AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X..., engagée à compter du 14 avril 1994 par la société Travel World Distribution en qualité d'agent de comptoir, a été licenciée pour faute grave le 5 janvier 2000 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 mai 2003) d'avoir jugé son licenciement fondé sur une faute grave, alors, selon le moyen,
1 / que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ;
qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur n'avait pas méconnu la règle non bis in idem, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'il ressortait de l'attestation de Mme Y..., directeur administratif de l'entreprise, que la salariée avait, après avoir été une première fois sanctionnée en raison de son refus d'assurer un remplacement du 27 au 31 décembre 1999 au sein de l'agence d'Orange, finalement accepté d'assurer ledit remplacement, en sorte que la rupture du contrat de travail se trouvait justifiée par la réitération de son refus ; qu'en statuant ainsi, alors que le seul élément de preuve ainsi retenu émanait d'un représentant de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par les écritures d'appel de Mme X..., qui faisaient valoir que Mme Y... était responsable de l'agence à l'origine du licenciement, la cour d'appel a à tout le moins entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que, lorsque des faits reprochés à un salarié ont donné lieu à un avertissement écrit, ces mêmes faits ne peuvent être invoqués à l'appui d'une décision de licenciement disciplinaire ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme X... de ses demandes, l'arrêt attaqué retient que la salariée avait refusé d'accomplir un remplacement au sein de l'agence d' Orange du 27 au 31 décembre 1999 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les faits invoqués de la sorte dans la lettre de licenciement avaient déjà été sanctionnés aux termes d'un avertissement écrit en date du 29 novembre 1999, la cour d'appel a violé les articles L. 122-40, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu qu'indépendamment du motif surabondant critiqué par la première branche du moyen, la cour d'appel, qui a retenu que l'employeur, en licenciant la salariée, motif pris de la réitération, par lettre du 16 décembre 1999, de son refus de remplacer une collègue du 27 au 31 décembre 1999 en application d'une clause de mobilité, malgré l'avertissement qui lui avait déjà été notifié pour des faits antérieurs de même nature, en a exactement déduit qu'en raison du renouvellement de son refus, la salariée n'avait pas été sanctionnée deux fois pour les mêmes faits ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir jugé son licenciement fondé sur une faute grave alors, selon le moyen :
1 / que l'employeur, tenu d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, a le devoir de fournir au salarié les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa prestation de travail ; qu'en jugeant que le refus de Mme X... d'assurer un remplacement au sein de l'agence d'Orange du 27 au 31 décembre 1999 était constitutif d'une faute grave dès lors que l'employeur avait observé un délai de prévenance suffisant et qu'il appartenait à la salariée de s'organiser en se procurant les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses tâches, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
2 / que, dans ses écritures d'appel, la salariée faisait valoir que la société TWD avait fait un usage abusif de la clause de mobilité insérée dans son contrat de travail en lui imposant d'effectuer, à elle seule, tous les remplacements de ses collègues absents ; qu'en se bornant dès lors, pour juger que le licenciement litigieux reposait bien sur une faute grave, à dire que l'employeur n'avait pas commis de détournement de pouvoir en affectant la salariée à un poste qui était conforme aux stipulations de son contrat de travail et dont la vacance n'était pas contestée, sans par ailleurs se prononcer, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, sur la fréquence avec laquelle la société TWD avait enjoint à Mme X... d'assurer des remplacements au sein de ses différentes agences postérieurement à son congé de maternité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait respecté un délai de prévenance laissant à la salariée un temps suffisant pour s'organiser et se procurer un moyen de locomotion adapté au déplacement demandé et que le refus de la salariée était motivé par la contestation de principe de la clause de mobilité inscrite à son contrat de travail, a pu en déduire que l'employeur n'avait pas abusé de la clause de mobilité ni agi avec une légèreté blâmable ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille cinq.