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22/09/2009 | FRANCE | N°08-11962

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 septembre 2009, 08-11962


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par Mme X... que sur le pourvoi incident relevé par M. et Mme Y... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 25 janvier 2007), qu'en vue de l'acquisition d'un manège et d'un camion, Mme X... a contracté en 1996 deux prêts auprès de la banque monégasque Sécuritas, devenue la société Locaumat, garantis notamment par le cautionnement de sept personnes physiques, dont M. et Mme Y... ; que les engagements ainsi souscrits n'ayant plus été respectés à parti

r d'août 1997, le prêteur, après avoir prononcé la déchéance du terme en 200...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par Mme X... que sur le pourvoi incident relevé par M. et Mme Y... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 25 janvier 2007), qu'en vue de l'acquisition d'un manège et d'un camion, Mme X... a contracté en 1996 deux prêts auprès de la banque monégasque Sécuritas, devenue la société Locaumat, garantis notamment par le cautionnement de sept personnes physiques, dont M. et Mme Y... ; que les engagements ainsi souscrits n'ayant plus été respectés à partir d'août 1997, le prêteur, après avoir prononcé la déchéance du terme en 2003, a poursuivi en paiement des sommes dues Mme X... et ses cautions ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au prêteur la somme de 181 612, 24 euros avec intérêts au taux de 14, 50 % et la somme de 7 950, 24 euros avec intérêts au taux de 14, 50 %, alors, selon le moyen :

1° / que la banque est débitrice d'une obligation de conseil, de mise en garde et de vigilance, lorsqu'elle accorde un prêt à un emprunteur non averti, même s'il s'agit d'un professionnel ; qu'il ressort de l'arrêt que Mme X..., exploitant des manèges forains, a souscrit deux prêts accordés par la société Sécuritas, aux droits de laquelle se trouve la société Locaumat, sans pouvoir faire face à la charge du remboursement et qu'elle a reproché à la banque d'avoir manqué à ses devoirs de conseil, de mise en garde et de vigilance ; que pour rejeter ces demandes, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'en sa qualité de commerçante, Mme X... ne pouvait par principe se prévaloir « de la théorie de l'abus de concours financiers » sans avoir recherché, ainsi que cela lui était demandé, si Mme X... était un emprunteur profane, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2° / que le créancier doit exécuter le contrat de bonne foi sans laisser la charge de la dette s'accroître sans raison ; que Mme X... soutenait que la société Locaumat n'avait pas exécuté de bonne foi les deux contrats litigieux, dès lors, d'une part, qu'elle avait remboursé le capital prêté tout en demandant, dès les premières difficultés, le rééchelonnement de sa dette et que, d'autre part, la banque a attendu plus de quatre ans pour engager une action en recouvrement, ce qui a eu pour conséquence d'augmenter de manière inconsidérée le montant des intérêts restant à payer ; que faute de s'être expliquée sur ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard l'article 1134, alinéa 3, du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, dès lors que Mme X..., qui exerçait une activité de forain depuis plusieurs années et avait sollicité des prêts pour acquérir un manège et un camion destinés à son activité professionnelle, ne soutenait pas être un emprunteur non averti, ce dont il résulte que la banque n'était pas tenue à son égard d'un devoir de mise en garde, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, d'autre part, que l'augmentation de la dette d'intérêts étant la conséquence du défaut de paiement, la cour d'appel n'était pas tenue de s'expliquer sur un moyen inopérant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés solidairement avec d'autres cautions, à payer à la société Locaumat, la somme de 79 290, 13 euros pour le premier prêt et la somme de 6 607, 40 euros pour le second avec intérêts au taux légal de 14, 5 % pour les seules années entières 2001, 2003 et suivantes jusqu'à complet paiement, alors, selon le moyen, que la banque est débitrice d'une obligation de conseil, de mise en garde et de vigilance, lorsqu'elle accepte le bénéfice de cautions, sans rapport avec les facultés financières des personnes physiques qui s'engagent ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que les exposants se sont portés cautions de Mme X... pour des sommes de 79 290, 13 euros (premier prêt) et de 6 607, 40 euros (pour le second) bien que leurs revenus pour 1996 étaient de 74 593 francs (soit 11 453, 48 euros) ; que dans leurs conclusions d'appel M. et Mme Y... avaient reproché à la banque d'avoir manqué à son obligation de bonne foi et d'information en les engageant dans un cautionnement disproportionné avec leurs facultés de remboursement ; que pour rejeter la demande des cautions, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que la disproportion n'était pas établie, sans rechercher, ainsi que cela lui était demandé, si la banque n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde et avait pris soin de se renseigner sur la consistance du patrimoine et des revenus de M. et Mme Y... lors de la conclusion de leurs engagements de cautions ; que la cour d'appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que M. et Mme Y... n'ont pas soutenu dans leurs écritures que le prêteur était tenu à leur égard d'un devoir de mise en garde mais qu'il avait engagé sa responsabilité pour cautionnement disproportionné ; que le moyen est nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne Mme X... et M. et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile et les articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour Mme X..., demanderesse au pourvoi principal

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué

D'AVOIR condamné Madame X... à payer à la Société LOCAUMAT la somme de 181. 612, 24 avec intérêts aux taux de 14, 50 % et la somme de 7. 950, 24 avec intérêts au taux de 14, 50 % ;

AUX MOTIFS QUE, sur la disproportion du crédit octroyé, Madame X... est mal venue à articuler cette argumentation alors que, commerçante, elle ne bénéfice pas en principe de la théorie de l'abus de concours financiers, moins encore des dispositions du Code de la Consommation ; qu'il n'en est autrement que dans des circonstances étrangères à l'espèce, telle que l'impossibilité pour l'emprunteur de connaître ses capacités de remboursement avant longtemps ou encore l'exigence d'une banque de prêter des fonds à peine de cesser son soutien à l'entreprise ; que d'ailleurs Madame X... en est réduite à produire un arrêt de la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation propre à un emprunt non commerçant ;

ALORS D'UNE PART QUE la banque est débitrice d'une obligation de conseil, de mise en garde et de vigilance, lorsqu'elle accorde un prêt à un emprunteur non averti, même s'il s'agit d'un professionnel ; qu'il ressort de l'arrêt que Madame X..., exploitant des manèges forains, a souscrit deux prêts accordés par la Société SECURITAS, aux droits de laquelle se trouve la Société LOCAUMAT, sans pouvoir faire face à la charge du remboursement et qu'elle a reproché à la banque d'avoir manqué à ses devoirs de conseil, de mise en garde et de vigilance ; que pour rejeter ces demandes, la Cour s'est bornée à affirmer qu'en sa qualité de commerçante, Madame X... ne pouvait par principe se prévaloir « de la théorie de l'abus de concours financiers » sans avoir recherché, ainsi que cela lui était demandé, si Madame X... était un emprunteur profane, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code Civil ;

ALORS D'AUTRE PART QUE le créancier doit exécuter le contrat de bonne foi sans laisser la charge de la dette s'accroître sans raison ; que Madame X... soutenait que la Société LOCAUMAT n'avait pas exécuté de bonne foi les deux contrats litigieux, dès lors, d'une part, qu'elle avait remboursé le capital prêté tout en demandant, dès les premières difficultés, le rééchelonnement de sa dette et que, d'autre part, la banque a attendu plus de quatre ans pour engager une action en recouvrement, ce qui a eu pour conséquence d'augmenter de manière inconsidérée le montant des intérêts restant à payer ; que faute de s'être expliquée sur ce moyen, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard l'article 1134, alinéa 3 du Code Civil.

Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils pour M. et Mme Y..., demandeurs au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les époux Y... solidairement avec MM. Z... et A..., à payer à titre de cautions de Madame X..., à la société LOCAUMAT, la somme de 79 290, 13 pour le premier prêt et la somme de 6 607, 40 pour le second avec intérêts au taux légal de 14, 5 % pour les seules années entières 2001, 2003 et suivantes jusqu'à complet paiement ;

AUX MOTIFS, s'agissant des cautions, QU'elles n'étaient pas à l'époque de leur engagement en situation compromise ; que les époux Y... totalisaient 74 593 F de revenus pour cette même année 1996, alors qu'ils n'étaient que deux à leur foyer ;

ALORS QUE la banque est débitrice d'une obligation de conseil, de mise en garde et de vigilance, lorsqu'elle accepte le bénéfice de cautions, sans rapport avec les facultés financières des personnes physiques qui s'engagent ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que les exposants se sont portés cautions de Madame X... pour des sommes de 79 290, 13 (1'prêt) et de 6 607, 40 (pour le second) bien que leurs revenus pour 1996 étaient de 74 593 F (soit 11 453, 48) ; que dans leurs conclusions d'appel les exposants avaient reproché à la banque d'avoir manqué à son obligation de bonne foi et d'information en les engageant dans un cautionnement disproportionné avec leurs facultés de remboursement ; que pour rejeter la demande des cautions, la Cour s'est bornée à affirmer que la disproportion n'était pas établie, sans rechercher, ainsi que cela lui était demandé, si la banque n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde et avait pris soin de se renseigner sur la consistance du patrimoine et des revenus des exposants lors de la conclusion de leurs engagements de cautions ; que la Cour d'Appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code Civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-11962
Date de la décision : 22/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 25 janvier 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 sep. 2009, pourvoi n°08-11962


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Lesourd, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.11962
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