COUR DE CASSATION
06 CRD 072
Audience publique du 26 mai 2008 Prononcé au 23 juin 2008
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l’article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, M. Straehli, conseiller, M. Chaumont, conseiller référendaire, en présence de M. Blais, avocat général et avec l’assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
Statuant sur le recours formé par :
- Monsieur Axel X...,
contre la décision du premier président de la cour d'appel de Douai, en date du 9 octobre 2006, qui lui a alloué une indemnité de 14 000 euros en réparation de son préjudice moral, 37 740 euros au titre de son préjudice économique et 12 000 euros au titre des frais de défense, sur le fondement de l’article 149 du code précité, ainsi qu'une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 26 mai 2008, l'avocat du demandeur ne s'y étant pas opposé ;
Vu la décision de la commission nationale de réparation des détentions, du 27 avril 2007, qui a alloué à M. X... la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi que 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et qui a ordonné une expertise sur le préjudice corporel ;
Vu le rapport déposé par M. Michel Y..., expert agréé auprès de la cour d'appel de Rennes, le 9 janvier 2008 ; Vu la notification aux parties dudit rapport, en application des articles 156 et suivants du code de procédure pénale ;
Vu les conclusions de Me Desse-Carmignac, avocat au Barreau d'Avesnes-sur-Helpe, représentant M. X... ;
Vu les conclusions de l’agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu la notification de la date de l’audience, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l’agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l’audience ;
Monsieur X... ne comparaît pas personnellement. Il est représenté à l’audience par Me Desse-Carmignac conformément aux dispositions de l’article R.40-5 du code de procédure pénale ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chaumont, les observations de Me Desse-Carmignac, avocat, représentant M. X..., celles de Me Couturier-Heller, avocat représentant l’agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l’avocat général Blais, l'avocat du demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION,
Attendu que M. X... sollicite, au vu du rapport de l’expert, l’allocation de la somme de 22 400 euros en réparation de son préjudice corporel, ainsi que 1 500 euros sur le fondement de 700 du code de procédure civile ;
Attendu que l’agent judiciaire du Trésor, comme l’avocat général, conclut au rejet de ces demandes ;
Attendu qu’il résulte du rapport de l’expert qu’après sa remise en liberté, M. X... a su “mobiliser des capacités de défense qui lui ont permis de s’épargner une décompensation sur un mode pathologique”; qu’ainsi, il a déménagé, fait construire une maison, créé une entreprise, et bâti une nouvelle vie peu éloignée de celle qu’il menait avant son incarcération; que, s’il a consulté un psychologue d’octobre 2002 à septembre 2004, il n’est pas suivi médicalement ;
Que le docteur Y... relève également que les troubles décrits par M. X... témoignent d’une “dépression réactionnelle à forme mineure” , telle que des “comportements d’évitement, révélant des traits caractérisant une personnalité de type phobique”, qui ont sans doute été accentués depuis l’incarcération; qu’il décrit aussi “une propension à l’irritabilité”, et "l’augmentation d’anticipations anxieuses”; qu’il conclut à l’existence d’une incapacité permanente partielle résiduelle évaluée à 7 % ;
Attendu cependant que les troubles résiduels décrits par l’expert ne sont pas constitutifs d’un préjudice corporel, qui correspond à un déficit psychique séquellaire permanent, lié à un retentissement majeur sur la vie quotidienne de la victime; qu’ils ont déjà été pris en compte pour l’évaluation du préjudice moral, et ne peuvent, en conséquence, donner lieu à une nouvelle indemnisation ;
Attendu qu’en conséquence, la demande en réparation du préjudice corporel sera rejetée ;
Attendu qu’il n’y a pas lieu de faire une nouvelle application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que l’équité commande de laisser les dépens, qui comprennent les frais d’expertise, à la charge du Trésor public ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE la demande de M. Axel X... en réparation du préjudice corporel ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens, qui comprennent les frais d’expertise, à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 23 juin 2008 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.
Le président Le rapporteur M. Breillat M. Chaumont Le greffier Mme Bureau