AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu qu'un certain nombre de conducteurs receveurs de la société Les courriers du Midi ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant au paiement des heures dites "de coupure" entre deux trajets, pendant lesquelles ils prétendaient demeurer dans un lien de subordination à l'égard de leur employeur ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que les salariés font grief au jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Montpellier, 18 novembre 2003) de les avoir déboutés de cette demande, alors, selon le moyen :
1 / que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que selon les énonciations du jugement attaqué, la "fiche de travail" des conducteurs receveurs demandeurs permet de déterminer des "périodes de coupure" entre deux "services intermédiaires" ; que pendant ces "périodes de coupure", le règlement intérieur de l'entreprise impose aux salariés de "prendre toutes les dispositions utiles en vue de la préservation du véhicule dont il (s) (sont) dépositaire(s), ainsi que de ses agrès" ; que le règlement intérieur précise que " la non application de ces dispositions sera considérée comme une faute professionnelle et sanctionnée" ; qu'il s'évince de telles constatations que, pendant les "périodes de coupure", un conducteur receveur est considéré comme "dépositaire" de son véhicule et des "agrès" de celui-ci ; qu'il reste ainsi tenu de veiller à la conservation de ces biens (dont la "recette en caisse") et demeure soumis au pouvoir disciplinaire de l'employeur ; qu'en jugeant néanmoins que les salariés demandeurs n'auraient été assujettis, pendant les périodes de coupure, à aucune disponibilité vis-à-vis de leur employeur ni aucune obligation de surveillance, et qu'ils auraient pu vaquer librement à des occupations personnelles, le conseil de prud'hommes n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article L.. 212-4 du code du travail ;
2 / que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que les salariés demandeurs faisaient valoir qu'ils restaient à la disposition de leur employeur et ne pouvaient vaquer librement à des occupations personnelles dès lors qu'ils se retrouvaient, en période de "coupure", dans un village ou une garrigue, sans avoir la permission d'utiliser le véhicule de l'entreprise ; qu'en affirmant que les demandeurs n'auraient "décrit aucune situation particulière de nature à démontrer une atteinte portée à la liberté de vaquer à des occupations personnelles", sans se prononcer concrètement sur ce qui précède, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'est un travail effectif au sens de l'article L. 212-4 précité le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;
Et attendu qu'ayant constaté qu'entre la fin d'un trajet et le début du suivant, lorsque la coupure s'exécutait en dehors du site de l'entreprise, les salariés, après avoir pris toutes les dispositions utiles en vue de la préservation du véhicule dont ils étaient dépositaires, s'être assurés que celui-ci était correctement garé et fermé et avoir emporté avec eux la clé et éventuellement la caisse, dont il n'était pas prétendu que le transport posât un problème de sujétion particulière, pouvaient vaquer librement à des occupations personnelles, le conseil de prud'hommes n'encourt pas les griefs du moyen ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les troisième et quatrième branches du moyen qui ne seraient pas de nature à en permettre l'admission ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les salariés aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille six.