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17/03/2008 | FRANCE | N°7C-RD080

France | France, Cour de cassation, Commission reparation detention, 17 mars 2008, 7C-RD080


COUR DE CASSATION
07 CRD 080
Audience publique du 25 février 2008 Prononcé au 17 mars 2008
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, Mme Vérité, M. Chaumont, conseillers référendaires, en présence de M. Blais, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
INFIRMATION PARTIELLE et rejet des recours formés par M. Jean-Marc X..., l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier présid

ent de la cour d'appel de Limoges en date du 12 juin 2007 qui a alloué à M. Jean-...

COUR DE CASSATION
07 CRD 080
Audience publique du 25 février 2008 Prononcé au 17 mars 2008
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, Mme Vérité, M. Chaumont, conseillers référendaires, en présence de M. Blais, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
INFIRMATION PARTIELLE et rejet des recours formés par M. Jean-Marc X..., l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Limoges en date du 12 juin 2007 qui a alloué à M. Jean-Marc X... une indemnité de 152 002,64 euros sur le fondement de l'article 149 du code précité ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 25 février 2008 le demandeur et son avocat ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de Me Gillet, avocat au Barreau de Limoges, représentant M. X... ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Vérité, les observations de Me Gillet, avocat assistant M. X..., celles de M. X... comparant et de Me Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Blais, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,
Attendu que par décision du 12 juin 2007, le premier président de la cour d'appel de Limoges a alloué à M. Jean-Marc X... les sommes de 62 002,64 euros et 90 000 euros au titre du préjudice matériel et moral, ainsi que celle de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à raison d'une détention provisoire effectuée du 14 novembre 2002 au 20 juin 2006, pour des faits délictuels ayant donné lieu à un jugement du tribunal correctionnel de Limoges du 25 novembre 2005, et des faits criminels ayant donné lieu à un arrêt d'acquittement de la cour d'assises du département de la Haute Vienne du 20 juin 2006, ces deux décisions étant devenues définitives ;
Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a formé un recours régulier contre la décision du premier président ; qu'il demande la réduction de la période de détention indemnisable dès lors que les délits commis sont de nature à justifier la mesure de détention provisoire à hauteur de deux ans ; qu'il sollicite la diminution du montant accordé au titre du préjudice moral ; que, sur le préjudice matériel, il fait valoir que seule la perte de salaire net peut être indemnisée, demande de réduire à six mois la durée de la privation d'emploi postérieure à la détention provisoire en lien direct avec elle, et de déduire les indemnités de chômage versées par l'Assedic ;
Attendu que M. X... a également formé un recours régulier ; qu' il demande de confirmer cette décision en ce que le premier président a retenu que la durée de la détention provisoire était en relation avec les seuls faits d'assassinat reprochés, de fixer à 150 euros par jour le montant de l'indemnisation du préjudice moral, de considérer que la privation d'emploi en rapport direct avec la détention provisoire s'est prolongée pendant deux ans après la date de sa mise en liberté, et de porter à 1 500 euros la somme qui lui a été accordée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il sollicite la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés dans le cadre du présent recours ;
Attendu que l'avocat général conclut que n'est indemnisable que la période dépassant le délai maximum de détention provisoire pour les infractions à la législation sur les stupéfiants, et que la perte d'une chance de retrouver un emploi paraît avoir été raisonnablement évaluée à un an ;
Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; que cette indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral directement causé par la privation de liberté ;
Sur la durée de la détention provisoire indemnisable :
Attendu que M. X... a été placé, et maintenu, en détention provisoire du chef de plusieurs infractions ;
Attendu que la durée de la détention provisoire ne pouvant dépasser la durée maximale autorisée pour les infractions qui ont donné lieu à condamnation, la durée de la détention provisoire indemnisable retenue par le premier président doit être réduite de deux ans, correspondant à la durée de détention maximale autorisée pour les faits délictuels pour lesquels M. X... a été condamné ;
Attendu qu'il n'appartient pas à la commission, de s'interroger sur la probabilité d'un placement en détention de M. X... dans l'hypothèse où celui-ci aurait été mis en examen pour les seuls délits ;
Attendu qu'en conséquence il y a lieu de fixer à dix-neuf mois et sept jours (soit 577 jours), la durée de la détention provisoire indemnisable ;
Sur le préjudice matériel :
Sur la perte de salaires :
Attendu qu'il y a lieu d'indemniser M. X... de la perte de son salaire net, que son contrat de travail à durée indéterminée du 2 novembre 2002 mentionne un salaire brut de 1 107,19 euros par mois, qu'il y a lieu d'évaluer le salaire net à 885,75 euros mensuels ;
Attendu que, compte tenu de la durée de la détention provisoire indemnisable, il y a lieu d'allouer à M. X... la somme de 16 829,25 euros (885,75 x 19) + 206,67 euros, (885,75 x 7/30) soit la somme de 17 035,92 euros au titre de la perte de salaires ;
Sur la perte de chance de retrouver un emploi :
Attendu que la détention de M. X... lui a fait perdre le bénéfice d'un emploi stable, qu'il établit que ne pouvant retrouver un emploi dans son secteur d'activité après une interruption d'activité professionnelle de quatre ans, il a suivi une formation et s'est inscrit à l'ANPE en qualité de chômeur non indemnisé ;
Attendu que la commission dispose des éléments suffisants pour arrêter l'indemnité destinée à compenser la perte de chance de retouver pendant un certain temps un emploi à la somme de 6 900 euros ;
Sur le préjudice moral :
Attendu que les préjudices liés au déroulement de la procédure judiciaire, ou causés par des reportages télévisuels et des articles de presse, ne sont pas indemnisables au titre de l'article 149 du code de procédure pénale ;
Attendu que s'agissant d'une première incarcération, intervenue à l'âge de vingt ans, compte tenu des retentissements d'ordre psychologique subis, établis par l'attestation du docteur Gillet, et de la durée de la détention indemnisable, il y a lieu d'allouer à M. X... la somme de 45 000 euros ;
Sur les frais irrépétibles exposés devant le premier président :
Attendu que l'équité commande de porter à 1 500 euros, le montant de la somme allouée à M. X... à ce titre ;
Sur les frais irrépétibles exposés devant la commission :
Attendu que, compte tenu de l'issue de son recours, il y a lieu de rejeter la demande de M. X..., formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par ces motifs :
ACCUEILLE partiellement les recours de M. Jean-Marc X... et de l'agent judiciaire du Trésor, et statuant à nouveau ;
ALLOUE à M. Jean-Marc X... les sommes de 17 035,92 euros (dix-sept mille trente cinq euros quatre vingt douze centimes) au titre de la perte de salaires, 6 900 euros (six mille neuf cents euros) au titre de la perte de chance de retrouver un emploi, 45 000 euros (quarante cinq mille euros) au titre du préjudice moral et 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais irrépétibles exposés devant le premier président ;
REJETTE les recours pour le surplus ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 17 mars 2008 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.
Le président M. Breillat Le rapporteur Mme Vérité Le greffier Mme Bureau


Synthèse
Formation : Commission reparation detention
Numéro d'arrêt : 7C-RD080
Date de la décision : 17/03/2008
Sens de l'arrêt : Infirmation partielle

Analyses

REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION - Préjudice - Appréciation - Critères - Durée de la détention provisoire indemnisable - Détermination

Lorsqu'une personne a été placée en détention provisoire pour des faits de nature délictuelle, pour lesquels elle a été condamnée, et pour des faits de nature criminelle, qui ont conduit à un arrêt d'acquittement, il n'appartient pas au juge chargé de la réparation des détentions de s'interroger sur la probabilité d'un placement en détention dans le cas où l'intéressé aurait été mis en examen du chef des seuls délits


Références :

articles 149 et 150 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 12 juin 2007

Sur l'exclusion du contrôle du juge chargé de la réparation de la détention sur l'opportunité d'une décision de placement en détention, à rapprocher :Com. nat. de réparation des détentions, 31 mars 2006, n° 05CRD059, Bull. crim. 2006, n° 5 (1) (infirmation), et les décisions citées


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission reparation detention, 17 mar. 2008, pourvoi n°7C-RD080, Bull. civ. criminel 2008, Commission nationale de réparation des détentions, n°1
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles criminel 2008, Commission nationale de réparation des détentions, n°1

Composition du Tribunal
Président : M. Breillat
Avocat(s) : Me Gillet, Me Couturier-Heller

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:7C.RD080
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