AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Vu l'article 720 du Code général des impôts ;
Attendu, selon ce texte, que les dispositions applicables aux mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèles sont étendues à toute convention à titre onéreux, ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ladite convention ne s'accompagne pas d'une cession de clientèle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une convention d'occupation et d'exploitation d'espaces de restauration, l'Etat, représenté par le préfet de Paris, a, le 4 octobre 1989, confié à la société Publications Willy Fischer (la société PWF) l'exploitation d'un restaurant dénommé "Le X... Colbert" dans des locaux dépendants de la bibliothèque nationale ; que le 20 août 1992, la société PWF a facturé à la société le X... Colbert une somme totale de 8 776 399 francs en contrepartie de la cession du matériel d'exploitation du restaurant, et de diverses prestations effectuées au profit de celle-ci ; que par avenant du 3 septembre 1992 conclu entre l'Etat, représenté par le préfet de Paris, la société PWF et la société Le X... Colbert, cette dernière a été substituée , à compter du 24 août 1992, dans l'ensemble des droits et obligations de la première ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a considéré que la somme de 8 776 399 francs facturée à la société Le X... Colbert matérialisait une convention de successeur, et elle a notifié à celle-ci des redressements de droits d'enregistrement, dont la régularité et le bien fondé ont été contestés devant l'administration, puis le tribunal ; que cette contestation a été accueillie par ce dernier, qui a prononcé l'annulation des deux avis de mise en recouvrement émis à l'encontre de la société ;
Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il avait annulé l'avis de mise en recouvrement n° 94 11 MO 185 du 21 novembre 1994, la cour d'appel a retenu qu'étant substitué à la société PWF dans l'ensemble de ses droits et obligations, la société le X... Colbert avait, vis-à-vis de l'Etat, non seulement le droit mais encore l'obligation de poursuivre les mêmes activités de restauration et de débit de boissons que la société PWF à laquelle elle était tenue de succéder dans toutes ses activités ; qu'elle en a déduit que l'existence de factures émises pour la reprise des moyens permettant la poursuite de l'activité ne suffisait pas à rendre applicable les dispositions de l'article 720 du Code général des impôts, dès lors que la succession de la société Le X... Colbert dans les activités de la société PWF résultait d'un contrat dans lequel l'Etat était partie et non du seul accord des sociétés ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'Etat signataire de l'avenant du 3 septembre 1992 n'avait pas opéré à son initiative et à des fins qui lui étaient propres le remplacement d'un concessionnaire par un autre, mais avait entériné une succession de concessionnaires préalablement organisée à titre onéreux entre les sociétés PWF et Le X... Colbert, la cour d'appel a violé le texte susvisé par refus d'application ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement n° 94 11 MO 185 du 21 novembre 1994, l'arrêt rendu le 6 février 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Le X... Colbert aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Le X... Colbert ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille six.