LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 24 novembre 2006), que M. X..., victime d'un accident du travail, a subi une intervention chirurgicale avec transfusion de sang ; qu'en 1988 il a contracté deux prêts immobiliers auprès de la société Crédit mutuel ; qu'à cette occasion la société Assurances du Crédit mutuel (ACM) a accepté de garantir le risque décès moyennant une surprime, mais a refusé d'assurer le risque incapacité de travail-invalidité deuxième catégorie ; qu'en 1990, le diagnostic de l'hépatite C a été posé ; que le 29 décembre 1997, M. X... a été classé par la sécurité sociale en invalidité de deuxième catégorie ; que prétendant que les conditions d'assurance défavorables imposées par la société ACM avaient pour origine sa pathologie hépatique, il a fait assigner l''Etablissement français du sang (EFS) devant le tribunal de grande instance afin d'obtenir réparation des préjudices résultant de sa contamination par le virus de l'hépatite C ; que la société Axa, venant aux droits de l'UAP, assureur de l'EFS, est intervenue à l'instance ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en réparation de son préjudice financier, alors, selon le moyen :
1°/ que la victime d'une contamination hépatique subit un préjudice financier en lien avec ladite contamination quand, du fait de cette contamination, un organisme financier lui a refusé l'octroi d'une garantie invalidité et que, par la suite, elle est victime de l'invalidité non garantie ; qu'il importe alors peu que la survenance de cette invalidité ne soit pas liée à la contamination ; que dès lors que l'absence de couverture du risque encouru est liée à la contamination, et que ce risque se réalise, la personne en cause subit un préjudice en lien avec la contamination ; qu'au cas présent, en considérant, au contraire, que, dès lors que l'inaptitude au travail de M. X... et son invalidité de catégorie 2 attribuée en 1997 n'auraient pas été liées à la contamination du demandeur au pourvoi par le virus de l'hépatite C, celui-ci n'aurait subi aucun préjudice en lien direct et certain avec ladite contamination, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, en violation des articles 1382 et 1383 du code civil ;
2°/ que le juge doit respecter en toutes circonstances le principe de la contradiction ; qu'il ne doit pas, en particulier, relever un moyen d'office sans appeler les parties à formuler des observations ; que méconnaît ces principes, en violation de l'article 16 du code de procédure civile, la cour d'appel qui déclare non probante la lettre du médecin de la société ACM aux termes de laquelle la "tarification" appliquée à M. X... "est motivée par l'hépatite C" aux motifs que le signataire de cette missive n'aurait pas été habilité à décider d'une tarification, sans appeler les parties à formuler des observations sur ce moyen qui n'avait été soulevé par aucune d'entre elles ;
3°/ que prive sa décision de motifs le juge qui se prononce par un motif dubitatif ; qu'en écartant la lettre précitée au motif que "il apparaît surprenant" que le médecin-conseil de la société ACM ait imputé la tarification litigieuse à l'affection subie par M. X..., la cour d'appel s'est bornée à exprimer un doute, sans procéder par voie d'affirmation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que dénature les termes de la lettre du comité des rentes de la caisse primaire d'assurance maladie de Strasbourg, et viole l'article 1134 du code civil, la cour d'appel qui affirme que "M. X... percevait depuis 1982 une pension d'invalidité de catégorie 1 au taux de 15 %" cependant que selon le document précité, les sommes versées à M. X... correspondaient à "rente" d'accident du travail au "taux" de "7,5° %" ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'il résulte du rapport d'expertise de M. Y... déposé le 9 janvier 2003 que l'inaptitude au travail de M. X... et l'invalidité de catégorie 2 attribuée en 1997 par la sécurité sociale ont pour origine les séquelles de l'accident du travail du 1er juillet 1981 au cours duquel M. X... a subi notamment une fracture du bassin ainsi que des fractures, avec un important déplacement, des branches ilio et ischio-pubiennes et des ailerons sacrés, et accessoirement avec un diabète devenu insulino-dépendant depuis 1996 ; que M. X... percevait depuis 1982 une pension d'invalidité de catégorie 1 au taux de 15 % pour les séquelles de son accident du travail ; que cette situation était à elle seule de nature à justifier, lors de la souscription des prêts immobiliers en 1988, l'application d'une surprime d'assurance et le refus de l'assureur de garantir une invalidité de catégorie 2 ; que le courrier du 11 mai 2004 de M. Z... - seul élément nouveau produit par l'assuré - n'emporte pas la conviction dès lors qu'il impute la tarification des contrats de 1988 à la seule contamination par l'hépatite C, non identifiée comme telle à l'époque, sans mentionner l'invalidité de M. X..., déjà acquise depuis 1982, pour les séquelles de son accident du travail ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis aux débats, la cour d'appel, par une décision motivée, dépourvue de motifs hypothétiques, sans porter atteinte au principe de la contradiction, a pu déduire que le préjudice financier allégué n'était pas en rapport avec la contamination par le virus de l'hépatite C ;
D'où il suit que le moyen, surabondant en sa deuxième branche et inopérant en sa quatrième branche en ce qu'il se borne à dénoncer une erreur matérielle qui n'a pas d' incidence sur la solution du litige, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives de M. X... et de la société Axa France IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille huit.