LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, ensemble les articles 8, 140 et 147 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Europcar ayant fait pratiquer en vertu d'un jugement d'un tribunal de commerce ordonnant la restitution en quelques mains où ils se trouvent, à son profit, des véhicules détournés par la société LCS.COM, une saisie-appréhension de véhicules automobiles détenus par la société Debard automobiles, cette dernière a saisi un juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de la saisie en invoquant sa qualité de détenteur de bonne foi ;
Attendu que pour accueillir l'exception d'incompétence soulevée par la société Europcar et se déclarer incompétent, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que les prétentions de la société Debard automobiles tendaient à remettre en cause le dispositif du jugement servant de fondement à la mesure d'exécution forcée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le juge de l'exécution connaît des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne la société Europcar France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Europcar France ; la condamne à payer à la société Debard automobiles la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Debard automobiles.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR confirmé la décision du juge de l'exécution de se déclarer incompétent pour statuer sur la demande de mainlevée de la saisie appréhension pratiquée entre les mains de la société DEBARD AUTOMOBILE, tiers de bonne foi, propriétaire des véhicules saisis ;
AUX MOTIFS QUE « l'article 8 du décret du 31 juillet 1992 dispose que le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution ; or, la société DEBARD AUTOMOBILES réclame la restitution des voitures saisies alors que le jugement du Tribunal de Commerce de Paris a ordonné l'appréhension de ces véhicules par la société EUROPCAR en quelques mains qu'ils se trouvent ; les prétentions de l'appelante vont donc directement à l'encontre de cette décision et c'est à bon droit, par des motifs pertinents que la Cour adopte, que le juge de l'exécution s'est déclaré incompétent » (arrêt attaqué p. 3) ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE « aux termes de l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît des difficultés d'exécution relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; et l'article 8 du décret du 31 juillet 1992 dispose que le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution ; en l'espèce, le Tribunal de commerce de Paris, dans son jugement rendu le 25 novembre 2004, a ordonné la restitution des véhicules appartenant à PARCOTO et détournés par la société LCS.COM en quelques mains qu'ils se trouvent, soit à la société PARCOTO, propriétaire, soit à la société EUROPCAR FRANCE es qualité de mandataire de PARCOTO, et ceci au besoin avec l'assistance de la force publique ; à cette instance, si la société DEBARD AUTOMOBILES n'a été ni partie ni représentée, le jugement lui est toutefois opposable dans la mesure où elle était tiers détenteur des véhicules et où le jugement ordonnait la restitution en quelques mains qu'ils se trouvent ; pour contester ce jugement, il appartient, comme l'indique le défendeur, à la société DEBARD AUTOMOBILES de former éventuellement une tierce opposition ou d'agir au fond ; comme le jugement du Tribunal de commerce de Paris précité a servi de fondement à l'ordonnance rendue le 23 mars 2005 par le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'Albi, le juge de l'exécution est incompétent en l'espèce pour prononcer la mainlevée de la saisie appréhension ordonnée en vertu de cette ordonnance, ne pouvant modifier le dispositif de la décision de justice » (jugement confirmé p. 6 in fine et 7) ;
ALORS QU'un bien meuble corporel peut être appréhendé entre les mains de celui qui est tenu de le remettre en vertu d'un titre exécutoire ou directement entre les mains d'un tiers qui le détient pour le compte de ce dernier ; qu'il en résulte que la saisie appréhension ne peut être légalement autorisée qu'entre les mains du tiers détenteur pour le compte d'autrui et non pas entre les mains du tiers de bonne foi qui détient la chose à titre de propriétaire ; qu'en l'espèce, il est constant que la société DEBARD AUTOMOBILES a régulièrement acquis les véhicules litigieux de la société LCS.COM, poursuivie pour abus de confiance ; qu'en déclarant le juge de l'exécution incompétent pour prononcer la mainlevée de la saisie appréhension ordonnée sur le fondement du jugement du Tribunal de commerce de Paris du 25 novembre 2004 ordonnant la restitution des véhicules appartenant à PARCOTO et détournés par la société LCS.COM « en quelques mains qu'ils se trouvent », quand cette mention ne pouvait viser que les tiers détenant pour le compte du débiteur et non pas les tiers détenant de bonne foi à titre de propriétaire, comme la société DEBARD AUTOMOBILES, la Cour d'appel a violé l'article 140 du décret du 31 juillet 1992, ensemble et par fausse application l'article 8 dudit décret, ensemble et par refus d'application l'article L. 313-6 du Code de l'organisation judiciaire.