AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 octobre 2003), que Pierre X..., salarié de la société Eurotoiture, a été victime d'un accident mortel du travail le 5 octobre 1988 ; que l'employeur a été reconnu auteur d'une faute inexcusable ; que la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) a procédé au règlement des indemnités dues à chacun des ayants droit en réparation de leur préjudice moral ; que la société Eurotoiture ayant été déclarée en liquidation judiciaire en 1994, la caisse s'est adressée directement à son assureur, la SMABTP, afin de récupérer les sommes acquittées ;
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir condamné la SMABTP à payer à la CPAM les sommes réclamées alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, la caisse, qui verse aux bénéficiaires des indemnités auxquelles leur ouvre droit la faute inexcusable de l'employeur, ne dispose d'une action récursoire qu'à l'égard de ce dernier ; qu'en affirmant que la CPAM était subrogée dans les droits de la victime de l'accident du travail et ne pouvait agir directement contre l'assureur de l'employeur, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
2 / qu'en déclarant, en toute hypothèse, la caisse fondée à agir en paiement des sommes versées au titre du préjudice moral subi personnellement par les ayants droit de la victime en tant qu'elle serait subrogée dans les droits de la victime de l'accident du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 124-3 du code des assurances et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
3 / qu'au surplus, les ayants droit de la victime ne peuvent pas obtenir réparation de leur préjudice moral de la part de l'employeur ;
qu'en déclarant la caisse fondée du fait d'une subrogation à agir contre l'assureur de l'employeur, la cour d'appel a encore violé les articles L. 214-3 du code des assurances et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail dû à la faute inexcusable de l'employeur a le droit de demander à celui-ci la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, et que la réparation de ce préjudice est versée directement au bénéficiaire ;
Que la cour d'appel ayant constaté qu'au moment de l'accident de son salarié, la société Eurotoiture se trouvait garantie par le contrat d'assurance souscrit auprès de la SMABTP au titre de l'indemnisation complémentaire prévue par la loi au regard de la faute inexcusable de l'employeur, a décidé à bon droit que la CPAM, subrogée dans les droits des consorts X... à l'égard de la société, pouvait agir directement contre l'assureur de celle-ci ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SMABTP aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SMABTP à payer à la CPAM du Val de Marne la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille six.