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07/07/2009 | FRANCE | N°08-40637

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 juillet 2009, 08-40637


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 décembre 2007), que, par jugement du 26 novembre 2001, le tribunal de grande instance de Metz a arrêté le plan de cession des actifs de la société Bata Hellocourt et a autorisé le licenciement des salariés non repris dans le cadre de ce plan ; qu'après avoir établi un plan social et mis en oeuvre un ordre des licenciements, les commissaires à l'exécution du plan ont notifié aux salariés non repris leur licenciement pour motif économique ; que plusieurs salariés ont con

testé le bien-fondé de cette décision et l'application de l'ordre de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 décembre 2007), que, par jugement du 26 novembre 2001, le tribunal de grande instance de Metz a arrêté le plan de cession des actifs de la société Bata Hellocourt et a autorisé le licenciement des salariés non repris dans le cadre de ce plan ; qu'après avoir établi un plan social et mis en oeuvre un ordre des licenciements, les commissaires à l'exécution du plan ont notifié aux salariés non repris leur licenciement pour motif économique ; que plusieurs salariés ont contesté le bien-fondé de cette décision et l'application de l'ordre des licenciements ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire que les licenciements de trois salariés étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1° / que, si l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi, en leur donnant au besoin une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé de leur délivrer une qualification nouvelle leur permettant d'accéder à un poste disponible de catégorie supérieure ; que pour décider que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, l'arrêt retient que des postes d'ouvrier qualifié et d'ouvriers hautement qualifiés étaient disponibles et devaient être proposés aux salariés à reclasser, au besoin en entreprenant une formation dispensée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi quand les postes disponibles relevaient d'une catégorie supérieure à ceux occupés par les salariés licenciés, auxquels ces derniers, ouvriers spécialisés ou qualifiés, devaient accéder par une formation qualifiante que l'employeur n'était pas tenu de leur délivrer, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 321-1 devenus L. 1233-2 et L. 1233-4 du code du travail ;
2° / que, si l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé d'assurer la formation initiale qui leur fait défaut ; que pour décider que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, l'arrêt retient qu'un poste d'ouvrier qualifié était disponible et devait être proposé aux salariés à reclasser, au besoin en entreprenant une formation dispensée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi quand le poste disponible relevait d'une spécialisation différente de celle des salariés licenciés, auxquels ces derniers, ouvriers qualifiés, devaient accéder par une formation initiale que l'employeur n'était pas tenu de leur délivrer, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 321-1 devenus L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt qu'une entreprise appartenant au même groupe offrait plusieurs postes d'ouvriers dont aucun n'avait été proposé aux salariés licenciés, tous ouvriers spécialisés ou qualifiés dans le domaine de la chaussure ; qu'ayant relevé que ces postes correspondaient à des emplois de nature similaire à ceux supprimés et qu'il n'était pas démontré que les intéressés n'avaient pas les capacités requises pour les occuper, la cour d'appel, qui n'a pas imposé à l'employeur de leur délivrer une nouvelle qualification, a pu décider que ce dernier avait méconnu son obligation de reclassement et que dès lors les licenciements n'avaient pas de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de juger que les règles relatives à l'ordre des licenciements n'avaient pas été respectées à l'égard de Mme X..., alors, selon le moyen :
1° / que l'employeur doit prendre en considération l'ensemble des critères qu'il a retenus pour fixer l'ordre des licenciements soit, en l'espèce, la qualification professionnelle appréciée par catégorie, l'ancienneté de service dans l'entreprise, les charges de famille et la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle difficile ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient qu'il résulte du tableau établi par lui que les salariés totalisaient un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en statuant ainsi quand le tableau produit par l'employeur quantifiait seulement les points acquis au titre de l'âge, des charges de famille, des handicaps et de l'ancienneté, et non de la qualification professionnelle, la cour d'appel qui n'a pas examiné l'ensemble des critères dont devait tenir compte l'employeur pour déterminer l'ordre des licenciements, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-1-1 devenu L. 1233-5 du code du travail ;

2° / que l'employeur peut privilégier l'un des critères retenus pour déterminer l'ordre des licenciements ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient que les salariés totalisaient un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en se déterminant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée par l'employeur, si celui-ci n'avait pas privilégié, au sein d'une même catégorie professionnelle, le critère tiré de la compétence professionnelle des salariés sur tous autres critères présidant à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 321-1-1 devenu L. 1233-5 du code du travail ;
3° / que les critères relatifs à l'ordre des licenciements ne s'appliquent qu'à l'intérieur d'une même catégorie professionnelle, entre les salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient que les salariés totalisaient, au titre des critères retenus par le plan social, un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en se déterminant ainsi quand les salariés maintenus en poste, qui exerçaient les " fonctions d'assistante commerciale ", n'appartenaient pas à la même catégorie professionnelle que la salariée licenciée, qui occupait un poste de " secrétaire ", la cour d'appel qui a apprécié l'ordre des licenciements en dehors de la catégorie professionnelle de la salariée, a violé l'article L. 321-1-1 devenu L 1233-5 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté qu'au regard des critères définis pour la mise en oeuvre de l'ordre des licenciements, l'employeur ne justifiait pas, par des raisons objectives, le choix de la salariée licenciée, en ne s'expliquant pas sur les conditions d'appréciation de ses qualités professionnelles ; que, sans être tenue d'effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, elle a par ailleurs apprécié la situation de celle-ci au regard de la catégorie professionnelle à laquelle elle appartenait, sans que la différence des tâches confiées aux salariés de cette catégorie puisse à elle seule justifier l'exclusion de l'ordre des licenciements, et a pu décider que cet ordre n'avait pas été respecté ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bayle Chanel Geoffroy, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP Bayle-Chanel-Geoffroy à payer à Mme Y... la somme de 246, 67 euros et à Mmes Z... et X... la somme globale de 1 000 euros ;
Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, condamne la société Bayle-Chanel Geoffroy, ès qualités, à payer à la SCP Masse Dessen et Thouvenin la somme de 1 500 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour la société Bayle-Chanel Geoffroy, ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR dit que les licenciements de Madame Virginie Y..., Madame Marie-Claire Z... et Monsieur Bernard A... sont dépourvus de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'à défaut de proposition de reclassement aux salariés en cause, il appartient à la SCP Bayle et Geoffroy ès-qualités de justifier de l'impossibilité de reclassement ; que les courriers versés contradictoirement aux débats démontrent que la société Bata Hellocourt faisait partie de la SA Bata Moussey Holding comprenant, en outre, la SA L. Marbot et Compagnie (activité de fabrication à Neuvic sur Lisle), la SA Bata France Distribution (activité de distribution à Moussey) et la SA Bata Outre-Mer (activité de distribution à Fort-de-France) ; que la société L. Marbot, ainsi qu'il ressort d'un courrier du 29 novembre 2001, offrait dans ses ateliers de piqûre et de montage des postes d'ouvrier qualifié (1 pareuse) et d'ouvriers hautement qualifiés (1 monteur bouts – 1 couseur trépointe – 1 fraiseur de lisses) correspondant à des emplois de nature ou de qualification ou de classification similaire à ceux occupés par Madame Y..., Madame Z... et Monsieur A..., tous ouvriers spécialisés en chaussure ou ouvrier d'entretien hautement qualifié étant précisé qu'il appartient à l'employeur de procéder au reclassement, au besoin en entreprenant une formation du salarié à reclasser ; qu'aucun des emplois concernés n'a été proposé à ces salariés dont la SCP Bayle et Geoffroy ne démontre pas qu'ils ne présentaient pas les capacités requises pour les occuper ; qu'il apparaît dans ces conditions que l'employeur n'a pas rempli son obligation de reclassement à l'égard de Mesdames Y... et Z... et de Monsieur A... dont les licenciements se trouvent en conséquence dépourvus de cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QUE si l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi, en leur donnant au besoin une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé de leur délivrer une qualification nouvelle leur permettant d'accéder à un poste disponible de catégorie supérieure ; que pour décider que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, l'arrêt retient que des postes d'ouvrier qualifié et d'ouvriers hautement qualifiés étaient disponibles et devaient être proposés aux salariés à reclasser, au besoin en entreprenant une formation dispensée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi quand les postes disponibles relevaient d'une catégorie supérieure à ceux occupés par Mesdames Y... et Z..., auxquels ces dernières, ouvrières spécialisées, devaient accéder par une formation qualifiante que l'employeur n'était pas tenu de leur délivrer, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2 nouveau (art. 122-14-3 ancien) et L. 1233-4 nouveau (art. L. 321-1 ancien) du code du travail ;
2°) ALORS QUE si l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé d'assurer la formation initiale qui leur fait défaut ; que pour décider que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, l'arrêt retient que des postes d'ouvrier qualifié et d'ouvriers hautement qualifiés étaient disponibles et devaient être proposés aux salariés à reclasser, au besoin en entreprenant une formation dispensée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi quand les postes disponibles relevaient d'une spécialisation différente de celle de Monsieur A..., auxquels ce dernier devait accéder par une formation initiale que l'employeur n'était pas tenu de lui délivrer, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2 nouveau (art. 122-14-3 ancien) et L. 1233-4 nouveau (art. L. 321-1 ancien) du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR fixé la créance de Madame Sylvie X... au passif du redressement de la SA Bata Hellocourt à titre d'indemnité pour inobservation de l'ordre des licenciements ;
AUX MOTIFS QU'il ressort de la liste du personnel versé contradictoirement aux débats que comme le fait valoir Madame X... qui comptabilisait 15 points, elle a été licenciée alors que Madame Carmen C...et Madame Frédérique D..., assistantes commerciales comme elle, ayant la même classification ETAM et le même coefficient 200, et appartenant au même service de vente marketing, mais ne comptabilisant chacune que 10 points, ont été reprises ; qu'il s'en suit qu'en procédant au licenciement de Madame X... alors que l'appréciation de la situation de celle-ci, telle qu'elle résultait des critères du plan social relatifs à l'ordre des licenciements supposait qu'il soit procédé préalablement au licenciement de deux autres salariées dont l'emploi a été maintenu, sans que la décision de licencier Madame X... ne puisse être justifiée par d'autres éléments, l'employeur a violé les règles relatives à l'ordre des licenciements ;
1°) ALORS QUE l'employeur doit prendre en considération l'ensemble des critères qu'il a retenus pour fixer l'ordre des licenciements soit, en l'espèce, la qualification professionnelle appréciée par catégorie, l'ancienneté de service dans l'entreprise, les charges de famille et la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle difficile ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient qu'il résulte du tableau établi par lui que la salariée totalisait un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en statuant ainsi quand le tableau produit par l'employeur quantifiait seulement les points acquis au titre de l'âge, des charges de famille, des handicaps et de l'ancienneté, et non de la qualification professionnelle, la cour d'appel qui n'a pas examiné l'ensemble des critères dont devait tenir compte l'employeur pour déterminer l'ordre des licenciements, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 nouveau (art. L. 321-1-1 ancien) du code du travail ;
2°) ALORS, au surplus, QUE l'employeur peut privilégier l'un des critères retenus pour déterminer l'ordre des licenciements, tel notamment que le critère tiré de la qualification professionnelle des salariés appartenant à une même catégorie professionnelle ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient que la salariée totalisait un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur n'avait pas privilégié, au sein d'une même catégorie professionnelle, le critère tiré de la compétence professionnelle des salariés sur tous autres critères présidant à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a entaché de nouveau sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1233-5 nouveau (art. L. 321-1-1 ancien) du code du travail ;
3°) ALORS QUE les critères relatifs à l'ordre des licenciements ne s'appliquent qu'à l'intérieur d'une même catégorie professionnelle, entre les salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle continue ; que pour décider que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, l'arrêt retient que la salariée totalisait, au titre des critères retenus par le plan social, un nombre de points supérieur à celui d'autres salariés dont les emplois ont été maintenus ; qu'en se déterminant ainsi quand les salariés maintenus en poste, qui exerçaient les fonctions d'« assistante commerciale », n'appartenaient pas à la même catégorie professionnelle que la salariée licenciée, qui occupait un poste de « secrétaire », la cour d'appel qui a apprécié l'ordre des licenciements en dehors de la catégorie professionnelle de la salariée, a violé l'article L. 1233-5 nouveau (art. L. 321-1-1 ancien) du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40637
Date de la décision : 07/07/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 04 décembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 jui. 2009, pourvoi n°08-40637


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40637
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