LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 3 octobre 2006), que M. X... a formé opposition à une contrainte qui lui avait été notifiée le 6 novembre 2001 par la Réunion des assureurs maladie de la Réunion (RAMR) en vue d'obtenir paiement de cotisations relatives à la période du 1er avril 1993 au 31 mars 2001 et des majorations de retard afférentes ;
Attendu qu'il fait grief à l'arrêt de valider cette contrainte alors, selon le moyen :
1°/ qu' en vertu des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, tout acte ou poursuite en recouvrement de cotisations dues par un travailleur non salarié est obligatoirement précédé par une mise en demeure adressée à la personne même du débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'aux termes de l'article 670 du code de procédure civile, la notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; qu'en l'espèce, en l'absence de signature de l'avis de réception par le destinataire de la mise en demeure expédiée à une adresse erronée, la cour d'appel aurait dû faire droit à l'opposition formée par M. X... à l'encontre de la contrainte en ce qu'elle faisait suite à ces documents ; qu'en retenant, pour décider le contraire, que les dispositions de l'article 670-1 du code de procédure civile ne sont pas applicables aux mises en demeure, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale et 670 du code de procédure civile ;
2°/ que la mise en demeure ainsi que la contrainte délivrée à la suite d'une mise en demeure restée sans effet doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la seule précision du montant des cotisations et majorations réclamées est donc insuffisante ; qu'en retenant le contraire pour valider la contrainte litigieuse, la cour d'appel a violé l'article les articles L. 244-2 et suivants du code de la sécurité sociale ;
3°/ que la mise en demeure adressée par une caisse d'assurance maladie à un travailleur indépendant ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les trois années qui précèdent son envoi ; qu'en l'espèce en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée par M. X..., si la prescription relative aux cotisations réclamées au titre des deuxième et troisième trimestres 1993 n'était pas déjà acquise à la date d'envoi de la mise en demeure du 29 octobre 1996, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 244-3 et R. 612-9 du code de la sécurité sociale ;
4°/ que ce n'est que si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification que le directeur de l'organisme créancier peut décerner une contrainte au cotisant ; qu'en l'espèce, même si l'essentiel des mises en demeure n'étaient pas parvenues à destination faute d'avoir été envoyées à l'adresse appropriée, il n'était pas possible de dire que les demandes de la caisse étaient demeurées sans effet puisque M. X... avait saisi la commission de recours amiable de cet organisme sociale social ; qu'aussi en décidant que la caisse avait pu émettre des contraintes à l'encontre de M. X... nonobstant sa saisine de la commission de recours gracieux de ladite caisse, la cour d'appel a violé l'article R 133-3 du code de la sécurité sociale ;
5°/ que seul peut émettre une contrainte celui qui a bénéficié d'une délégation de pouvoir d'une partie titulaire de ce pouvoir ; qu'en l'espèce, M. X... avait fait valoir qu'il résultait de la délégation de pouvoirs produite aux débats par la caisse que M. Y..., signataire de la contrainte et désigné comme le «représentant qualifié de la RAM de la Réunion» avait reçu délégation de pouvoirs pour signer notamment des contraintes de M. Jean-François A..., directeur du GAMEX, lequel n'est pas un organisme de sécurité sociale mais une simple Mutuelle dont le directeur n'est pas agréé par les autorités de l'Etat pour décerner des contraintes ou déléguer le pouvoir de le faire ; qu'en validant la contrainte litigieuse sans s'expliquer sur l'impossibilité pour M. A... de déléguer un pouvoir à cet effet à son signataire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 244-3 et D. 253-6 du code de la sécurité sociale ;
6°/ que les juges du fond ne peuvent se fonder sur des pièces produites par une partie dès lors qu'il n'apparaît ni des mentions de l'arrêt ni du dossier de la procédure que ces pièces ont été communiquées à la partie adverse ou que celle-ci a eu connaissance de leur production ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que la contrainte dont le signataire ne justifie pas d'une délégation de pouvoir donnée par le directeur de l'organisme concerné antérieurement à sa délivrance est nulle et qu'en l'espèce, la seule délégation de pouvoir régulièrement établie au profit de M. Y... et produite aux débats prenait effet au 8 mai 2002, c'est-à-dire à une date postérieure à celle de la contrainte litigieuse ; qu'aussi en se fondant sur un document qui n'avait pas été communiqué à M. X... et qui établissait que M. Y... aurait bénéficié d'une délégation de pouvoir depuis le 23 novembre 1999, la cour d'appel a violé l'article 132 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en premier lieu, après avoir exactement observé que la mise en demeure, contrairement à la contrainte qui lui fait éventuellement suite, n'est pas de nature contentieuse de sorte que les dispositions de l'article 670-1 du code de procédure civile ne lui sont pas applicables, la cour d'appel en a déduit à bon droit que les mises en demeure litigieuses, envoyées à l'adresse du débiteur des cotisations, devaient produire leurs effets ;
Qu'en deuxième lieu, l'article R. 612-9 du code de la sécurité sociale prévoyant que la mise en demeure doit donner le détail des sommes réclamées au titre des cotisations et des majorations de retard, la cour d'appel, qui a constaté que les mises en demeure litigieuses permettaient à M. X... d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, en a justement déduit qu'elles répondaient aux exigences de ce texte ;
Qu'en troisième lieu, il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que M. X... avait soutenu devant la cour d'appel que les cotisations réclamées au titre des deuxième et troisième trimestres 1993 étaient prescrites ; que cette branche nouvelle et mélangée de fait et de droit, est comme telle irrecevable ;
Qu'en quatrième lieu, la cour d'appel ayant relevé que la commission de recours amiable avait été saisie le 14 août 2001, il en résulte qu'à la date de délivrance de la contrainte ce recours avait fait l'objet d'une décision implicite de rejet par expiration du délai de l'article R. 142-6 du code de la sécurité sociale ; que la quatrième branche est inopérante ;
Qu'en dernier lieu, le GAMEX étant un organisme conventionné au sens de l'article R. 612-11 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel, qui a observé que son directeur général avait donné pouvoir au signataire de la contrainte par une délégation du 23 novembre 1999, mentionnée dans les conclusions de la caisse, et dont la portée, s'agissant d'une procédure orale, est présumée avoir été contradictoirement débattue à l'audience, a justement décidé que cette contrainte avait été régulièrement délivrée ;
D'où il suit que le moyen pour partie irrecevable n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives de M. X... et de la caisse RSI de la Réunion ; condamne M. X... à payer à la Réunion des assureurs maladie de la Réunion la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille huit.