AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 8 septembre 2006), qu'en 1998, M. X..., dirigeant la société Centres de santé indépendants (CSI), détenue à 100 % par la société Investors in Health Care (IHC) (les sociétés) a démarché la société MAAF santé (MAAF santé) en vue du développement en commun de centres médicaux privés ; que les discussions se sont poursuivies par des échanges de courriers, notamment par une lettre du 29 juillet 1999 adressée par MAAF santé à M. X... aux termes de laquelle cette société se déclarait prête à participer au développement des activités de CSI sous réserve de vérifications, un protocole d'accord pouvant intervenir le 20 septembre 1999 ; que ce courrier a reçu l'accord de M. X... le jour même ; que le 13 septembre 1999, les sociétés ont remis les documents à MAAF santé, laquelle après vérification, a fait état de réserves le 17 septembre 1999 et a annoncé par courrier du 22 septembre 1999 qu'elle n'entendait plus poursuivre le projet de participation précédemment envisagé ; que les sociétés ayant été mises en liquidation judiciaire, Mme Le Y..., mandataire judiciaire, a assigné MAAF santé en dommages-intérêts pour inexécution des obligations contractuelles et subsidiairement pour rupture fautive des pourparlers ;
Attendu que Mme Le Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1 / que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en estimant que le courrier de la société MAAF santé du 29 juillet 1999, par lequel celle-ci formulait une offre concernant sa prise de participation dans le capital de la société CSI sous réserve de l'accord de sa partenaire avant le 31 juillet 1999, n'avait pas abouti à un accord définitif des parties, tout en constatant que le représentant légal de la société CSI avait apposé dans le délai utile la mention de son accord sur le courrier litigieux, qui comportait désormais la signature des deux sociétés, d'où il résultait nécessairement que les parties s'étaient accordées sur la prise de participation visée dans le courrier du 29 juillet 1999 et que la société MAAF santé se trouvait irrévocablement engagée à cet égard, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
2 / que la lettre de la société MAAF santé du 29 juillet 1999 comportait l'ensemble des conditions nécessaires à l'entrée de cette société dans le capital de la société CSI, puisqu'elle précisait le montant de la prise de participation (7 000 000 francs), les modalités de versement de ce montant (deux versements : l'un de 5 000 000 francs au 24 septembre 1999, l'autre de 2 000 000 francs au 15 avril 2000), ainsi que le délai de signature par les parties du protocole d'accord (20 septembre 1999 au plus tard), de sorte que l'acceptation de la société CSI, matérialisée par la signature de son dirigeant sur le courrier, valait accord des parties sur les conditions essentielles du contrat ; qu'en estimant cependant que les parties ne se trouvaient pas engagées par la signature conjointe de ce document, la cour d'appel a dénaturé les termes du courrier du 29 juillet 1999 et a violé l'article 1134 du code civil ;
3 / qu'est, en toute hypothèse fautive la rupture sans motif légitime de pourparlers contractuels qui se trouvent à un stade avancé ;
qu'en relevant que la rupture des négociations était intervenue à l'initiative de la société MAAF santé "à un stade avancé des pourparlers" tout en exonérant cette société de toues responsabilité au motif que les vérifications comptables opérées auprès de la société CSI avaient révélé, selon le cabinet Francis Lefebvre des "informations défavorables" et tout en constatant qu'une "aggravation du poste actif net négatif de 19 millions n'aurait pas suffi à justifier une rupture des pourparlers puisqu'une révision de prix était prévue dans ce cas là", d'où il résultait nécessairement que les informations financières défavorables recueillies par le cabinet Francis Lefebvre n'était pas de nature à justifier la rupture des pourparlers contractuels à l'initiative de la société MAAF santé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil ;
4 / qu'en exonérant la société MAAF santé de toute responsabilité extracontractuelle au motif que celle-ci se trouvait en toute hypothèse fondée à rompre les pourparlers pour des motifs "tenant par exemple aux charges réelles de la société (CSI), à la régularité de son fonctionnement et de celui des structures se trouvant sous son contrôle", la cour d'appel, qui n'a pas identifié précisément la raison pour laquelle la société MAAF santé avait décidé de rompre les pourparlers, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que la lettre du 29 juillet 1999 n'énonçait qu'une éventualité et n'était qu'une étape dans la discussion entreprise par les parties ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations d'où il ressortait qu'il n'en était résulté pour MAAF santé aucune obligation de contracter avec M. X... ou avec la société CSI, la cour d'appel a, sans dénaturation du document litigieux, pu statuer comme elle a fait ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la prise de participation de la société MAAF santé dans le capital de la société CSI était conditionnée par un résultat satisfaisant des vérifications prévues dans la lettre du 29 juillet 1999 lesquelles ont révélé des informations défavorables tant juridiques que financières sur la situation de la société CSI ; qu'ayant ainsi constaté que le désengagement de MAAF santé tenait aux charges réelles de la société CSI, à la régularité de son fonctionnement et de celui des structures se trouvant sous son contrôle et qu'il était intervenu les 17 et 22 septembre 1999, soit quelques jours seulement après la remise le 13 septembre 1999 des documents pour les vérifications prévues par la lettre du 29 juillet 1999, la cour d'appel a pu décider que la rupture des pourparlers, certes à un stade avancé, à l'initiative de MAAF santé, était fondée sur une raison légitime et n'était pas fautive ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Le Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société MAAF santé mutuelle ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille sept.