AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 23 septembre 2004), que M. X..., salarié de la société GTMH, a été victime, le 5 septembre 1997, d'un accident du travail alors qu'il réalisait des travaux de maintenance d'une cuve appartenant à la société Sollac Atlantique ;
que la CPAM de Calais a saisi le tribunal de grande instance en vue de voir déclarer, en présence de la victime, la société Sollac Atlantique entièrement responsable de l'accident dont M. X... avait été victime et la faire condamner à lui rembourser les débours exposés par elle ;
Sur le premier moyen; pris en ses deux branches :
Attendu que la société Arcelor Atlantique et Lorraine, venant aux droits de la société Sollac Atlantique, fait grief à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable de l'accident survenu à M. X..., alors, selon le moyen :
1 / que, ayant admis que la victime, M. X..., ne devait pas se rendre sur la plate-forme d'où il a chuté (arrêt p. 4, alinéa 4), prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 233-1, R. 237-6 et R. 237-11 du code du travail et 1382 du code civil l'arrêt qui impute une faute à Sollac, entreprise utilisatrice, pour n'avoir pas renseigné GTMH sur l'insuffisance de couverture de la cuve sans s'expliquer sur les conclusions faisant valoir que l'employeur de la victime, GTMH entreprise intervenante, n'avait nullement informé la société Sollac du changement du mode opératoire consécutif à une erreur de montage de sa part, et n'avait pas davantage remédié aux risques particuliers résultant de cette modification ;
2 / que, prive de nouveau de toute base légale au regard de l'article 1382 du code civil, l'arrêt qui retient à l'encontre de Sollac "un éclairage inadapté des lieux de nuit" tout en reconnaissant que le dossier ne permettait pas de savoir par quelle société cet éclairage de nuit était assuré ;
Mais attendu que l'arrêt retient que les causes de l'accident résident dans l'absence par la société Sollac d'avertissement des salariés de la société GTMH qui travaillaient à proximité de la cuve quant à l'insuffisance de la couverture mise en place par elle-même sur la cuve, couverture, sur laquelle M. X... a été amené à se rendre ; que la faute ainsi commise par la société Sollac, conjuguée à un éclairage inadapté des lieux, a entraîné la chute et les blessures de M. X... ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant d'une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu déduire, peu important quelle société assurait léclairage des lieux de l'accident, que la société Sollac était tenue d'indemniser la caisse des débours exposés pour la victime ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Sollac fait encore grief à la cour d'appel d'avoir statué comme elle l'a fait, alors, selon le moyen :
1 / que, en vertu de l'article L. 454-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, lorsque la responsabilité du tiers est partagée avec la victime, la caisse est admise seulement à poursuivre le remboursement de ses prestations à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers, de sorte que viole ce texte ainsi que l'article L. 230-3 du code du travail et, à nouveau, les articles R. 237-6, R. 237-11 du code du travail et 1382 du code civil, l'arrêt qui s'abstient de se prononcer comme il y était invité sur la violation des consignes de sécurité par M. X..., lequel avait omis de s'équiper d'un harnais de sécurité, l'entreprise Sollac, entreprise tierce, étant recevable à exciper d'une faute quelconque de la victime pour s'exonérer de sa responsabilité ;
2 / que, si la responsabilité du tiers est partagée avec l'employeur, la caisse ne peut poursuivre un remboursement que dans la mesure où les indemnités dues par elle dépassent celles qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun, et que, dès lors, viole l'article L. 454-1, alinéa 6, du code de la sécurité sociale l'arrêt qui se borne à ordonner le remboursement de la totalité des débours de la caisse et qui s'abstient d'évaluer préalablement le préjudice global de la victime et de cantonner les demandes de l'organisme social dans la limite de l'indemnité de droit commun ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient qu'il ne peut être reproché à M. X... de ne pas avoir porté de harnais de sécurité dès lors qu'il n'avait pas connaissance du danger causé par l'insuffisance de couverture de la cuve ;
Et attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société Sollac Atlantique ait soutenu devant la cour d'appel le moyen invoqué par la seconde branche ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société la société Arcelor Atlantique et Lorraine, venant aux droits de la société Sollac Atlantique, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Arcelor Atlantique et Lorraine, venant aux droits de la société Sollac Atlantique, à payer à la CPAM de Calais la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille six.