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30/09/2008 | FRANCE | N°06-84789

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 septembre 2008, 06-84789


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Noël,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 2 mai 2006, qui, pour recel, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires et les observations complémentaires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 242-6-3° du code de commerce, 321-1 d

u code Pénal, 459 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Noël,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 2 mai 2006, qui, pour recel, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires et les observations complémentaires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 242-6-3° du code de commerce, 321-1 du code Pénal, 459 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse aux conclusions, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Noël X... coupable de recel d'abus de biens sociaux ;

"aux motifs que pour contester l'analyse retenue par les premiers juges de la perception d'un complément de prix par le biais de l'indemnité de 800 000 francs, il a toujours souhaité rester en activité quelque temps ; qu'il est manifeste que le prévenu a exprimé cette intention d'autant qu'il avait développé l'activité export de la concession considérée comme indispensable dans un premier temps et qu'il va d'ailleurs continuer à oeuvrer jusqu'à la signature des actes ; que cependant dès avant cette signature rien n'allait plus entre les parties de l'aveu même du prévenu sachant que M. Y... expliquera que conserver le cessionnaire était une hérésie ; qu'ainsi Jean-Noël X... pouvait fort bien, s'il faisait effectivement de son emploi ou de sa collaboration une condition sine qua non de la cession, se rétracter ; qu'il est exact que le prix des parts sera minoré suite à l'audit de M. Z... et sur intervention du groupe VAG mais il convient de garder présent à l'esprit que le prévenu avait des prétentions initiales de plus de 7 millions de francs et avait des engagements notamment de cautions qu'il souhaitait dénouer ; que le prix des parts est une chose, il peut s'y ajouter un supplément qualifié généralement de « goodwill » laissé à son habillage juridique à la sagesse des parties ; que s'agissant de l'incident qui aurait motivé la rupture entre les parties et tenant au refus du prévenu de remettre des chèques liés à la vente des véhicules MLI dès lors que M. Y... ne souhaitait pas livrer, sa date est des plus incertaine ; que d'ailleurs cet incident qui scellera certes la rupture définitive des relations du prévenu avec M. Y... et l'entreprise ne saurait contredire la lettre de décharge de responsabilité rédigée par le clerc principal de notaire en charge de la rédaction des actes de cession M. A... et ses propres déclarations ; que le courrier découvert au hasard de la procédure et qui avait été déposé dans le coffre ouvert par la SA Scala à la BNP est ainsi libellé : « … risque de requalification sur le plan fiscal et social de l'indemnité de licenciement de 800 000 francs que M. Y... s'engage à verser à Jean-Noël X... dès la réalisation des cessions de parts et d'actions. Cette indemnité peut être assimilée par l'administration fiscale soit à un élément du prix de cession, soit à un salaire taxable au titre de l'IRPP et par voie de conséquence soumise aux cotisations sociales en cas de contrôle de l'URSSAF. » ; que les explications précises de M. A... apportent un éclairage essentiel à la convention entre les parties, dès lors que ce dernier précise qu'au départ il était question d'une convention de partenariat et que le 9 octobre les parties ont fait état d'un contrat de travail auquel il serait immédiatement mis un terme à la signature de la cession avec une indemnité de licenciement déterminée de 800 000 francs ; que l'intéressé ajoute que « cette histoire de licenciement était l'un des éléments qui l'ont fait réagir » en dehors de l'absence de garantie de passif, l'absence de certification des comptes et des conventions de transfert de patrimoine…son souci étant de ne pas engager la responsabilité de l'Etude ; que les explications des prévenus embarrassées, inconciliables et contredites par les faits ne résistent pas à l'analyse ; que le prévenu n'était pas plus dépressif que cela lors de la cession, que chef d'entreprise d'expérience et de surcroît en charge des référés au conseil de prud'hommes il savait pertinemment la portée des actes et documents qu'il signait et dont il soutient vainement qu'il ignorait la teneur ; qu'il voulait percevoir un prix supérieur à celui figurant dans l'acte, qu'il savait que le cessionnaire n'avait aucune surface de telle sorte que la pérennité de l'entreprise était en jeu comme le démontrera la procédure de liquidation peu de temps après ; que M. Y... le reconnaîtra d'ailleurs, le jour de l'audience, en précisant qu'une fois entré dans le mensonge il est difficile d'en sortir, d'où les différentes versions pour expliquer la perception assurée d'un complément de prix sous une forme qui aurait dû être fiscalement intéressante pour Jean-Noël X... qui y avait bien évidemment intérêt ; que, peu importe que le compte courant n'ait pas été débiteur puisque c'était un moyen pour donner plus de crédit à une opération frauduleuse ; qu'il est également parfaitement indifférent que l'Administration fiscale ait retenu une qualification moins intéressante en termes de fiscalité pour le Trésor quant à l'indemnité transactionnelle et qu'elle ait été confirmée par le tribunal administratif de Nice ; qu'en effet le droit pénal est autonome et les décisions de l'administration qui répondent à des impératifs spécifiques ne s'imposent pas au juge de l'ordre judiciaire sur ce plan ; que le prévenu souhaitait tirer le meilleur prix de son entreprise, qu'il connaissait ab initio et en tout cas avant la signature des actes de cession l'impécuniosité de M. Y..., la rupture des concours BNP et l'état de la trésorerie de la SA Scala ; que compte tenu de ce qui précède et quand bien même il a pu encore finaliser quelques opérations dans l'intérêt de la SA Scala il avait pleinement conscience du caractère frauduleux de l'indemnité de licenciement dont le principe et le montant étaient arrêtés concurremment avec les actes de cession des parts sociales, indemnité à caractère de supplément de prix connue de VAG et stigmatisée comme telle par le cabinet Strego ; que c'est cette conscience des faits qui l'amènera à acquiescer à un prétendu compte courant débiteur et à un licenciement avec perception d'une indemnité et un risque de requalification, même s'il n'envisageait pas le risque pénal pour, tout simplement d'une manière détournée percevoir un supplément de prix ; qu'il échet donc de déclarer le prévenu coupable du délit de recel d'abus de biens sociaux pour un montant de 800 000 francs et de le relaxer pour le surplus de 650 000 francs afférent au compte courant ;

"alors que, d'une part, la cour qui a expressément reconnu que Jean-Noël X... avait bien eu l'intention de continuer à travailler pour la société Scala après avoir cédé les actions de cette personne morale et qu'il avait effectivement oeuvré pour cette entreprise avec laquelle il avait signé un contrat de travail, a violé l'article L. 242-6-3° du code de commerce en prétendant que le règlement partiel de l'indemnité transactionnelle acquitté par cette personne morale à la suite de son licenciement, était constitutif d'un abus de biens sociaux alors qu'il ne s'agissait que du règlement d'une dette sociale exclusif d'une telle infraction ;

"alors que, d'autre part, la cour a entaché sa décision d'un défaut de motifs et d'un défaut de réponse aux conclusions en invoquant l'autonomie du droit pénal par rapport aux décisions de l'Administration pour refuser de tenir compte d'un jugement du tribunal administratif de Nice qui était invoqué dans les conclusions d'appel du prévenu et qui avait qualifié l'indemnité transactionnelle qu'il avait perçue, de complément de rémunération plutôt que de complément de prix de ses actions, violant ainsi l'article 459 du code de procédure pénale ;

"alors que, en outre, le prévenu n'ayant aucune raison de renoncer à la vente de ses actions dès lors que le cessionnaire acceptait, conformément à ses voeux, de signer avec lui une convention de partenariat et un contrat de travail lui permettant de continuer à exercer son activité au sein de l'entreprise qu'il avait créée, la cour a entaché sa décision d'une contradiction et d'un défaut de motifs en lui reprochant de ne pas s'être rétracté ;

"et alors qu'enfin, le demandeur ayant dans ses conclusions d'appel, expliqué qu'il résultait des propres déclarations de son coprévenu M. Y..., que l'incident qui avait provoqué la rupture de son contrat de travail s'était produit le 10 octobre 1997, la cour, qui n'a pas cru devoir s'expliquer sur ce moyen afin d'émettre implicitement un doute sur l'existence de cette rupture a ainsi violé l'article 459 du code de procédure pénale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 000 euros la somme que Jean-Noël X... devra payer à la société civile professionnelle Crozat-Barault-Maigrot, ès qualités de liquidateur de la société Scala Automobiles, partie civile, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Beauvais conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-84789
Date de la décision : 30/09/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 02 mai 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 sep. 2008, pourvoi n°06-84789


Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.84789
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