AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 mars 2005), que M. X... a exercé la profession de médecin en qualité de praticien des hôpitaux, à titre libéral et en tant qu'expert judiciaire ; qu'ayant sollicité de la caisse autonome de retraite des médecins français (CARMF) le versement de sa pension de retraite au titre de son activité libérale, la caisse lui a opposé que l'attribution de celle-ci était subordonnée à la cessation de toute activité, y compris d'expertise ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours alors, selon le moyen :
1 / que, selon l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale résultant de l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, sont comprises parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation d'être affiliées aux assurances sociales du régime général les personnes qui exercent à titre occasionnel pour le compte de l'Etat une activité dont la rémunération est fixée par des dispositions législatives ou réglementaires ou par décision de justice ; qu'il s'ensuit que viole le texte susvisé l'arrêt attaqué qui retient que, bien qu'ayant cessé d'exercer toute activité médicale libérale et demandé la liquidation de sa retraite auprès de la CARMF le 18 juin 1997, M. X... ne pouvait bénéficier de sa pension de retraite de cette caisse tant qu'il demeurerait inscrit comme expert judiciaire et réaliserait des expertises judiciaires, au motif inopérant adopté que, selon l'article 1er du décret n° 49-1258 du 27 août 1949, l'attribution de l'allocation vieillesse des médecins était subordonnée à la cessation de leur activité professionnelle de médecins ;
2 / que, si l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale résultant de l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 précise qu'il est sans effet sur le droit applicable au lien existant entre les personnes qu'il vise et les administrations, établissements ou organismes concernés, en rattachant les experts judiciaires au régime général de sécurité sociale, ce texte a nécessairement posé le principe de la suppression de tout lien entre les experts judiciaires et les caisses gérant les régimes particuliers, de sorte qu'en admettant le contraire, par adoption de motifs, l'arrêt attaqué en a violé le texte susvisé ;
3 / que M. X... ayant cessé d'exercer son activité de médecin libéral et n'ayant pas sollicité de dérogation pour ses activités d'expertise judiciaire à l'application du principe posé par l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale résultant de l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 du rattachement des activités d'expertise judiciaire au régime général de sécurité sociale, viole le texte susvisé l'arrêt attaqué qui justifie sa solution au visa du second alinéa dudit texte prévoyant que ce principe n'est pas applicable sur leur demande aux personnes exerçant à titre principal une des professions visées à l'article L. 621-3 lorsque les activités occasionnelles en sont le prolongement ;
4 / que l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 (devenu l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale) ayant posé le principe du rattachement des activités occasionnelles comme les activités d'expertise judiciaire au régime général de sécurité sociale, en dérogeant de la sorte si nécessaire aux dispositions de l'article L. 622-5 du code de la sécurité sociale incluant les activités d'expertise judiciaire parmi les professions libérales, méconnaît les principes régissant les conflits de lois dans le temps, le principe specialia generalibus derogant et l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 susvisé, l'arrêt attaqué qui fait primer une loi générale du 21 décembre 1985 sur une loi spéciale du 23 décembre 1998 et retient que les activités d'expertise judiciaire doivent, même après l'entrée en vigueur de la loi du 23 décembre 1998, être considérées comme ayant un caractère libéral ;
5 / que méconnaît le principe régissant la hiérarchie des normes juridiques ainsi que les principes applicables aux conflits de lois dans le temps et viole l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale duquel il résulte que les activités d'expert judiciaire relèvent du régime général de sécurité sociale, l'arrêt attaqué qui fait primer sur ces dispositions légales plus récentes les dispositions réglementaires antérieures de l'article R. 643-4 du code de la sécurité sociale énonçant que "les experts qui exercent une profession relevant d'une section professionnelle sont affiliées à ladite section même lorsque leur activité se limite uniquement aux expertises" ;
6 / que ne justifie pas légalement sa solution au regard de l'article L. 311-3-21 du code de la sécurité sociale résultant de l'article 15 I de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 l'arrêt attaqué qui omet de s'expliquer sur l'attitude contradictoire de la CARMF qui admet que depuis la promulgation de ces dispositions législatives M. X... n'est plus affilié auprès d'elle au titre de ses activités d'expertise judiciaire (lesquelles relèvent désormais du régime général de sécurité sociale) et n'a plus à lui verser de cotisations de ce chef, mais retient qu'il s'agit néammoins d'une activité libérale lui interdisant la perception de sa pension de retraite ;
7 / que subsidiairement, la CARMF ayant accepté de verser sa pension de retraite à M. X... depuis l'entrée en vigueur des articles L. 161-22 et L. 643-6 du code de la sécurité sociale résultant de la loi n° 2000-775 du 21 août 2003 en dépit de la poursuite de ses activités d'expertise judiciaire, ne justifie pas légalement sa solution au regard de ces dispositions légales l'arrêt attaqué qui retient que M. X... a pu être privé de sa pension de retraite entre la date de la liquidation de sa retraite en 1997 et la date d'entrée en vigueur de ladite loi du 21 août 2003 sans rechercher si ces nouvelles dispositions légales n'ont pas un caractère interprétatif ;
8 / que, étant incontesté que les médecins hospitaliers retraités peuvent percevoir leur pension de retraite tout en poursuivant des activités d'expertise judiciaire, méconnaît le principe d'égalité devant la loi l'arrêt attaqué qui considère que ce traitement n'était pas applicable aux médecins libéraux avant la loi n° 2000-775 du 21 août 2003 ;
Mais attendu que l'activité d'expertise judiciaire étant, par nature, exclusive d'un lien de subordination entre celui qui y procède et l'autorité judiciaire dont il tient sa désignation, est de caractère libéral, et que le rattachement exceptionnel de cette activité au régime général de sécurité sociale ne se justifie que si elle présente un caractère occasionnel ;
D'où il suit qu'en retenant sur le fondement des articles L. 622-5-2 et R. 634-4 du code de la sécurité sociale, seuls applicables à l'espèce à la date des faits, que M. X... exerçait en qualité d'expert inscrit sur une liste d'experts près une cour d'appel et sur la liste nationale, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il ne pouvait bénéficier de la retraite litigieuse ;
Que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille six.