AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 12-6, alinéa 3, du code de l'expropriation ;
Attendu que lorsque les immeubles expropriés sont rétrocédés, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel disposent d'une priorité pour leur acquisition, que l'estimation de leur valeur de vente se fera suivant les mêmes normes que pour les expropriations ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2005), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ. pourvoi n° 98-14.751), que Mme X..., aux droits de qui viennent M. X... et son curateur M. Y..., a assigné la commune de Clichy-la-Garenne pour faire reconnaître son droit à rétrocession sur une parcelle expropriée et, celle-ci étant devenue impossible, afin d'obtenir l'indemnisation de l'impossibilité d'exercer ce droit ;
Attendu que, pour limiter cette indemnisation à la perte d'une chance, l'arrêt, ayant retenu que la réparation du préjudice devant être appréciée in concreto, l'impossibilité de rétrocession ne pouvait donner lieu à indemnisation que si l'exproprié justifiait avoir été effectivement privé de la faculté de racheter les biens, en établissant qu'il disposait, à la date de sa demande, des moyens financiers nécessaires, relève qu'en l'état du patrimoine de Mme X... à cette date et de sa composition, il n'est pas certain qu'elle aurait eu les ressources suffisantes pour procéder à ce rachat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que lorsque le droit à rétrocession étant reconnu, la rétrocession se révèle impossible, les anciens propriétaires ne sont pas tenus d'établir qu'ils auraient été en mesure de payer le prix des immeubles qui ne peuvent être rétrocédés, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la commune de Clichy-la-Garenne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la commune de Clichy-la-Garenne, la condamne à payer à M. X... et à M. Y..., ès qualités, ensemble, la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille six.