La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2007 | FRANCE | N°04-19671

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 février 2007, 04-19671


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant, tant sur le pourvoi principal formé par le liquidateur de la société La Côte sauvage, que sur le pourvoi provoqué de la société Morgan international participations ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Fiso a agi à l'encontre de la société Morgan international participations (la société Morgan) en contrefaçon de trois modèles de motifs jacquard utilisables pour l'ornementation de vêtements pouvant constituer un en

semble coordonné ; que la société La Côte sauvage, fabricante des produits incriminés...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant, tant sur le pourvoi principal formé par le liquidateur de la société La Côte sauvage, que sur le pourvoi provoqué de la société Morgan international participations ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Fiso a agi à l'encontre de la société Morgan international participations (la société Morgan) en contrefaçon de trois modèles de motifs jacquard utilisables pour l'ornementation de vêtements pouvant constituer un ensemble coordonné ; que la société La Côte sauvage, fabricante des produits incriminés, mise par la suite en redressement puis liquidation judiciaires, est intervenue aux débats ; que le tribunal de commerce a décidé que ces deux dernières sociétés s'étaient rendues coupables d'actes de contrefaçon et d'actes distincts de parasitisme et de concurrence déloyale ; que, sur les conclusions de la société Fiso demandant la confirmation de cette décision, soutenant qu'au cas où la cour d'appel dénierait l'originalité des modèles, les faits de contrefaçon s'analyseraient en actes de parasitisme, et demandant la réparation d'autres faits distincts, l'arrêt a confirmé le jugement, sauf à modifier ses dispositions relatives aux réparations ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi provoqué, réunis :

Attendu que le liquidateur de la société La Côte sauvage et la société Morgan font grief à l'arrêt de les avoir condamnées pour contrefaçon, alors, selon le moyen :

1 / que la contrefaçon par reproduction n'est caractérisée que dans la mesure où se trouvent repris, dans le produit prétendument contrefaisant, les caractéristiques mêmes qui confèrent à l'oeuvre prétendument contrefaite son originalité ; qu'ayant eux-mêmes observé que, compte tenu de l'extrême banalité des motifs caractérisant le style jacquard, l'originalité du motif de la société Fiso ne résidait que dans la combinaison particulière des différents dessins et coloris utilisés, les juges du fond ne pouvaient retenir la contrefaçon sans constater que les éléments mêmes qui conféraient à la composition de la société Fiso son caractère original, et tout particulièrement "les mouvements dentelés avec des pointillés et des flocons de neige, absents du motif de 1967", se retrouvaient dans le motif jacquard mis au point par les sociétés Morgan et La Côte sauvage ; qu'il s'ensuit que l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des articles L. 112-4 et L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle ;

2 / que, si la contrefaçon s'apprécie en principe au regard des ressemblances et non des différences, c'est à la condition toutefois que le degré d'originalité de l'oeuvre prétendument contrefaite soit tel que celle-ci ne présente elle-même pas de ressemblance globale avec des créations antérieures tombées dans le domaine public ; qu'ayant eux-mêmes relevé que le style jacquard était en lui-même banal et non protégeable, que l'originalité de la combinaison réalisée par la société Fiso ne ressortait "qu'à l'analyse", qu'elle s'évinçait de l'ajout de "mouvements dentelés avec des pointillés et des flocons de neige absents du motif de 1967", les juges ne pouvaient ensuite déduire la contrefaçon d'une simple "impression d'ensemble", de "ressemblances" appréciées en considération des capacités "d'une personne faisant preuve d'une attention moyenne" ou encore d'une simple parenté de style, sauf à de nouveau priver leur décision de toute base légale au regard des articles L. 112-4 et L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle ;

3 / qu'une oeuvre de l'esprit n'est susceptible de bénéficier de la protection légale des droits d'auteur que si elle satisfait à la condition d'originalité ; qu'en affirmant que l'originalité du motif prétendument contrefait résultait de la combinaison des divers éléments le constituant, qu'il en ressortait une impression d'ensemble, qu'il avait été illégalement reproduit et que les différences observées dans le dessin des éléments pris isolément n'était en pas de nature à remettre en cause cette communauté d'esprit dans la conception, sans vérifier que pareille ressemblance résultait également de la comparaison du motif prétendument contrefait avec une oeuvre tombée dans le domaine public, si bien qu'aucune originalité ni nouveauté ne pouvaient être déduites de l'impression d'ensemble retenue, qui n'était dès lors susceptible d'aucune appropriation, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu qu'en retenant que l'agencement particulier des motifs géométriques et des couleurs traduit l'empreinte de la personnalité de l'auteur des modèles dont la protection était demandée, que le motif figurant sur les vêtements incriminés reprend les caractéristiques et la succession des motifs géométriques composant le motif jacquard revendiqué par la société Fiso et que l'impression d'ensemble générée par les deux motifs est identique, la cour d'appel a pris en compte la reprise des caractéristiques jugés originales de ces modèles et ainsi exclu que la même impression d'ensemble résulte de l'appartenance commune des modèles considérés au style jacquard ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et le second moyen du pourvoi provoqué, pris en sa première branche, réunis :

Vu l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer les sociétés Morgan et La Côte sauvage coupables de concurrence parasitaire, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que ces dernières se sont placées dans le sillage de la société Fiso en utilisant sa notoriété et en bénéficiant de ses investissements ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que ces griefs n'étaient formulés que pour le cas où l'action en contrefaçon ne serait pas reçue, à défaut d'originalité des modèles, la cour d'appel, qui en accueillant l'action en contrefaçon avait déjà sanctionné les faits ainsi retenus, a méconnu les termes du litige ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche, et le second moyen du pourvoi provoqué, pris en sa deuxième branche, réunis :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour retenir que les sociétés Morgan et La Côte sauvage ont commis des actes de concurrence déloyale distincts de la contrefaçon, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que ces sociétés ont repris la même gamme de vêtements, qu'elles ont produit et vendu des produits de moindre qualité, ceux de la société Fiso étant en pure laine tandis que ceux commercialisés par leurs soins sont en acrylique, qu'elles n'ont pas exposé de frais de création pour procéder à cette substitution de matériau, et que les produits incriminés ont été vendus à des prix inférieurs pour des quantités importantes, privant ainsi la société Fiso d'un certain chiffre d'affaires ;

Attendu qu'en s'abstenant d'indiquer en quoi ces faits, à les supposer même distincts de ceux caractérisant la contrefaçon, généraient un risque de confusion, contesté par les défendeurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que par la fabrication et la commercialisation d'articles reproduisant le motif jacquard original appartenant à la société Fiso, les sociétés Morgan et La Côte sauvage se sont rendues coupables d'actes de parasitisme et de concurrence déloyale, en ce qu'elles les a condamnées au paiement de dommages-intérêts, au titre de la concurrence déloyale, et en ce qu'elle a ordonné la publication de la partie du dispositif du jugement confirmé consacré à ce chef de condamnation, l'arrêt rendu le 10 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 04-19671
Date de la décision : 20/02/2007
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (4e chambre, section B), 10 septembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 fév. 2007, pourvoi n°04-19671


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:04.19671
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award