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18/12/2007 | FRANCE | N°07-80395

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 décembre 2007, 07-80395


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jacques,
- Y... Henri,

contre l'arrêt de cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre correctionnelle, en date du 11 décembre 2006, qu les a condamnés, chacun, pour blessures involontaires, à six mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièc

es de procédure qu'un salarié de la société X... a été grièvement blessé alors qu'il était occupé à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jacques,
- Y... Henri,

contre l'arrêt de cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre correctionnelle, en date du 11 décembre 2006, qu les a condamnés, chacun, pour blessures involontaires, à six mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'un salarié de la société X... a été grièvement blessé alors qu'il était occupé à des travaux de confortement d'une tranchée rocheuse, sur un chantier ferroviaire ouvert par la SNCF ; qu'à la suite de cet accident, ont été notamment poursuivis du chef de blessures involontaires, Henry Y..., gérant de la société en charge du chantier et Jacques X..., dirigeant d'une entreprise sous-traitante ; qu'ils ont été relaxés par jugement du 18 novembre 2004 ; qu'ayant constaté que le tribunal correctionnel, dans le dispositif de sa décision, les avait néanmoins condamnés à des réparations civiles « in solidum » avec d'autres prévenus déclarés coupables, Jacques X... et Henry Y... ont saisi, sur le fondement de l'article 710 du code de procédure pénale, ce tribunal qui a fait droit à leur demande de rectification du dispositif du jugement, sans que les autres parties eussent été appelées en la cause ; qu'appel ayant été relevé, par le ministère public, des seules dispositions du jugement ayant renvoyé les prévenus des fins de la poursuite, la cour d'appel a déclaré les demandeurs coupables ; qu'elle a ensuite constaté que les jugements rectificatifs n'avaient pas autorité de la chose jugée à l'égard de la victime et ne lui étaient pas opposables et qu'en l'absence d'appel des prévenus, les dispositions civiles prononcées à leur encontre étaient définitives ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jacques X..., pris de la violation des articles 221-6 et 222-19 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jacques X... coupable des faits qui lui étaient reprochés sous la prévention d'avoir involontairement causé à Philippe Z... une atteinte à son intégrité physique entraînant une incapacité totale de travail personnel supérieure à trois mois, en s'abstenant de placer un couvre-joint sur la passerelle située à l'entrée du tunnel, d'élaborer un plan de prévention et de procéder à une inspection commune des lieux avant l'exécution des travaux, et l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs que Jacques X..., à qui incombait, comme à tout chef d'entreprise, de veiller personnellement à la sécurité de ses salariés, était tenu en tant que chef d'entreprise extérieure, de ne pas commencer les travaux, sans avoir préalablement participé à la réunion et à l'établissement du plan de prévention et, dès lors qu'il ne recevait pas de convocation, d'exiger de participer à ces opérations, d'autant que l'entreprise dont il est le gérant travaille principalement pour la SNCF et qu'il a reconnu lui-même qu'habituellement, comme il l'a déclaré, déduire de ce défaut de convocation et de communication d'une absence de risque majeur alors qu'il savait pertinemment que les travaux confiés à son entreprise se déroulaient au-dessus d'une caténaire ; qu'il en résulte que Jacques X... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de la nature de sa mission et de sa fonction, de sa compétence ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ; qu'il a ainsi contribué à causer indirectement le décès de la victime, en ne prenant pas les mesures qui eussent permis d'éviter le dommage et a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, de sorte qu'est établi à son encontre, en tous ses éléments constitutifs, le délit d'homicide involontaire, au regard des articles visés à la prévention et de l'article 121-3 du code pénal dans sa rédaction issue de la loi 2000-647 du 10 juillet 2000 ;

"alors que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut au défaut de motifs ; qu'ainsi la cour d'appel ne pouvait, tout à la fois, dans les motifs de l'arrêt déclarer Jacques X... coupable d'homicide involontaire et dans le dispositif le déclarer coupable de blessures involontaires ;

Sur le second moyen de cassation proposé pour Jacques X..., pris de la violation des articles 111-4, 121-3 et 222-19 du code pénal, R. 237-2 et R. 237-6 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jacques X... coupable des faits qui lui étaient reprochés sous la prévention d'avoir involontairement causé à Philippe Z... une atteinte à son intégrité physique entraînant une incapacité totale de travail personnel supérieure à trois mois, en s'abstenant de placer un couvre-joint sur la passerelle située à l'entrée du tunnel, d'élaborer un plan de prévention et de procéder à une inspection commune des lieux avant l'exécution des travaux, et l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs que plusieurs fautes peuvent concourir à la réalisation d'un dommage ; qu'il résulte des articles R. 237-2 et R. 237-6 du code du travail que si l'entreprise principale est chargée de la coordination de l'ensemble des entreprises extérieures, chacune des entreprises extérieures, doit, avec l'entreprise principale, participer à une réunion commune à toutes les entreprises destinée à prévoir les risques et les pallier, permettant d'établir un plan de prévention commun; qu'ainsi, chacune des entreprises extérieures est tenue d'assurer la sécurité de son propre personnel ; que si l'accident a été rendu possible par l'absence d'obturation de l'interstice situé au-dessus de la caténaire, susceptible de provoquer une électrocution d'une personne tenant un objet métallique rentrant en contact avec la caténaire, et si cette absence incombe exclusivement à la SCNF et à son préposé, il est en revanche certain que l'accident est dû aussi, pour partie, à l'absence de réunion commune et d'établissement d'un plan de prévention avec l'entreprise X..., laquelle réunion aurait permis de mettre à ce jour ce risque et d'y remédier, et en tout cas de prévenir les salariés du risque encouru ; qu'en tout état de cause, il appartenait à Jacques X..., comme à tout chef d'entreprise, de veiller personnellement à la sécurité de ses salariés, et donc, en sa qualité de chef d'entreprise extérieure, de ne pas commencer les travaux sans avoir préalablement participé à la réunion et à l'établissement du plan de prévention imposés par les articles précités et, dès lors qu'il ne recevait pas de convocation, d'exiger de participer à ces opérations, d'autant que l'entreprise dont il est le gérant travaille principalement pour la SNCF et qu'il a reconnu lui-même qu'habituellement la SNCF le convoquait par lettre recommandée ; qu'il ne pouvait valablement, comme il l'a déclaré, déduire de ce défaut de convocation et de communication une absence de risque majeur, alors qu'il savait pertinemment que les travaux confiés à son entreprise se déroulaient au dessus d'une caténaire ; qu'il en résulte que Jacques X... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de la nature de sa mission et de sa fonction, de sa compétence ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, de sorte qu'il a ainsi contribué à causer indirectement le décès de la victime, en ne prenant pas les mesures qui eussent permis d'éviter le dommage et a ainsi commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer ;

"alors que la faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité ne peut être retenue à l'encontre d'une personne, non visée par une obligation spécifique de prudence et de sécurité imposée par la loi et le règlement, qui n'a pas exigé de la personne soumise à cette obligation que celle-ci soit respectée, sauf à imposer à un tiers une obligation que le législateur n'a pas envisagée ; qu'en l'espèce, les articles R. 237-2 et R. 237-6 du code du travail imposent au dirigeant de l'entreprise utilisatrice, en l'occurrence la SNCF, de prendre des initiatives et de maîtriser les opérations de contrôle de sécurité sur le chantier sur lequel interviennent plusieurs entreprises extérieures et de leur communiquer un plan de prévention de sécurité avant de les convoquer pour participer à l'inspection générale des lieux ; qu'ainsi c'est à tort que la cour d'appel a déclaré Jacques X..., gérant d'une entreprise extérieure, coupable d'avoir
commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une
particulière gravité, à l'origine des blessures involontaires reprochées, pour ne pas avoir pris les mesures qui s'imposaient, en l'occurrence pour ne pas avoir exigé de participer à une réunion à laquelle il n'avait pas été convié et pour avoir commencé les travaux sans avoir participé à l'établissement du plan de prévention des risques qui ne lui avait pas été communiqué, tandis que ces mesures s'adressaient exclusivement à l'entreprise utilisatrice" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Henri Y..., pris de la violation des articles 121-3 et 222-19 du code pénal, R. 237-1, R. 237-2, R. 237-5, R. 237-6, R. 237-7 et R. 237-12 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Henri Y... coupable de blessures involontaires et l'a condamné à une
peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs que « il y a lieu, comme l'a fait le tribunal,
d'examiner la prévention au regard, non seulement des textes visés à la prévention, mais aussi de l'article 121-3 du code pénal, tel que modifié par la loi du 10 juin 2000 ; que le chapitre VII du code du travail, sous le titre "prescriptions particulières d'hygiène et de sécurité applicables aux travaux effectués dans un établissement par
une entreprise extérieure" prévoit des règles particulières en cas d'intervention d'une ou plusieurs entreprises dites extérieures dans un établissement d'une entreprise dite utilisatrice ; que l'article R. 237-2 édicté : "Le chef de l'entreprise utilisatrice assure la coordination générale des mesures de prévention qu'il prend et de celles que prennent l'ensemble des chefs des entreprises intervenant dans son établissement. Chaque chef d'entreprise est responsable de l'application des mesures de prévention nécessaires à la protection de son personnel ; cette coordination générale a pour objet de prévenir les risques liés à l'interférence entre les activités, les installations et matériels des différentes entreprises présentes sur un même lieu de travail ; au titre de cette coordination, le chef de l'entreprise utilisatrice est notamment tenu d'alerter le chef de l'entreprise extérieure concernée, lorsqu'il est informé d'un danger grave concernant un
des salariés de cette entreprise, afin que les mesures nécessaires puissent être prises par le ou les employeurs concernés" ; que l'article R. 237-6 prévoit : "Il est procédé, préalablement à l'exécution de l'opération, à une inspection commune des lieux de travail, des installations qui s'y trouvent et des matériels éventuellement mis à la
disposition de la ou des entreprises extérieures. Au cours de cette inspection, le chef d'entreprise utilisatrice délimite le secteur de l'intervention des entreprises extérieures, matérialise les zones de ce secteur qui peuvent présenter des dangers pour leur personnel et leur indique les voies de circulation que pourront emprunter ce personnel
ainsi que les véhicules et engins de toute nature appartenant aux entreprises extérieures ; sont également définies les voies d'accès du personnel de ces entreprises aux locaux et installations définis à l'article R. 237-16 ; il communique aux chefs des entreprises extérieures ses consignes de sécurité applicables à l'opération qui concerneront les salariés de leurs entreprises, à l'occasion de leur travail ou de leurs déplacements ; les employeurs doivent se communiquer toutes informations nécessaires à la prévention, notamment la description des travaux à effectuer, des matériels utilisés et des modes opératoires, dès lors qu'ils ont une incidence sur l'hygiène et la sécurité" ; que l'article R. 237-7 dispose : " Au vu de ces informations et des éléments recueillis au cours de l'inspection, les chefs d'entreprises procèdent en commun à une analyse des risques pouvant résulter de l'interférence entre les activités, les installations et matériels ; lorsque ces risques existent, les employeurs arrêtent d'un commun accord avant le début des travaux le plan de prévention définissant les mesures qui doivent être prises par chaque entreprise en vue de prévenir ces risques ; les mesures prévues par le plan de prévention comportent au moins des dispositions dans les domaines suivants :
1) la définition des phases d'activité dangereuses et les moyens de prévention spécifiques correspondants,
2) l'adaptation des matériels, installations et dispositifs à la nature des opérations à effectuer ainsi que la définition de leurs conditions d'entretien,
3) les instructions à donner aux salariés,
4) l'organisation mise en place pour assurer les premiers secours d'urgence et la description du dispositif mis en place à cet effet par l'entreprise utilisatrice,
5) les conditions de la participation des salariés d'une entreprise aux travaux réalisés par une autre en vue d'assurer la coordination
nécessaire au maintien de la sécurité et notamment de l'organisation du commandement", ; que l'article R. 237-8 prévoit que le plan de prévention doit être établi par écrit et avant le commencement des travaux, lorsque les travaux à exécuter sont au nombre des travaux dangereux figurant sur la liste établie respectivement par arrêté du ministre chargé du travail et par arrêté du ministre de l'agriculture ; qu'aux termes de l'article R. 237-12 : " Pendant l'exécution des opérations, chaque entreprise met en oeuvre les mesures prévues à l'article R. 237-7 ; le chef de l'entreprise utilisatrice s'assure auprès des chefs des entreprises extérieures que les mesures décidées sont exécutées et coordonne les mesures nouvelles qui doivent être prises, si nécessaire, lors du déroulement des travaux ; à cet effet, le chef de l'entreprise utilisatrice organise avec les chefs des entreprises extérieures qu'il estime utile d'inviter selon une périodicité qu'il définit, des inspections et réunions périodiques aux fins d'assurer soit la coordination générale dans l'enceinte de l'entreprise utilisatrice, soit la coordination des mesures de prévention pour une opération donnée, soit à la coordination des mesures rendues nécessaires par les risques liés à l'interférence entre deux ou plusieurs opérations, en fonction des risques ou lorsque les circonstances l'exigent ; les chefs de toutes les entreprises concernées par la ou les opérations en cause sont informés de la date à laquelle ils doivent avoir lieu les inspections et réunions mentionnées à l'alinéa précédent ; lorsqu'ils l'estiment nécessaire en fonction des risques, les chefs des entreprises extérieures peuvent, lorsqu'ils l'estiment nécessaire pour la sécurité de leur personnel, demander au chef de l'entreprise utilisatrice d'organiser de telles réunions ou inspections ; les mesures prises à
l'occasion de cette coordination font l'objet d'une mise à jour du plan de prévention concerné" ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que si l'entreprise principale est chargée de la coordination de l'ensemble des entreprises extérieures, chacune des entreprises extérieures doit, avec l'entreprise principale, participer à une réunion commune à toutes les entreprises destinée à prévoir les risques et à les pallier permettant d'établir un plan de prévention commun ; que, d'autre part, chacune des entreprises extérieures est tenue d'assurer la sécurité de son propre personnel ; que le prévenu Henri Y... ne peut valablement soutenir que l'endroit où s'est passé l'accident ne faisait pas partie du chantier, puisqu'il était nécessaire de s'y rendre pour y placer les projecteurs ; que plusieurs fautes peuvent concourir à la réalisation d'un dommage ; attendu qu'en l'espèce, l'accident a été rendu possible par l'absence d'obturation de l'interstice, situé au dessus de la caténaire, susceptible de provoquer, comme cela s'est produit, une électrocution d'une personne tenant un objet métallique rentrant en contact avec la caténaire ; que si cette absence incombe à la SNCF et son préposé A..., il est en revanche certain que l'accident est dû aussi pour partie à l'absence de réunion commune et d'établissement de plan de prévention avec l'entreprise X... qui aurait permis de mettre à ce jour ce risque, d'y remédier, et en tout cas de prévenir les salariés du risque encouru ; que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, Jacques X..., à qui incombait, comme à tout chef d'entreprise, de veiller personnellement à la sécurité de ses salariés, était tenu en tant que chef d'entrepriseextérieure, de ne pas commencer les travaux, sans avoir préalablement participé à la réunion et à l'établissement du plan de prévention imposés par les articles précités et, dès lors qu'il ne recevait pas de convocation, d'exiger de participer à ces opérations, d'autant que l'entreprise, dont il est le gérant, travaille principalement pour la SNCF et qu'il a reconnu lui-même qu'habituellement la SNCF le convoquait par lettre recommandée ; qu'il ne pouvait valablement, comme il l'a déclaré, déduire de ce défaut de convocation et de communication, une absence de risque majeur alors qu'il savait pertinemment que les travaux confiés à son entreprise se déroulaient au dessus d'une caténaire ; que, comme l'a dit Jacques X..., et comme l'ont constaté les gendarmes, n'importe qui aurait pu être victime d'un tel accident ; que si Jacques X... avait participé à la réunion commune et au plan de prévention, il aurait lui-même pris conscience du risque ce qui lui aurait permis d'éviter d'exposer son salarié à ce même risque qui s'est réalisé en dehors de la présence d' agents SNCF dont l'intervention était prévue plus tard dans la soirée ; que les prévenus ne peuvent valablement mettre en avant qu'aucune disposition n'a été prise dans le plan de prévention concernant l'intervention faite par la victime au lieu où elle a été faite dans la mesure où c'est précisément parce ce qu'il n'y a pas eu la réunion commune, que le risque encouru, parfaitement prévisible, n'a pas été analysé et qu' aucune mesure n'a été prise pour y remédier ; qu'il en résulte que Jacques X... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de la nature de sa mission et de sa fonction, de sa compétence ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ; qu'il a contribué à causer indirectement le décès de la victime en ne prenant pas les mesures qui eussent permis d'éviter le dommage et a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, de sorte qu'est établi à son encontre, en tous ses éléments constitutifs le délit d'homicide involontaire au regard des articles visés à la prévention et de l'article 121-3 du code pénal dans sa rédaction issue de la loi 2000.647 du 10 juillet 2000 ; qu'aux termes de l'article R. 237-2, au cours de l'inspection, les chefs d'entreprises procèdent en commun
à une analyse des risques pouvant résulter de l'interférence entre les activités, les installations et matériels ; lorsque ces risques existent, les employeurs arrêtent d'un commun accord avant le début des travaux le plan de prévention définissant les mesures qui doivent être prises par chaque entreprise en vue de prévenir ces risques ; qu'il en résulte que chacune des entreprises, même si son personnel n'est pas
directement concerné, doit procéder à l'analyse commune des risques et des mesures à prendre pour y remédier ; que l'inspection et le plan de prévention auxquels a participé Henri Y... ne répondaient pas aux exigences légales puisque l'entreprise, Mansuy Père et Fils n'y participait pas ; que le plan de prévention fait avec Mercury Sud prévoyait que le responsable de l'entreprise extérieure ne pouvait autoriser son personnel à s'approcher à moins de trois mètres de la caténaire qu'après réception de la mise hors tension ; que Henri Y... qui savait que l'entreprise Mansuy Père et Fils n'avait pas assisté à la réunion commune, se devait de communiquer le plan de
prévention à son sous-traitant ; qu'il a lui aussi contribué à causer indirectement le décès de la victime en ne prenant pas les mesures qui eussent permis d'éviter le dommage et a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, de sorte qu'est établi à son rencontre, en tous ses éléments constitutifs le délit d'homicide involontaire au regard des articles visés à la prévention et de l'article 121-3 du Code pénal dans sa rédaction issue de la loi 2000.647 du 10 juillet 2000 » ;

"1°) alors qu'une analyse en commun des risques et
l'établissement d'un plan de prévention incombent à l'entreprise utilisatrice et à l'entreprise extérieure dont l'activité est susceptible de présenter un risque pour ses salariés ; qu'en faisant supporter sur la société Mercury Sud, entreprise extérieure, l'obligation d'une analyse en commun des risques dont ses salariés ne sont pas directement concernés pour en déduire que son représentant avait commis une faute qui a contribué à causer indirectement des blessures à un salarié de la société X... à l'occasion de travaux réalisés au profit de la SNCF, entreprise utilisatrice, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen ;

"2°) alors qu'aux termes des articles R. 237-6 et R. 237-7 du code du travail, il est procédé à une inspection commune des lieux
de travail préalable à l'exécution de l'opération puis, au vu des informations recueillies, les chefs d'entreprises procèdent à une analyse en commun des risques et établissent un plan de prévention ; que ces obligations supposent que les sociétés concourent à l'exécution d'une même opération et qu'il existe des risques d'interférences entre les travaux réalisés par les différentes sociétés ; qu'en l'espèce, la société Mercury Sud était chargé du confortement de la tranchée rocheuse située à la tête du tunnel de Cap Roux en bordure de la RN 98 tandis que les travaux qui devaient être réalisés par la société X... consistaient à poser des filets de détection de chute de rochers; qu'en reprochant à Henri Y... d'avoir participé à une réunion avec la SNCF, société utilisatrice, en l'absence de la société X... et ne pas avoir communiqué à cette dernière le plan de prévention qui avait été établi tandis que les sociétés Mercury Sud et X... ne participaient pas à l'exécution d'une même opération, la cour d'appel, qui en déduit une faute ayant indirectement contribué à la réalisation du dommage subi par Philippe Z..., n'a pas légalement justifié sa décision, violant les articles visés au moyen ;

"3°) alors que, les travaux incombant à la société Mercury Sud avaient été initialement programmés à une date antérieure à ceux que devait réaliser la société X... de sorte qu'en reprochant à Henri Y... de ne pas avoir communiqué à la société X... le plan de prévention établi pour les seuls travaux incombant à la société Mercury Sud pour en déduire qu'il avait ainsi contribué à causer indirectement les dommages subis par Philippe Z..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"4°) alors que la responsabilité pénale du fait de blessures involontaires implique un lien de causalité certain entre la faute et le dommage subi par la victime ; qu'en admettant que le plan de prévention établi entre la SNCF et la société Mercury Sud prévoyait que le personnel de la société ne pouvait s'approcher à moins de trois mètres de la caténaire qu'après réception de la mise hors tension et en relevant que l'accident dont à été victime Philippe Z... trouvait son origine dans l'absence de protection d'un joint de dilatation du pont dans l'interstice duquel le câble d'alimentation du projecteur a pu glisser et heurter la caténaire, la cour d'appel, qui fait reproche à Henri Y... de ne pas avoir communiqué le plan de prévention établi avec la SNCF, lequel ne contenait aucune prescription sur le risque lié à l'absence de protection du joint de dilatation, n'a pas caractérisé le lien de causalité certain entre la faute et le dommage subi par Philippe Z..., violant les articles visés au moyen ;

"5°) alors qu'aux termes de l'article 121-3 du code pénal, en cas de causalité indirecte, la responsabilité pénale de la personne
poursuivie est encourue lorsqu'elle a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elle ne pouvait ignorer ; qu'en l'espèce, le plan de prévention établi entre la SNCF et la société Mercury Sud ne faisait pas mention des risques liés à l'absence de protection du joint de dilatation du pont dans l'interstice duquel le câble d'alimentation du projecteur a pu glisser et heurter la caténaire de sorte que la cour d'appel qui fait reproche à Henri Y... d'avoir omis de communiquer le plan de prévention à l'entreprise X... n'a pas caractérisé la connaissance qu'il pouvait avoir d'un risque d'une particulière gravité auquel des salariés d'une autre entreprise auraient été exposés, violant les articles visés au moyen ;

"6°) alors que la cour d'appel ne pouvait sans contradiction reprocher à Henri Y... de ne pas avoir communiqué le plan de prévention établi avec la SNCF pour les seuls
travaux incombant à la société qu'il dirige, tout en constatant par ailleurs que c'est en raison de l'absence de réunion commune que le risque connu de la SNCF, parfaitement prévisible, n'a pas été analysé et qu'aucune mesure n'a été prise pour y remédier ce dont il résultait que le plan de prévention établi avec la société Mercury Sud ne pouvait envisager le risque que présentait l'absence de protection du joint de dilatation, cette société n'ayant pas à intervenir sur le pont" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Sur le second moyen proposé pour Henri Y..., pris de la violation des articles 496, 498, 499, 509, 591, 593,710 et 711 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a dit que les jugements rectificatifs prononcés le 20 juin 2005 n'ont pas autorité de chose jugée à l'égard de Philippe Z... et ne lui sont pas opposables et a décidé qu'en l'absence d'appel de MM. A..., X... et Y..., les dispositions civiles prononcées à l'encontre de ceux-ci au profit de Philippe Z... sont définitives ;

"aux motifs que « c'est à bon droit que le tribunal a reçu la partie civile, Philippe Z... en sa constitution ; que le jugement déféré qui porte condamnation in solidum de la SNCF, d'Alexandre A..., de Jacques X... et d'Henri Y..., a entièrement fait droit aux demandes de Philippe Z... ; que dans ces conditions, Philippe Z... n'avait aucun intérêt à interjeter appel ; qu'à la lecture des jugements rectificatifs, prononcés le 20 juin 2005, après l'expiration des délais d'appel du jugement soumis à la Cour, qui ont sur la requête de Jacques X... et d'Henri Y... supprimé la condamnation sur le plan civil de ces derniers, il apparaît que ni Philippe Z... ni la caisse primaire d'assurance maladie, pourtant
parties intéressées, n'ont été appelées en cause ; que, faute de signification à celles-ci, les dits jugements n'ont pas autorité de chose jugée ou en tout cas ne peuvent être considérés comme opposables à Philippe Z..., non appelant du jugement initial » ;

"alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que seul le jugement rectifié prononcé par le tribunal correctionnel de Nice le 18 novembre 2004 a été frappé d'appel, à l'exclusion des jugements
rectificatifs rendus le 20 juin 2005 ; que la cour d'appel ne pouvait donc pas réformer ou annuler les jugements du 20 juin 2005 qui, rectifiant le jugement initial du 18 novembre 2004, ont débouté la partie civile de ses demandes de dommages-intérêts dirigées contre le demandeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré définitives les dispositions civiles du jugement du 18 novembre 2004, sans tenir compte de leur rectification par les jugements du 20 juin 2005, ce qui revient à déclarer nuls et non avenus les jugements rectificatifs ; qu'en statuant de la sorte, bien qu'elle ne fût saisie d'aucun recours à l'encontre de ces jugements rectificatifs, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs, violant les textes visés au moyen" ;

Attendu que, si c'est à tort que la cour d'appel s'est prononcée sur la portée des jugements rectificatifs du 20 juin 2005, les griefs allégués ne sont pas encourus dès lors qu'elle a constaté, à bon droit, qu'en l'absence de recours tant de la partie civile que d'Henri Y..., elle n'était pas saisie des dispositions civiles du jugement du 18 novembre 2004 relatives à ce dernier ;

Qu'ainsi le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

DIT n'y avoitr lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Guérin conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-80395
Date de la décision : 18/12/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 décembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 déc. 2007, pourvoi n°07-80395


Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Thouin-Palat

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.80395
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