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24/05/2006 | FRANCE | N°04-15129

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 mai 2006, 04-15129


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'interpellé par les services de police, puis présenté le 14 juillet 2003 devant le tribunal correctionnel de Foix, dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate, M. X... a sollicité la commission d'office d'un avocat ; que M. Y..., associé de la SCP Y... Pradon (la SCP), de permanence pénale ce jour-là, a été désigné ; que le 18 juillet suivant, la SCP a déposé une d

emande d'aide juridictionnelle dans l'intérêt de son client ; qu'elle a factu...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'interpellé par les services de police, puis présenté le 14 juillet 2003 devant le tribunal correctionnel de Foix, dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate, M. X... a sollicité la commission d'office d'un avocat ; que M. Y..., associé de la SCP Y... Pradon (la SCP), de permanence pénale ce jour-là, a été désigné ; que le 18 juillet suivant, la SCP a déposé une demande d'aide juridictionnelle dans l'intérêt de son client ; qu'elle a facturé à celui-ci les diligences accomplies depuis le 14 juillet ; que cette facture de 717,60 euros a été réglée par les parents de M. X...; que l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. X... selon décision du 28 juillet 2003 pour "assistance d'un prévenu devant le tribunal correctionnel avec débat sur la détention jusqu'à la fin de l'instance" ; que la SCP a adressé à M. X... une facture complémentaire de 538,20 euros au titre de diligences accomplies postérieurement à l'achèvement de la procédure de première instance, en particulier l'appel de la décision, la visite à la maison d'arrêt et des entretiens avec la famille ; que saisi d'une contestation, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Ariège a fixé à 538,20 euros le montant des honoraires dus par M. X... ; que M. X... a interjeté appel de cette décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. Y..., avocat associé de la SCP, ayant qualité pour agir au nom de la SCP et dans l'intérêt de celle-ci en application de l'article 44 du décret n° 92-680 du 20 juillet 1992, fait grief à l'ordonnance d'avoir, après réformation de la décision du bâtonnier du 29 septembre 2003, débouté la SCP de sa demande en paiement de la facture de 538,20 euros et condamné celle-ci à rembourser à M. X... celle de 716,20 euros, alors, selon le moyen,

1 / que le premier président de la cour d'appel, saisi dans le cadre d'un recours contre l'ordonnance rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Ariège statuant uniquement sur les honoraires dus à la SCP pour diligences effectuées en appel au bénéfice de M. X..., ne pouvait sans méconnaître les termes du litige et violer l'article 4 du nouveau code de procédure civile, se prononcer sur la somme de 717,60 euros réglée par celui-ci dans le cadre de la procédure de première instance ;

2 / que le premier président ne pouvait estimer que la SCP ne justifiait d'aucune diligence antérieure à la demande d'aide juridictionnelle faite par M. X... le 18 juillet 2003, dès lors qu'il n'était pas contesté que l'avocat intervenant dans le cadre de la permanence pénale, avait accepté de prendre en charge la défense de l'intéressé, dès le 14 juillet dans une procédure de comparution immédiate et avait accompli des diligences dont la réalité ne faisait pas l'objet d'une contestation, que cette situation résultait notamment du fait que la demande d'aide juridictionnelle avait été présentée au nom de M. X... par l'avocat lui-même ; qu'ainsi, l'ordonnance attaquée est entachée d'une violation des articles 32 et 33 de la loi du 10 juillet 1991 ;

3 / que le premier président ne pouvait décider qu'il n'était pas justifié de diligences antérieures à la demande d'aide juridictionnelle sans tenir compte de ce que cette mesure d'assistance avait été accordée à M. X... sur le fondement de l'article 6 de la loi du 10 juillet 1991, ce qui était de nature à démontrer que l'intéressé qui n'était pas démuni de ressources avait spontanément réglé des honoraires correspondants à une prestation; qu'ainsi l'ordonnance est entachée d'une violation des articles 6, 32 et 33 de la loi du 10 juillet 1991 ;

4 / qu'en toute hypothèse, M. X... ayant réglé sans contestation la facture d'honoraires de 717,60 euros, le premier président, à la suite du bâtonnier, ne se trouvait saisi que de la contestation relative à la seconde facture de 538,20 euros ; que dès lors, en condamnant la SCP à rembourser la première somme qui échappait à sa compétence, le premier président a violé l'article 174 du décret du 27 novembre 1991 ;

Mais attendu que l'ordonnance retient que M. X..., arrêté le 14 juillet 2003, a formé une demande d'aide juridictionnelle le 18 juillet 2003 ; qu'elle lui a été accordée le 28 juillet suivant pour "assistance d'un prévenu devant le tribunal correctionnel en comparution immédiate avec débat sur la détention" ; que la décision précisait que M. X... était assisté par la SCP qui a accepté de prêter son concours ;

qu'ainsi, l'aide juridictionnelle n'avait pas été accordée à M. X... uniquement pour le débat contradictoire, comme le prétend la SCP, mais pour l'ensemble de l'instance devant le tribunal correctionnel ; que M. X... a été jugé par le tribunal correctionnel le 5 août 2003 ; que la SCP a adressé le jour même où M. X... formait sa demande d'aide juridictionnelle, soit le 18 juillet 2003, une facture de 716,60 euros à titre de "provision sur frais et honoraires devant le tribunal correctionnel de Foix", facture qui a été réglée ; qu'il résulte des articles 32 et 33, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 que l'avocat ne peut réclamer au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale que la rémunération des seules diligences qu'il a accomplies avant la demande d'aide ; qu'en l'espèce, la SCP ne justifiant d'aucune diligence avant le 18 juillet 2003, doit être condamnée à rembourser à M. X... la somme de 716,60 euros ;

Que de ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, le premier président qui était saisi d'un appel portant sur les factures d'honoraires en dates des 18 juillet et 4 septembre 2003, a pu déduire que la SCP n'ayant pas justifié, antérieurement à l'obtention par M. X... de l'aide juridictionnelle totale, de diligences non couvertes par l'aide juridictionnelle, devait rembourser les sommes qu'elle avait perçues à ce titre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 10 de la loi du 31 décembre 1971, 1134 et 1315 du code civil ;

Attendu que débouter la SCP de sa demande de paiement de la somme de 538,20 euros au titre de la facture d'honoraires du 4 septembre 2003, l'ordonnance énonce qu'en cause d'appel, la SCP ne justifiait nullement des prestations mentionnées dans sa facture à savoir "visite à la maison d'arrêt, entretiens avec la famille" alors de surcroît qu'elle a été dessaisie de l'affaire; que sa demande est donc injustifiée ;

Qu'en statuant ainsi ,alors, d'une part, que la SCP justifiait d'une déclaration d'appel formée par elle pour le compte de M. X... dont il était dû rémunération, puisqu'elle n'était pas couverte par l'aide juridictionnelle, d'autre part, que la réalité des diligences accomplies par la SCP depuis la formalisation de l'appel n'était pas contestée, le premier président qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a débouté la SCP Y... -Pradon de sa demande de paiement d'honoraires au titre des diligences accomplies postérieurement à la fin de l'instance devant le tribunal correctionnel, l'ordonnance rendue le 1er avril 2004, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Bordeaux ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;

Vu l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 04-15129
Date de la décision : 24/05/2006
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Premier président de la cour d'appel de Toulouse, 01 avril 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 mai. 2006, pourvoi n°04-15129


Composition du Tribunal
Président : Président : Mme FAVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:04.15129
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