AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les trois moyens, réunis :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 1er, 13 juillet 2004), que par décision du procureur de la République, Mme X... a été inscrite sur sa demande, avec effet au 28 novembre 1991 et à titre individuel, sur la liste des conseils juridiques, dans la première section prévue à l'article 43 du décret n° 72-670 du 13 juillet 1972 ; qu'à partir du 1er janvier 1992, elle a exercé une activité individuelle d'avocat ; que l'estimant redevable des cotisations du régime d'assurance vieillesse de cette profession à compter du 28 novembre 1991, la Caisse nationale des barreaux français (CNBF) a établi contre elle un rôle au titre des années 1993 et 1994, lequel a été rendu exécutoire le 3 novembre 1998 par le premier président ;
Attendu que Mme X... fait grief au Tribunal d'avoir retenu sa compétence et de l'avoir déboutée de son recours, alors, selon les moyens :
1 / qu'en vertu de l'article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale, les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale sont exclusivement compétente pour connaître des litiges à caractère individuel qui se rapportent à l'application des lois et règlements en matière de sécurité sociale, et notamment en matière de cotisations d'assurance vieillesse ; que les principes d'égalité et de "traitement équitable" posés par l'article 3 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, s'opposent à ce que l'application des règles relatives à un régime particulier de retraite, au demeurant entièrement régi par des dispositions figurant dans le Code de la sécurité sociale, soit soustraite à la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, de sorte qu'en statuant comme il l'a fait le Tribunal a violé les textes et principes susvisés ;
2 / que selon l'article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale applicable aux cotisations d'assurance vieillesse "l'avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les trois années qui précèdent leur envoi" ; que les principes d'égalité et de "traitement équitable" posés par l'article 3 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites s'opposent à ce que soit institué une discrimination entre les différents régimes de retraite régis par le Code de la sécurité sociale en ce qui concerne les délais de prescription ; de sorte qu'en statuant comme il l'a fait le Tribunal a violé les textes et principes susvisés ;
3 / que Mme X... faisait valoir dans ses conclusions que la requête formée par la CNBF devant le premier président le 19 octobre 1998 pour le recouvrement des cotisations litigieuses n'avait été précédée d'aucune mise en demeure, de sorte qu'en laissant ce moyen sans réponse, le Tribunal a méconnu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / que dénature les bulletins de salaire produits par Mme X... au titre de son activité salariée du 1er juillet 1991 au 31 décembre 1991, le jugement qui énonce au vu de ces documents qu'elle aurait exercé une activité de conseil juridique non salariée avant le 1er janvier 1992, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
5 / qu'il résulte de l'article 3 du décret du 13 juillet 1972 modifié par le décret n° 88-771 du 22 juin 1988 relatif à l'usage du titre de conseil juridique, que l'exercice par une personne non inscrite au barreau, des fonctions de collaborateur juridique dans un cabinet d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation était assimilé à un exercice dans un cabinet de conseil juridique et ne pouvait de ce fait revêtir un caractère libéral mais devait être nécessairement salarié, d'où il suit qu'en ne répondant pas au moyen faisant valoir qu'il n'était pas possible, en vertu de ce texte, de déduire un exercice libéral de la profession de conseil juridique avant 1992, de la circonstance que Mme X... avait exercé des fonctions de collaboratrice juridique au sein d'un cabinet d'avocats aux Conseils avant le 1er janvier 1992, ce qui lui avait permis d'être inscrite sur la liste des conseils juridiques par une décision du procureur de la République du 28 novembre 1991, le Tribunal a méconnu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que les dispositions de l'article 3 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 selon lesquelles "les assurés doivent pouvoir bénéficier d'un traitement équitable au regard de la retraite, quels que soient leurs activités professionnelles passées et le ou les régimes dont ils relèvent" ne sont pas de nature à modifier les règles de compétence déterminées par les dispositions combinées des articles L. 142-1, L. 622-5.3 , L. 723-1 à L. 723-9 et R. 723-1 à R. 723-69 du Code de la sécurité sociale, dont il résulte que les litiges opposant les avocats non salariés à la CNBF, organisation indépendante de celle des professions libérales rattachées au régime des travailleurs non salariés des professions non agricoles et sujette à un contrôle particulier, sont soumis à la juridiction de droit commun et non au tribunal des affaires de sécurité sociale ;
Attendu, ensuite, que les dispositions des articles L. 244-2 et L. 244-3 du Code de la sécurité sociale ne s'appliquant pas au régime d'assurance vieillesse des avocats, ce qui exclut que le recouvrement des cotisations litigieuses ait été subordonné à la mise en demeure préalable dont le régime de prescription est prévu par le second de ces textes, le tribunal d'instance a exactement décidé que soumise, à défaut de dispositions particulières, au délai de l'article 2262 du Code civil, la demande de la CNBF n'était pas prescrite ;
Et attendu, enfin, qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits, le tribunal d'instance a estimé, sans dénaturer des documents qui ne sont pas évoqués par sa décision, et répondant aux conclusions, qu'inscrite en qualité de conseil juridique exerçant son activité à titre individuel à compter du 28 novembre 2001, Mme X... était redevable de la somme réclamée par la CNBF ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de Mme X... et de la Caisse nationale des barreaux français ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille six.