AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 621-43 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et 1956 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 6 janvier 1992, la Société maritime finistérienne aux droits de laquelle se trouve la société Union armoricaine des transports (le commissionnaire), commissionnaire agréé en douane, a procédé au dédouanement de 1 700 tonnes de blé pour le compte de la société Agripole (la société) ;
que l'administration des douanes ayant contesté la position tarifaire déclarée, le commissionnaire et sa banque ont mis en place une caution bancaire d'un montant équivalent aux prélèvements agricoles prétendument éludés pour permettre à la société de disposer de la marchandise ; qu'en raison du contentieux douanier, le commissionnaire et la société ont conclu en 1993 un protocole d'accord aux termes duquel la société reconnaissait que "si les prélèvements agricoles étaient effectivement dus à l'administration des douanes, la société ne contestait pas qu'ils seraient intégralement à sa charge", le commissionnaire "n'étant que son mandataire" ; que la convention prévoyait en outre qu"à titre de garantie du paiement des prélèvements agricoles dont serait passible la marchandise importée au titre de la déclaration en douane..., la société donnait en gage au commissionnaire une certaine somme, conformément aux articles 2073 et suivants du code civil", cette somme, versée entre les mains du séquestre juridique de l'ordre des avocats de Paris, étant "affectée au règlement des prélèvements agricoles dont serait passible la marchandise" litigieuse ; qu'il était enfin prévu que conformément aux dispositions de l'article 2082 du code civil, le commissionnaire disposait d'un droit de rétention sur les sommes nanties, qu'il ne pourrait disposer des fonds gagés qu'au vu d'un avis de recouvrement consécutif à une décision judiciaire définitive obtenue par l'administration des douanes ou d'une transaction conclue avec cette administration ou qu'inversement, le gage s'éteindrait si cette administration était déboutée de ses demandes concernant les droits avancés par le commissionnaire pour le compte de la société ou si la créance était éteinte pour tout motif ; que par jugement du 30 juillet 1999, la société a été mise en liquidation judiciaire, Mme X... étant désignée en qualité de liquidateur ; que le liquidateur a assigné le commissionnaire ainsi que le séquestre à l'effet d'obtenir le versement des fonds séquestrés ainsi que les fruits produits par ces sommes ; que le tribunal a accueilli cette demande sauf en ce qui concerne la remise des fruits ;
Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise des fonds séquestrés au liquidateur, l'arrêt retient que le commissionnaire, bénéficiaire, non d'un droit de propriété mais d'une créance conditionnelle, née avant l'ouverture de la procédure collective, devait déclarer celle-ci et qu'en l'absence d'une telle déclaration, le liquidateur était fondé en sa demande ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la somme placée sous séquestre n'était pas entrée dans le patrimoine de la société et que le dépositaire était obligé de la rendre à la personne qui serait jugée devoir l'obtenir sans que son attribution soit soumise aux règles de la procédure collective, ce dont il résultait que le commissionnaire n'avait pas à déclarer sa créance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 septembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille sept.