AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par contrat du 1er avril 1992, M. X..., exploitant un fonds de commerce de café, s'est engagé pendant sept ans à s'approvisionner exclusivement en bières auprès de la société Heineken et Pelforth (la brasserie) ou du distributeur choisi par elle, ce distributeur ayant été désigné au contrat comme étant les Etablissements Lictevout ; que le non-respect des clauses contractuelles était sanctionné par le paiement, à titre d'indemnité de rupture unilatérale, d'une somme égale à vingt pour cent du prix des bières manquantes d'après la quantité fixée aux conditions particulières ;
que le fonds de commerce des Etablissements Lictevout ayant été cédé à la société Etablissements Morieux (le distributeur), M. X... a cessé de s'approvisionner en exclusivité auprès du distributeur ; que celui-ci l'a assigné aux fins de voir ordonner la reprise des achats de bières dans les conditions prévues au contrat et d'obtenir le paiement de dommages-intérêts ; que la brasserie a été appelée en la cause ; que rejetant la demande en reprise des achats de bières, le tribunal a condamné M. X... au paiement d'une certaine somme ; que celui-ci a relevé appel de cette décision ;
Attendu que pour condamner M. X... à payer au distributeur la somme de 137 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt se borne à retenir qu'aucune cause de nullité du contrat du 1er avril 1992 ne peut être reconnue et que ce contrat s'analyse en une stipulation pour autrui valable en toutes ses dispositions ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X... qui invoquait la nullité du contrat "en raison de la faiblesse de l'avantage financier consenti par la brasserie" et du caractère "notoirement déséquilibré" de la convention, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. X... à payer à la société Etablisements Morieux la somme de 137 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 8 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société Etablissements Morieux aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille cinq.