AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi incident qui est préalable :
Vu l'article L. 114-1, alinéa 1er, du code des assurances ;
Attendu qu'en matière d'assurance de groupe souscrite par un établissement de crédit et à laquelle adhère un emprunteur pour la couverture de risques pouvant avoir une incidence sur le remboursement de l'emprunt, la prescription de l'action de l'assuré contre l'assureur ne commence à courir qu'à compter du premier des deux événements suivants, soit le refus de garantie de l'assureur, soit la demande en paiement de l'établissement de crédit, bénéficiaire de l'assurance par l'effet de la stipulation faite à son profit ;
Attendu selon l'arrêt attaqué, intervenu sur renvoi après cassation (civ. 1, 30 janvier 2002, Bulletin civil 2002, I, n° 36), que pour garantir partiellement le remboursement d'un prêt consenti à la société civile immobilière du Château de la Treyne (la SCI), sa gérante, Mme X..., a adhéré à l'assurance de groupe souscrite par le prêteur, le Crédit foncier de France (CFF), auprès de la Caisse nationale de prévoyance (CNP), contre les risques décès et invalidité ; que Mme X... ayant été atteinte d'une incapacité de travail suivie d'une invalidité, l'assureur a pris en charge, à concurrence de 70 %, le remboursement des échéances du prêt, du 31 octobre 1992 au 6 octobre 1993 ; qu'à cette date l'assureur a cessé les remboursements au motif que l'assuré n'avait pas adressé les pièces médicales prévues au contrat ; que les échéances du prêt étant demeurées impayées, le CFF a fait délivrer un premier commandement par acte du 5 décembre 1991 puis, par acte du 18 avril 1994, un nouveau commandement aux fins de saisie immobilière à la SCI qui y a formé opposition ; que par un premier jugement, du 8 décembre 1995, le tribunal de grande instance a prononcé la nullité du commandement du 5 décembre 1991, et a débouté la SCI de sa demande de nullité du commandement du 18 avril 1994, puis a sursis à statuer sur les autres demandes en invitant le CFF à produire de nouveaux décomptes ; que, le 31 mai 1996, Mme X... et la SCI ont assigné la CNP en garantie ;
que la CNP a opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action ;
Attendu que, pour déclarer l'action de l'assuré non prescrite, l'arrêt énonce que Mme X... était informée à compter du 20 septembre 1994 que les échéances du prêt ne seraient plus prises en charge ; que c'est donc à compter de cette date que le délai de deux ans prévu à l'article L. 114-1 du code des assurances avait commencé à courir;
Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé l'existence d'une demande en paiement, résultant du commandement de payer valant saisie immobilière adressé le 18 avril 1994 par le CFF à la SCI, laquelle constituait le premier des deux événements faisant courir le délai de prescription, ce dont il se déduisait que l'action se trouvait prescrite à la date de l'assignation du 31 mai 1996, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
DECLARE prescrite l'action en garantie de la SCI Château de la Treyne et de Mme X... contre la Caisse nationale de prévoyance ;
Condamne la société civile immobilière (SCI) du Chateau de la Treyne, Mme Y... aux dépens exposés devant les juges du fond et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse nationale de prévoyance assurances ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille six.