : 23/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 29 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2009, pourvoi n°08-41528


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41528
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