COUR DE CASSATION
08 CRD 011
Audience publique du 22 septembre 2008 Prononcé au 20 octobre 2008
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l ’ article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, Mme Vérité, M. Chaumont, conseillers référendaires, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l ’ assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
Statuant sur le recours formé par :
- Monsieur Ozcan X...,
contre la décision du premier président de la cour d'appel de Metz en date du 16 novembre 2007 qui lui a alloué une indemnité de 8 000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l ’ article 149 du code précité.
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 22 septembre 2008, l'avocat du demandeur ne s ’ y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de Me Roth, avocat au Barreau de Metz, représentant M. X... ;
Vu les conclusions de l ’ agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu les conclusions en réponse de Me Roth ;
Vu la notification de la date de l ’ audience, par lettre recommandée avec demande d ’ avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l ’ agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l ’ audience ;
Monsieur Ozcan X... ne comparaît pas personnellement. Il est représenté à l ’ audience par Me Paveau, substituant Me Roth, conformément aux dispositions de l ’ article R. 40-5 du code de procédure pénale ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Vérité, les observations de Me Paveau, avocat substituant Me Roth, représentant le demandeur, et de Me Couturier-Heller, avocat représentant l ’ agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l ’ avocat général Charpenel, l'avocat du demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION,
Attendu que par décision du 16 novembre 2007, le premier président de la cour d'appel de Metz a rejeté la demande de M. X... relative à l ’ indemnisation de son préjudice matériel, et lui a alloué la somme de 8 000 euros en réparation du préjudice moral subi à raison de la détention provisoire qu ’ il a effectuée du 20 août au 11 décembre 2003 pour des faits ayant donné lieu à un arrêt d ’ acquittement devenu définitif ;
Que le 5 décembre 2007, M. X... a formé un recours contre cette décision, qu ’ il sollicite 6 000 euros au titre de son préjudice matériel, et 15 000 euros au titre de son préjudice moral ;
Que l ’ agent judiciaire du Trésor et l ’ avocat général soulèvent à titre principal l ’ irrecevabilité du recours et subsidiairement concluent au rejet des demandes de M. X... ;
Sur la recevabilité du recours :
Vu les articles 149-3 et R38 du code de procédure pénale ;
Attendu que les décisions prises par le premier président de la cour d ’ appel peuvent, dans les dix jours de leur notification, faire l ’ objet d ’ un recours devant la commission nationale de réparation des détentions ;
Attendu que la décision du premier président, saisi d ’ une demande de réparation à raison d ’ une détention provisoire, est notifiée au demandeur et à l ’ agent judiciaire du Trésor soit par remise d ’ une copie contre récépissé, soit par lettre recommandée avec demande d ’ avis de réception. La notification indique que la décision peut faire l ’ objet d ’ un recours devant la commission nationale de réparation des détentions dans un délai de dix jours ;
Attendu que le dossier transmis par la cour d ’ appel de Metz ne contient pas l ’ accusé de réception de la lettre de notification adressée à M. X..., et qu ’ aucun autre élément probant n ’ établit la date à laquelle la décision de la cour d ’ appel lui a été notifiée ;
Que M. X... déclare avoir reçu cette notification le 27 novembre 2003 ; Que par conséquent, le recours exercé par M. X... le 5 décembre 2007, dans le délai de dix jours de la notification, est recevable ;
Sur le fond :
Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;
Attendu qu ’ une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l ’ objet d ’ une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d ’ acquittement devenue définitive ; que cette indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral directement causé par la privation de liberté ;
Sur la réparation du préjudice matériel :
Attendu que M. X... fait valoir que la détention lui a fait perdre le bénéfice du revenu minimum d ’ insertion, et des revenus issus d ’ activités non déclarées, tels que des travaux de maçonnerie et la revente de denrées alimentaires ;
Attendu que l ’ interessé ne produit aucun document établissant qu ’ il percevait le revenu minimum d ’ insertion et que seule la perte de revenus tirés d ’ une activité licite peut être réparée ;
Qu ’ il y a lieu par conséquent de rejeter le recours formé au titre du préjudice matériel ;
Sur la réparation du préjudice moral :
Attendu que M. X... fait valoir que la détention, qui est une première expérience carcérale a été pénible, qu ’ il a été privé de sa vie de famille, et a subi une atteinte à son honneur ;
Attendu que le premier président a tenu compte du fait que M. X... subissait une première incarcération, qu ’ il a été privé de sa famille à laquelle il est très attaché, et a pris en considération les conditions difficiles de son incarcération eût égard à la vétusté de l ’ établissement dans lequel il a été détenu ;
Que le préjudice moral de l ’ interessé sera plus justement réparé par l ’ allocation de la somme de 10 000 euros ;
PAR CES MOTIFS : DECLARE le recours formé par M. Ozcan X... recevable ;
ACCUEILLE partiellement le recours de M. Ozcan X..., et statuant à nouveau ;
ALLOUE à M. Ozcan X... la somme de 10 000 EUROS (DIX MILLE EUROS) au titre de son préjudice moral ;
REJETTE le recours pour le surplus ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 20 octobre 2008 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.
Le président Le rapporteur M. Breillat Mme Vérité Le greffier Mme Bureau