AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X... a été engagé par l'Institut national de formation et de recherche sur l'éducation permanente (INFREP) en qualité d'animateur de formation technique suivant plusieurs contrats à durée déterminée au cours de la période du 19 octobre 1999 au 31 décembre 2001 ; qu'estimant avoir été lié à l'Institut par un contrat de travail à durée indéterminée, il a saisi la juridiction prud'homale en vue d'obtenir la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée et le paiement de diverses indemnités au titre de la rupture ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Caen, 5 décembre 2003) d'avoir requalifié les contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et de l'avoir condamné au paiement de certaines sommes à titre d'indemnité de requalification, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors selon le moyen :
1 ) que l'office du juge, saisi d'une demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, est seulement de rechercher si, pour l'emploi concerné, il est effectivement d'usage constant de ne pas recourir à un tel contrat, l'existence de cet usage devant être vérifiée au regard du secteur d'activité défini par l'article D. 121-2 du Code du travail ou par un accord collectif étendu ; que méconnaît ainsi son office et viole les articles L. 122-1, L. 12-1-1 3 , L. 122-2-10 et D. 121-2 du Code du travail, l'arrêt qui, pour requalifier les contrats à durée déterminée de M. X... en un contrat à durée indéterminée, omet de procéder à la recherche susvisée et se détermine uniquement par des considérations inopérantes tenant à la durée des contrats successifs et à la nature des missions confiées au salarié ;
2 ) que les contrats souscrits en application de l'article L. 122-1-1 3 du Code du travail, dans les secteurs définis par décret ou par voie de convention où il est d'usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité, dérogent nécessairement au droit commun des contrats à durée déterminée selon lequel ceux-ci, quel que soit leur motif, ne peuvent avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; de sorte que viole le texte susvisé, ensemble les articles L. 122-1 et D. 121-2 du Code du travail et les articles 5-4-3 et 5-4-4 de la Convention collective des organismes de formation, l'arrêt qui requalifie la relation de travail en considérant que le salarié avait été affecté à des tâches liées à "l'activité normale et permanente" de l'entreprise (arrêt p. 4, al.2) ;
3 ) enfin, qu'en reconnaissant même au juge du fond la possibilité de se déterminer par des considérations tenant à la durée des contrats successifs et à la nature des missions confiées au salarié, prive sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1 et L. 122-1-1 3 du Code du travail, la cour d'appel qui omet de s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la circonstance déterminante selon laquelle les missions confiées à M. X... dépendaient du résultat d'appels d'offre émis périodiquement par le conseil général de Basse Normandie, de telle sorte qu'il était impossible pour l'INFREP de créer un poste à durée indéterrminée pour ce type d'activité ;
Mais attendu que selon l'article 5.4.1de la convention collective nationale des organismes de formation, les contrats de travail sont, de façon générale, conclus à durée indéterminée ; qu'il résulte de l'article 5.4.3 que les formateurs peuvent être embauchés sous contrats à durée déterminée pour des opérations de formation et d'animation dès lors qu'il s'agit d'actions limitées dans le temps requérant des intervenants dont les qualifications ne sont pas normalement mises en oeuvre dans les activités de formation de l'organisme, dans le cas d'activités réputées permanentes si la dispersion géographique des stages, leur caractère occasionnel ou l'accumulation de stages sur une même période ne permettent pas à l'effectif habituel permanent à temps plein ou à temps partiel d'y faire face ; que les contrats interrompus régulièrement pour les périodes de congés sont présumés correspondre à l'activité normale et permanente de l'organisme et ne relèvent pas du présent article ;
Et attendu que la cour d'appel a constaté que M. X... avait été employé pendant une période continue de 26 mois pour dispenser des formations de même nature à des stagiaires souhaitant acquérir une formation professionnelle dans le même domaine, préparant un diplôme d'enseignement technique reconnu par l'éducation nationale, de sorte qu'il avait exercé durablement ses fonctions de formateur dans le cadre d'un emploi correspondant à l'activité normale et permanente de l'INFREP ; que faisant application des dispositions conventionnelles susvisées dont il résulte que le recours aux contrats à durée déterminée n'est pas d'un usage constant dans l'activité des organismes de formation pour l'emploi concerné, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Institut National de formation et de recherches sur l'éducation permanente aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille six.