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28/05/2009 | FRANCE | N°08-11000

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 mai 2009, 08-11000


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu les articles R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne (la caisse) a décidé, le 15 janvier 2004, de prendre en charge au titre du tableau n° 25 des maladies professionnelles l'affection déclarée par M. X..., salarié de la société Aciéries Hachette et Driout (la société) ; que la caisse ayant, le 16 mai 2006, refusé de communiquer les

pièces médicales du dossier de M. X... au médecin désigné par la société, celle-ci...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu les articles R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Marne (la caisse) a décidé, le 15 janvier 2004, de prendre en charge au titre du tableau n° 25 des maladies professionnelles l'affection déclarée par M. X..., salarié de la société Aciéries Hachette et Driout (la société) ; que la caisse ayant, le 16 mai 2006, refusé de communiquer les pièces médicales du dossier de M. X... au médecin désigné par la société, celle-ci a saisi la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale d'un recours, en sollicitant que la décision de prise en charge de cette affection lui soit déclarée inopposable ;

Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt retient que les dispositions de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale ne peuvent être invoqués pour justifier un refus de communiquer les pièces du dossier médical dès lors que ce texte ne s'applique plus une fois que la maladie professionnelle a été reconnue et que celle-ci n'est pas remise en cause par l'employeur, et que ce refus fait grief à l'employeur dans la mesure où il le place dans l'impossibilité de vérifier le bien-fondé des dépenses imputées sur son compte ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'inopposabilité de la décision de prise en charge ne peut sanctionner que le caractère non contradictoire de la procédure administrative préalable à cette décision et non le comportement ultérieur de la caisse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société Aciéries Hachette et Driout aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Aciéries Hachette et Driout ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Y..., avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré inopposable à la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT la décision de prise en charge émanant de la CPAM de la HAUTE-MARNE concernant la maladie professionnelle de M. Mohamed X... ;

AUX MOTIFS propres QU'« en raison de l'enjeu financier, l'employeur, en sa qualité de débiteur des cotisations destinées à couvrir le risque professionnel, a un intérêt à pouvoir s'assurer de l'exacte imputation des dépenses inscrites à son compte qui découlent du taux d'incapacité permanente retenu par la caisse ; que cet intérêt rend légitime l'accès du médecin-conseil au dossier médical de la victime d'une maladie professionnelle postérieurement à la reconnaissance de celle-ci ; qu'aucun texte n'établit un délai de forclusion à une telle démarche ; qu'en particulier, comme le fait valoir à bon droit la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT, les dispositions de l'article R.441-13 du Code de la sécurité sociale ne peuvent être invoquées pour justifier un refus de communiquer les pièces du dossier médical de M. X... dès lors que ce texte ne s'applique plus une fois que la maladie professionnelle a été reconnue et que celle-ci n'est pas remise en cause par l'employeur ; que c'est vainement que la Caisse primaire d'assurance maladie a opposé à la demande de l'employeur une fin de non-recevoir tirée du secret médical, dès lors que son obligation de communiquer les pièces de ce dossier à l'employeur qui en fait la demande est fondée sur les principes généraux édictés par les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 1315 du Code civil en vertu desquels « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver » ; qu'il résulte de ces éléments que le refus de communication des pièces médicales de M. X... fait grief à l'employeur dans la mesure où il le place dans l'impossibilité de vérifie le bien fondé des dépenses imputées sur le compte employeur (…) » (arrêt, p. 3, § 7, 8, 9 et 10 et p. 4, § 1 et 2) ;

Et AUX MOTIFS, éventuellement adoptés, QUE « l'article R.434-35 du Code de la sécurité sociale précisant expressément que la décision de reconnaissance d'une incapacité, son taux et le montant de la rente due à la victime, doit être motivée et immédiatement notifiée par la Caisse à la victime, un double étant envoyé à l'employeur consacre ce droit à l'information de l'employeur postérieurement à la décision de prise en charge initiale ; que pour que la société soit effectivement et complètement renseignée et pour qu'elle puisse apprécier la pertinence des prestations qui lui sont imputées et du taux d'incapacité retenu, il convenait, comme elle en avait fait la demande, qu'elle soit rendue destinataire de l'entier rapport médical, ce qui seul lui permettait d'apprécier les conditions dans lesquelles elle pouvait engager une action judiciaire et bénéficier du droit à l'égalité des armes lors d'un procès, ce que lui garantie la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il n'est pas contesté que ses intérêts patrimoniaux étaient en jeu, dès lors qu'est récupérée auprès d'elle par la caisse la dépense supplémentaire constituée par la rente (…) » (jugement, p. 4, § 7 et 8) ;

ALORS QUE si le caractère contradictoire de la procédure devant la CPAM postule que l'employeur soit avisé de la clôture de l'instruction et qu'un délai lui soit imparti pour consulter le dossier et, le cas échéant, en solliciter l'envoi, aucune méconnaissance du principe du contradictoire ne peut être invoquée par l'employeur dès lors qu'il n'a pas usé de la faculté qui lui était offerte dans le délai requis ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles R.441-10 et R.441-13 du Code de la sécurité sociale, ensemble le principe du contradictoire en tant qu'il régit la procédure de prise en charge de la maladie professionnelle.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré inopposable à la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT la décision de prise en charge émanant de la CPAM de la HAUTE-MARNE concernant la maladie professionnelle de M. Mohamed X... ;

AUX MOTIFS propres QU'« en raison de l'enjeu financier, l'employeur, en sa qualité de débiteur des cotisations destinées à couvrir le risque professionnel, a un intérêt à pouvoir s'assurer de l'exacte imputation des dépenses inscrites à son compte qui découlent du taux d'incapacité permanente retenu par la caisse ; que cet intérêt rend légitime l'accès du médecin-conseil au dossier médical de la victime d'une maladie professionnelle postérieurement à la reconnaissance de celle-ci ; qu'aucun texte n'établit un délai de forclusion à une telle démarche ; qu'en particulier, comme le fait valoir à bon droit la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT, les dispositions de l'article R.441-13 du Code de la sécurité sociale ne peuvent être invoquées pour justifier un refus de communiquer les pièces du dossier médical de M. X... dès lors que ce texte ne s'applique plus une fois que la maladie professionnelle a été reconnue et que celle-ci n'est pas remise en cause par l'employeur ; que c'est vainement que la Caisse primaire d'assurance maladie a opposé à la demande de l'employeur une fin de non-recevoir tirée du secret médical, dès lors que son obligation de communiquer les pièces de ce dossier à l'employeur qui en fait la demande est fondée sur les principes généraux édictés par les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 1315 du Code civil en vertu desquels « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver » ; qu'il résulte de ces éléments que le refus de communication des pièces médicales de M. X... fait grief à l'employeur dans la mesure où il le place dans l'impossibilité de vérifie le bien fondé des dépenses imputées sur le compte employeur (…) » (arrêt, p. 3, § 7, 8, 9 et 10 et p. 4, § 1 et 2) ;

Et AUX MOTIFS, éventuellement adoptés, QUE « l'article R.434-35 du Code de la sécurité sociale précisant expressément que la décision de reconnaissance d'une incapacité, son taux et le montant de la rente due à la victime, doit être motivée et immédiatement notifiée par la Caisse à la victime, un double étant envoyé à l'employeur consacre ce droit à l'information de l'employeur postérieurement à la décision de prise en charge initiale ; que pour que la société soit effectivement et complètement renseignée et pour qu'elle puisse apprécier la pertinence des prestations qui lui sont imputées et du taux d'incapacité retenu, il convenait, comme elle en avait fait la demande, qu'elle soit rendue destinataire de l'entier rapport médical, ce qui seul lui permettait d'apprécier les conditions dans lesquelles elle pouvait engager une action judiciaire et bénéficier du droit à l'égalité des armes lors d'un procès, ce que lui garantie la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il n'est pas contesté que ses intérêts patrimoniaux étaient en jeu, dès lors qu'est récupérée auprès d'elle par la caisse la dépense supplémentaire constituée par la rente (…) » (jugement, p. 4, § 7 et 8) ;

ALORS QUE, premièrement, l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne concerne que les instances juridictionnelles ; qu'en appliquant ce texte à la procédure devant la CPAM, et donc à une instance administrative, les juges du fond ont violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Et ALORS QUE, deuxièmement, le principe de l'égalité des armes ne concerne lui aussi que les instances juridictionnelles ; qu'en appliquant ce principe à une instance administrative, les juges du fond ont violé le principe de l'égalité des armes.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré inopposable à la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT la décision de prise en charge émanant de la CPAM de la HAUTE-MARNE concernant la maladie professionnelle de M. Mohamed X... ;

AUX MOTIFS propres QU'« en raison de l'enjeu financier, l'employeur, en sa qualité de débiteur des cotisations destinées à couvrir le risque professionnel, a un intérêt à pouvoir s'assurer de l'exacte imputation des dépenses inscrites à son compte qui découlent du taux d'incapacité permanente retenu par la caisse ; que cet intérêt rend légitime l'accès du médecin-conseil au dossier médical de la victime d'une maladie professionnelle postérieurement à la reconnaissance de celle-ci ; qu'aucun texte n'établit un délai de forclusion à une telle démarche ; qu'en particulier, comme le fait valoir à bon droit la Société ACIERIES HACHETTE ET DRIOUT, les dispositions de l'article R.441-13 du Code de la sécurité sociale ne peuvent être invoquées pour justifier un refus de communiquer les pièces du dossier médical de M. X... dès lors que ce texte ne s'applique plus une fois que la maladie professionnelle a été reconnue et que celle-ci n'est pas remise en cause par l'employeur ; que c'est vainement que la Caisse primaire d'assurance maladie a opposé à la demande de l'employeur une fin de non-recevoir tirée du secret médical, dès lors que son obligation de communiquer les pièces de ce dossier à l'employeur qui en fait la demande est fondée sur les principes généraux édictés par les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 1315 du Code civil en vertu desquels « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver » ; qu'il résulte de ces éléments que le refus de communication des pièces médicales de M. X... fait grief à l'employeur dans la mesure où il le place dans l'impossibilité de vérifie le bien fondé des dépenses imputées sur le compte employeur (…) » (arrêt, p. 3, § 7, 8, 9 et 10 et p. 4, § 1 et 2) ;

Et AUX MOTIFS, éventuellement adoptés, QUE « l'article R.434-35 du Code de la sécurité sociale précisant expressément que la décision de reconnaissance d'une incapacité, son taux et le montant de la rente due à la victime, doit être motivée et immédiatement notifiée par la Caisse à la victime, un double étant envoyé à l'employeur consacre ce droit à l'information de l'employeur postérieurement à la décision de prise en charge initiale ; que pour que la société soit effectivement et complètement renseignée et pour qu'elle puisse apprécier la pertinence des prestations qui lui sont imputées et du taux d'incapacité retenu, il convenait, comme elle en avait fait la demande, qu'elle soit rendue destinataire de l'entier rapport médical, ce qui seul lui permettait d'apprécier les conditions dans lesquelles elle pouvait engager une action judiciaire et bénéficier du droit à l'égalité des armes lors d'un procès, ce que lui garantie la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il n'est pas contesté que ses intérêts patrimoniaux étaient en jeu, dès lors qu'est récupérée auprès d'elle par la caisse la dépense supplémentaire constituée par la rente (…) » (jugement, p. 4, § 7 et 8) ;

ALORS QUE, premièrement, les médecins du service de contrôle ne sont pas en droit de transmettre des pièces couvertes par le secret médical aux services administratifs des caisses ou à des tiers ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé, par refus d'application, l'article R. 4127-104 du Code de la santé publique ;

Et ALORS QUE, deuxièmement dès lors que le service du contrôle médical, placé sous l'autorité de la Caisse nationale d'assurance maladie, n'est pas en droit de communiquer aux services administratifs de cette dernière les pièces couvertes par le secret médical, la Caisse elle-même faisait valoir un motif légitime de refus de communication desdites pièces tenant à l'impossibilité pour elle de se les procurer ; qu'en omettant de se prononcer sur ce point, à l'effet de déterminer si le motif de refus opposé par la Caisse nationale d'assurance maladie n'était pas légitime, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 11 et 141 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les articles L. 221-1, 5°, R. 315-2 du Code de la sécurité sociale et R. 4127-104 du Code de la santé publique.

Et ALORS QUE, troisièmement et en tout cas, les pièces couvertes par le secret médical ne peuvent donner lieu à communication que dans le cadre d'une expertise judiciaire prescrite par le juge ; qu'en statuant comme ils l'ont fait sans rechercher si seule une demande d'expertise judiciaire pouvait permettre la communication des éléments couverts par le secret médical, les juges du fond ont violé les articles R.441-10 et R.441-13 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 226-13 du Code pénal ainsi que les règles gouvernant le secret médical.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-11000
Date de la décision : 28/05/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 27 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 mai. 2009, pourvoi n°08-11000


Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.11000
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