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19/10/2005 | FRANCE | N°04-45910

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 octobre 2005, 04-45910


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., engagé le 2 mai 1974 par la société SCAC Fisons en qualité de technicien supérieur d'expérimentation, a été nommé directeur technique, le 1er août 1983, puis directeur industriel en juillet 1993 ; qu'en septembre 1996, dans le cadre d'un plan de rachat par épargne salariale, il est devenu actionnaire de la société SCAC Fisons et membre du directoire tout en conservant son poste de directeur industriel ; que, selon accord du 18 mai 1998, M. X... a cédé se

s actions à la société Algoflash, étant convenu, dans une annexe à l'acte d...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., engagé le 2 mai 1974 par la société SCAC Fisons en qualité de technicien supérieur d'expérimentation, a été nommé directeur technique, le 1er août 1983, puis directeur industriel en juillet 1993 ; qu'en septembre 1996, dans le cadre d'un plan de rachat par épargne salariale, il est devenu actionnaire de la société SCAC Fisons et membre du directoire tout en conservant son poste de directeur industriel ; que, selon accord du 18 mai 1998, M. X... a cédé ses actions à la société Algoflash, étant convenu, dans une annexe à l'acte de cession, que son contrat de travail serait "maintenu en l'état" et que sa fonction serait : "directeur technique en charge des homologations du groupe Algoflash" ; que, soutenant que l'employeur avait modifié les éléments essentiels de son contrat de travail et qu'il était victime d'une dégradation de sa situation, M. X... a, par lettre du 7 janvier 1999, pris acte de la rupture et , le 15 janvier suivant, a saisi le conseil de prud'hommes, notamment d'une demande de résiliation du contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué (Orléans, 27 mai 2004) de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes, alors, selon le moyen, qu'en se déterminant au vu des conclusions déposées par la société SCAC Fisons le 15 avril 2004, jour même de l'audience des débats, le privant de la possibilité d'y répondre utilement, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde et des libertés fondamentales et l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la procédure prud'homale étant orale, les moyens et conclusions des parties sont présumées avoir été contradictoirement discutés devant les juges du fond ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens, réunis :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, alors, selon le moyen :

1 / que ne constitue pas une acceptation claire et non équivoque d'une modification du contrat de travail la signature, par le salarié, d'une annexe à un acte de cession d'actions déclarant d'une part : "je vous confirme que votre contrat de travail avec la société SCAC Fisons sera maintenu en l'état" et, d'autre part : "votre fonction sera directeur technique en charge des homologations pour les sociétés du Groupe Algoflash" ; que la signature d'un tel acte n'emporte pas renonciation claire et non équivoque du salarié à l'ensemble des attributions et responsabilités issues du contrat "maintenu" ; qu'en se fondant sur un tel acte pour décider que de nouvelles fonctions de "directeur technique", dont elle n'a nullement précisé la nature, se seraient substituées, avec son accord, aux fonctions de M. X... résultant de son contrat antérieur, expressément "maintenu en l'état", la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du Code civil ;

2 / qu'en ne répondant pas aux écritures de M. X... en date du 2 janvier 2004, appuyées de pièces objectives, démontrant que, dans les semaines ayant suivi la signature de l'acte de cession, ses attributions antérieures lui avaient été brutalement et autoritairement retirées, la cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé les articles 455 et 954 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'en qualifiant de simple projet une modification de poste que l'employeur avait imposée au salarié, d'abord oralement, le 21 décembre 1998, puis en lui transmettant le 5 janvier 1999, à sa demande, une "fiche de poste" définissant ses nouvelles fonctions, enfin en confirmant ces nouvelles attributions, le 8 janvier 1999, par l'intermédiaire de son nouveau supérieur hiérarchique Thierry Y... en dépit du refus expressément manifesté par le salarié lors d'une réunion du 7 janvier, la cour d'appel, qui a dénaturé les éléments qu'elle visait, a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant constaté qu'au moment de la cession d'actions, M. X... avait accepté de devenir directeur technique en charge des homologations pour les sociétés du groupe Algoflash, et que l'employeur avait ainsi répondu au souhait qu'il avait exprimé de rejoindre la structure laboratoire Algochimie, puis, qu'à compter de mai 1998, il avait mené les actions principales en cours d'homologations, sans agir sous la subordination d'un autre cadre dirigeant, mais en en référant directement au président du groupe Algoflash , la cour d'appel, répondant aux conclusions, a pu en déduire, d'une part, qu'il avait donné son accord à la modification intervenue de ses fonctions et attributions et, d'autre part, qu'il n'avait pas subi la rétrogradation et la détérioration de ses conditions de travail qu'il alléguait durant la période allant de mai à décembre 1998 ;

Attendu, ensuite, que si l'employeur ne peut imposer au salarié une modification de son contrat de travail, il peut lui proposer une modification et si le salarié refuse, renoncer à la modification envisagée ;

qu'il en résulte que lorsque l'employeur a renoncé à sa proposition, le salarié ne peut, à défaut de modification imposée, se considérer comme licencié ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que l'employeur, après avoir proposé, le 21 décembre 1998, à M. X..., la nouvelle fonction de responsable de l'activité "risques", avec une diminution de sa rémunération, sous l'autorité hiérarchique du directeur industriel d'une unité de contrôle devant être installée sur un nouveau site en août 1999, avait cependant ultérieurement renoncé à cette proposition de modification ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :

1 / qu'en cas de litige relatif à l'application de l'article L. 122-49 du Code du travail, le salarié demandeur a la charge d'établir "des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement" ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, M. X... avait versé aux débats d'appel plus de 10 attestations de salariés de la SCAC Fisons de nature à établir les conditions de travail insupportables imposées dans l'entreprise après la prise de contrôle par Algoflash et les faits de harcèlement dont lui-même avait été victime, plusieurs certificats médicaux constatant une dégradation de son état de santé que les praticiens attribuaient formellement à ses conditions de travail, enfin plusieurs courriers et décisions pénales démontrant que, même pendant la suspension pour maladie de son contrat de travail, l'employeur avait persisté à le poursuivre de sa vindicte ; que les faits établis par ces éléments concordants, dont la cour d'appel n'a pas remis la sincérité en cause, étaient de nature à "permettre de présumer l'existence d'un harcèlement" ; qu'en déboutant cependant le salarié de sa demande par réfutation exclusive de chacun des éléments ainsi produits, la cour d'appel, qui a reporté exclusivement sur le salarié la charge de la preuve du harcèlement, qui ne lui incombait pas, a violé l'article L. 122-52 du Code du travail ;

2 / que la maladie du salarié n'emporte pas rupture du contrat de travail, ni ne délivre les parties de leur obligation de loyauté ;

qu'en écartant le moyen pris, par M. X..., de ce que les plaintes pénales successives pour usage de faux et/ou subornation de témoins déposées par la SCAC contre son salarié, qui toutes avaient tourné à sa confusion et abouti au "blanchiment" de M. X... par la juridiction pénale, étaient postérieures à la suspension du contrat de travail pour maladie et ne pouvaient, dès lors, "accréditer un quelconque harcèlement pendant le contrat de travail", la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, faisant l'exacte application de la règle de preuve de l'article L. 122-52 du Code du travail, a retenu que le salarié n'établissait pas qu'il avait été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral durant l'exécution du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le cinquième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société SCAC Fisons ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04-45910
Date de la décision : 19/10/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans (chambre sociale), 27 mai 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 oct. 2005, pourvoi n°04-45910


Composition du Tribunal
Président : Président : Mme MAZARS conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.45910
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