LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., épouse Y..., engagée à temps complet à compter du 1er juillet 1975, par le laboratoire Boutot, aux droits duquel se trouve la société Biorèze, a été licenciée, le 28 avril 2006, pour avoir refusé d'appliquer les nouveaux horaires de travail dans l'entreprise ; qu'estimant son refus légitime, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, pour rejeter la demande, la cour d'appel énonce que Mme Y... a été licenciée en raison de son refus de se soumettre aux nouveaux horaires de travail fixés par son employeur ; qu'il convient de rappeler que Mme Y... était employée par le laboratoire d'analyse médicale Bioreze en qualité de réceptionniste et qu'elle était la seule salariée ayant cette qualification ; qu'eu égard à la nature de l'activité exercée, l'ouverture du laboratoire à 7 heures 30 apparaît conforme aux exigences d'une telle activité ; que les heures d'ouverture du laboratoire ont été modifiées et adaptées aux besoins du service à la suite d'un audit diligenté par l'employeur ; que l'analyse des plannings de travail fait apparaître que Mme Y... n'était pas la seule salariée à embaucher à 7 heures 30 ; que d'autres salariées, exerçant la fonction de secrétaire, acceptaient cette heure d'embauche ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la salariée qui soutenait que le changement de ses horaires de travail et de la répartition de son temps de travail hebdomadaire caractérisait une modification de son contrat de travail qu'elle était en droit de refuser, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 décembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Biorèze aux dépens ;
Vu les articles 75 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de de procédure civile, condamne la société Biorèze à payer à la SCP Boulloche la somme de 2 500 euros à charge pour elle de renoncer à la part contributive de l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP BOULLOCHE, avocat aux Conseils pour Mme Y...
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Mme Y... reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir déboutée des demandes présentées contre la société BIOREZE pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, aux motifs que « Madame Y... a été licenciée en raison de son refus de se soumettre aux nouveaux horaires de travail fixés par son employeur, à savoir : 7 heures 30 à 11 heures 45, le matin, 15 heures à 18 heures 30, l'après midi ; qu'il convient de rappeler que Madame Y... était employée par le laboratoire d'analyse médicale BIOREZE en qualité de réceptionniste et qu'elle était la seule salariée ayant cette qualification ; qu'eu égard à la nature de l'activité exercée, l'ouverture du laboratoire à 7 heures 30 apparaît conforme aux exigences d'une telle activité ; que les heures d'ouverture du laboratoire ont été modifiées et adaptées aux besoins du service à la suite d'un audit diligenté par l'employeur ; que l'analyse des plannings de travail fait apparaître que Madame Y... n'était pas la seule salariée à embaucher à 7 heures 30 ; que d'autres salariées, exerçant la fonction de secrétaire, acceptaient cette heure d'embauche ; que l'analyse des plannings ne fait pas apparaître de discrimination entre les salariées, étant par ailleurs observé que Madame Y... était la seule à occuper le poste de réceptionniste ; en outre, que les premiers juges ont pertinemment relevé que Madame Y... a refusé la formation interne proposée par l'employeur afin d'accéder à un poste de secrétaire ; qu'au vu de ces éléments objectifs, il y a lieu de considérer que le licenciement de Madame Y... est fondé sur une cause réelle et sérieuse et que les allégations de discrimination formulées en cause d'appel par celle-ci ne sont nullement établies »,
Alors que, d'une part, constitue une modification du contrat le changement important des horaires de travail et la suppression d'un jour de repos ; qu'en l'espèce, Mme X... a pendant une trentaine d'années travaillé de 8h30 à 12h et de 14 h à 18h30, avec un jour de repos complet en semaine ; qu'en mars 2006, l'employeur lui a demandé de travailler de 7h30 à 11h15, et de 15 h à 18h15, les lundi, mardi, jeudi et vendredi, et de 7h30 à 11 les mercredi et samedi ; qu'ainsi, elle aurait dû venir travailler plus tôt, sa journée de repos était remplacée par deux demijournées et la durée d'interruption à l'heure du déjeuner était notablement augmentée ; que Mme X... a refusé cette proposition et a été licenciée pour n'avoir pas justifié les motifs de son refus ; qu'en décidant que ce licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Alors que, d'autre part, les motifs de licenciement doivent être précisés dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement de Mme X... reprochait à cette dernière un refus d'application de nouveaux horaires de travail ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision admettant que ce licenciement reposait sur cause réelle et sérieuse, que Mme X... avait refusé la formation interne proposée par l'employeur pour accéder à un poste de secrétaire, motif qui n'était pas évoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Alors qu'en troisième lieu, dans ses conclusions d'appel, Mme X... a fait valoir qu'elle était la seule salariée qui se voyait imposer les nouveaux horaires et qu'elle était victime d'une discrimination ;
qu'en se bornant à retenir que les allégations de discrimination formulées en appel n'étaient pas établies, sans davantage justifier sa décision sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors qu'enfin, et à titre subsidiaire, l'employeur, qui est tenu d'exécuter le contrat de bonne foi, ne peut proposer un changement des conditions du contrat que le salarié est dans l'impossibilité d'exécuter ; qu'en l'espèce, dans ses écritures d'appel, Mme X... a soutenu que l'employeur savait qu'elle s'occupait des quatre enfants de son compagnon et qu'elle ne pouvait accepter la proposition de modification, non sincère, qui désorganisait totalement le transport des enfants à l'école et l'obligeait à faire deux journées de travail distinctes en 24 heures alors qu'elle habite hors de Brive ; qu'en décidant que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, sans s'expliquer sur ce moyen, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.