LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-4 , L. 122-13 et L. 122-14-3 devenus L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le contrat de travail étant rompu par la prise d'acte de la rupture émanant du salarié, peu importe la lettre envoyée postérieurement par l'employeur pour lui imputer cette rupture ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Pascal X... a été engagé à compter du 15 septembre 1991 par contrat à durée indéterminée au poste de responsable technique, de production et de gestion des stocks par la société Miratole ; qu'ayant pris acte par lettre du 7 avril 2004 de la rupture du contrat de travail en reprochant certains griefs à l'employeur, il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir le paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour dire la rupture du contrat de travail imputable à la société Miratole et condamner celle-ci au paiement d'indemnités en conséquence, la cour d'appel a retenu que par courriers recommandés des 8 et 13 avril 2004, la société Miratole considérait le salarié comme démissionnaire et niait tout grief que lui imputait le salarié dans sa lettre du 7 avril, que le courrier envoyé par la société n'était pas une lettre de licenciement mais une prise d'acte par l'employeur de la démission du salarié ; que ce courrier attirait l'attention du salarié sur les conséquences d'une telle démission ; que l'employeur qui considère le contrat de travail comme rompu doit mettre en oeuvre la procédure de licenciement ; qu'à défaut, la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le juge n'ayant pas à rechercher si les faits reprochés au salarié dans le courrier par lequel l'employeur a pris acte de sa démission étaient ou non fondés ;
Qu'en statuant ainsi en tirant des conséquences des courriers adressés par l'employeur en réponse à la lettre de M. X... du 7 avril 2004 alors que le contrat ayant été rompu par la lettre de prise d'acte du salarié, il lui incombait seulement de vérifier si les faits invoqués par l'intéressé justifiaient cette rupture, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a condamné la société Miratole à payer à M. Pascal X... un rappel de congés payés de 4 583 euros, l'arrêt rendu le 12 juillet 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. Pascal X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Hémery, avocat aux Conseils pour la société Miratole.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail était imputable à la société MIRATOLE, d'avoir condamné en conséquence celle-ci à payer à M. Pascal X... les sommes de 6.464,91 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, de 9.843 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 12.352,29 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et de 19.686 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, enfin d'avoir débouté la société MIRATOLE de toutes ses demandes,
AUX MOTIFS QU' « en son courrier qu'il a adressé le 7 avril 2004 au gérant de la société MIRATOLE, dans lequel il prend acte de la rupture de son contrat de travail, M. Pascal X... énumère les griefs suivants, et reproche à son employeur :- d'avoir « réduit ses attributions et la responsabilité attachée à ses fonctions de façon unilatérale et discriminatoire en lui imposant une rétrogradation et modifié un élément essentiel de son contrat de travail de manière totalement irrégulière et abusive. »- de l'avoir mis progressivement « au placard » après l'échec en décembre 2003 des pourparlers engagés en vue de l'acquisition de sa participation au sein de la société MIRATOLE, et pris des mesures discriminatoires à son égard - d'avoir porté atteinte à ses prérogatives vis-à-vis des salariés, des clients et des fournisseurs de la société :· vis-à-vis des salariés de l'entreprise :- de lui avoir à compter du mois de février 2004 retiré en sa qualité de responsable de fabrication, méthode et de qualité, sa mission de gestion du personnel de production, au profit de M. Z..., à qui cette tâche a été confiée le 16 mars 2004 · vis-à-vis des clients de l'entreprise :- d'avoir dans le cadre d'un changement d'organigramme en date du 22 mars 2004, réduit ses contacts avec la clientèle, en cantonnant sa mission de responsable de production, à une simple mission d'application des instructions et de compte-rendu à la direction ;- d'avoir supprimé tout contact avec la clientèle dans le domaine du suivi commercial et de la négociation ;· vis-à-vis des clients de l'entreprise :- de l'avoir à partir de mars 2004 cantonné à de simples fonctions de propositions d'achat, alors que dans l'organigramme de décembre 2002, il était responsable des achats de matière première et de la gestion du stock ;- d'avoir à compter du mois de janvier 2004 réduit ses prérogatives au profit de Mme Catherine A..., et à compter du 16 mars 2004, au profit du Directeur Général, M. Z..., qui a été embauché à cette date ;- d'avoir réduit sa prime de fin d'année en décembre 2003 à un montant de 1000 alors que depuis 2000, cette prime s'élevait à un montant de 3000 ;
par courriers recommandés en date des 8 et 13 avril 2004, la SARL MIRATOLE considérait M. Pascal X... démissionnaire et niait tout grief que lui imputait le salarié en sa lettre du 7 avril courant ; une telle lettre ne constitue pas une lettre de licenciement au sens des articles L 122-14-1 et L 122-14-2 du Code du Travail, mais une prise d'acte par l'employeur de la démission du salarié ; par ce courrier, la SARL MIRATOLE attire l'attention du salarié sur les conséquences d'une telle démission, à savoir « la mise en danger potentielle de l'entreprise et des 16 emplois salariés » ; elle estime également que cette décision du salarié est « basée sur un refus illégitime d'appliquer les instructions et de rendre compte à la direction » et met en avant en les détaillant par des exemples chiffrés la médiocrité des résultats de l'année 2003 qui est à l'origine, selon elle, de la modification des tâches du salarié ; or, au visa des dispositions des articles L 122-4, L 122-14 et L 122-14-3 du Code du Travail, l'employeur qui considère le contrat de travail rompu et qui se trouve irrecevable à en demander la résiliation judiciaire aux torts du salarié, doit mettre en oeuvre une procédure de licenciement ; à défaut, la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; dans ce cas, le juge du contrat de travail n'a pas à rechercher si les faits reprochés au salarié dans le courrier du 8 avril 2004 par lequel la SARL MIRATOLE prend acte de la démission du salarié étaient ou non fondés ; le jugement entrepris sera donc infirmé puisque cette rupture du contrat de travail imputable à l'employeur s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; M. B... lire Pascal X... qui avait plus de deux années d'ancienneté de service au profit de la SARL MIRATOLE qui occupe plus de dix salariés a donc droit à l'allocation des sommes suivantes :
- une indemnité compensatrice de congés payés d'un montant de 6.464,91 - une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 9.843 - une indemnité conventionnelle de licenciement de 12.352,29 - une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse équivalent à un minimum de six mois de salaire, en application de l'article L 122-14-4 du Code du Travail, et à défaut de la démonstration d'un préjudice distinct de la perte de son emploi, soit un montant de 19.686 ; » (arrêt p.4 et 5)
ALORS QUE lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le contrat de travail étant rompu par la prise d'acte de la rupture émanant du salarié, peu importe la lettre envoyée postérieurement par l'employeur pour lui imputer cette rupture ; qu'ayant constaté que M. Pascal X... avait pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reprochait à son employeur par lettre du 7 avril 2004, la Cour, qui s'est attachée aux seuls courriers postérieurs des 8 et 13 avril 2004 de la société MIRATOLE imputant au salarié la rupture sans examiner la prise d'acte antérieure du salarié ayant provoqué la cessation immédiate du contrat de travail, a violé les articles L 122-4, L 122-13 et L 122-14-3 du Code du Travail.