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02/02/2006 | FRANCE | N°04-47786

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 février 2006, 04-47786


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 septembre 2004), que M. X..., ancien PDG de l'Imprimerie Bruno X..., a été, après reprise de cette société dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, embauché en qualité de "directeur opérationnel" par la SARL Imprimerie X... le 3 mars 1999 ; que par lettre du 28 septembre 2001, il a été licencié pour faute grave, notamment en raison de propos injurieux à l'encontre du gérant de la sociét

é ;

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif d'avoir considéré que le licen...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 septembre 2004), que M. X..., ancien PDG de l'Imprimerie Bruno X..., a été, après reprise de cette société dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, embauché en qualité de "directeur opérationnel" par la SARL Imprimerie X... le 3 mars 1999 ; que par lettre du 28 septembre 2001, il a été licencié pour faute grave, notamment en raison de propos injurieux à l'encontre du gérant de la société ;

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif d'avoir considéré que le licenciement de M. X... reposait sur une faute grave, alors, selon le moyen :

1 / que les juges du fond ne peuvent méconnaître les termes ni l'objet du litige ; qu'en l'espèce, M. X... soutenait explicitement, à propos des problèmes relationnels invoqués par l'employeur, que "les motifs invoqués par l'entreprise doivent reposer sur des éléments objectifs, concrets et certains, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, les éléments auxquels il est fait référence ressortant de la simple affirmation qui reste au compte de l'Imprimerie X..." (cf conclusions d'appel de M. X..., prod. 2 p. 6) ; qu'en affirmant néanmoins que M. X... ne contestait pas avoir mis en cause M. de Y... dans les termes rapportés par les deux attestants, la cour d'appel a méconnu les termes et l'objet du litige, et partant violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / qu'en tout état de cause, le salarié dispose dans l'entreprise d'une liberté d'expression dont le respect s'impose à l'employeur ; que les limites que l'employeur est susceptible d'apporter à cette liberté doivent être justifiées par un besoin social impérieux, et strictement proportionnées au but légitime poursuivi, qui ne peut qu'être la protection de la réputation d'autrui s'agissant de propos injurieux tenus dans l'entreprise ; que ces exigences fondamentales commandent donc de tenir compte notamment de l'ancienneté et de l'âge du salarié, de l'existence ou non de sanctions antérieures, et de l'intention de nuire ayant ou non animé le salarié ; qu'en l'espèce, en considérant que les seuls propos imputés au salarié justifiaient son licenciement immédiat sans aucune indemnité, sans à aucun moment prendre en considération le fait que ces propos, fussent-ils avérés, avaient été tenus lors d'une réunion de direction en petit comité, par un salarié qui était alors âgé de 51 ans, qui avait développé l'entreprise portant encore son nom, qui avait une grande ancienneté, qui n'avait jamais été sanctionné auparavant, et contre lequel n'avait été établie aucune intention de nuire à l'entreprise, la cour d'appel, qui n'a dès lors pas recherché si la sanction prononcée ne portait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression du salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 120-2 et L. 122-6 du Code du travail ;

Mais attendu que si le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, d'une liberté d'expression à laquelle il ne peut être apporté que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, il ne peut abuser de cette liberté en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs ;

qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche du moyen, la cour d'appel a relevé que les qualificatifs de sournois, manipulateur, malhonnête étaient d'autant plus reprochables à M. X... qu'ils avaient été adressés au gérant devant témoins et qu'ils ne pouvaient être justifiés ni par un accès de colère, ni par le contexte de la réunion, l'attitude ou les propos des autres participants ; qu'elle a pu décider que ce comportement rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé dans aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04-47786
Date de la décision : 02/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai (chambre sociale), 29 septembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 fév. 2006, pourvoi n°04-47786


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BAILLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:04.47786
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