AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 4 février 2003, RG n° 2002/12908) que, par acte du 25 septembre 1992, Mme Laure X... et M. Alain X... (les consorts X...) ont promis de céder les parts sociales qu'ils détenaient dans la SARL X... à la société SDBO, la promesse étant valable jusqu'au 31 décembre 1992, date à laquelle la société SDBO a notifié la levée d'option ; que, par acte authentique du 25 février 1993, la cession a été réitérée par les consorts X... au profit de la société SDBO ; que Mme X... ayant été mise en liquidation judiciaire le 8 décembre 1992, le juge-commissaire a, par ordonnance du 17 mai 1993, autorisé M. Y..., liquidateur judiciaire, à entériner la cession, ce qui fut réalisé par acte authentique du 16 juin 1993 ; que, sur opposition de Mme X..., le tribunal, par jugement du 2 décembre 1999, a annulé l'ordonnance du juge-commissaire ; que par acte du 25 juin 2001, le liquidateur et M. X... ont assigné la société CDR Créances, venant aux droits de la société SDBO, pour voir constater la nullité de la cession des parts sociales ;
Attendu que le liquidateur et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir, en confirmant le jugement, déclaré irrecevable l'action en nullité de la cession de parts sociales de la SARL X..., alors, selon le moyen :
1 / que la promesse de vente consentie sous condition de la levée de l'option par l'acheteur est une promesse unilatérale qui n'est réalisée qu'au jour de ladite levée, date à laquelle s'apprécient les pouvoirs du vendeur ; qu'en considérant que la levée de l'option par la société CDR Créances constituait une condition suspensive dont la réalisation rétroagissait au jour de la promesse de vente de sorte qu'à cette date, antérieure au jugement de liquidation judiciaire, Mme X... avait le pouvoir de consentir seule à la vente, la cour d'appel a violé les articles 1168, 1174, 1589 du Code civil et L. 622-9 du Code de commerce ;
2 / que par l'effet du dessaisissement inhérent au jugement de liquidation judiciaire, le débiteur est privé du droit de disposer de ses biens et notamment de consentir un transfert de leur propriété après réalisation d'une condition ; qu'ainsi, en l'espèce où d'un commun accord entre les parties, il a été nécessaire de réitérer la vente des "actions" par actes authentiques postérieurs au jugement de liquidation judiciaire de Mme X..., la cour d'appel, en considérant que la validité du transfert de la propriété des actions n'était pas affectée par cette liquidation judiciaire dès lors que par l'effet de la réalisation de la condition, la vente était parfaite à la date de la signature de la promesse antérieure au jugement de liquidation judiciaire, a violé les articles L. 622-9 du Code de commerce et 1179 du Code civil ;
3 / que la prescription ne court pas contre celui qui ne peut agir ; qu'en refusant d'admettre que le liquidateur était dans l'impossibilité d'agir en nullité des actes de cession des 25 septembre 1992 et 25 février 1993 passés par Mme X... seule tant que l'ordonnance du juge-commissaire, qui l'avait autorisé à procéder à la réitération de la vente par acte du 16 juin 1993 n'avait pas été rétractée, la cour d'appel a violé les articles 1304 et 2251 du Code civil ;
Mais attendu qu' après avoir relevé que lorsqu'elle a signé la promesse de cession des parts sociales, le 25 septembre 1992, Mme X..., alors maîtresse de ses biens, avait pleine capacité d'agir et de s'engager, l'arrêt retient exactement que les actes juridiques accomplis par le débiteur en liquidation judiciaire, dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, ne sont pas frappés de nullité mais d'inopposabilité à la procédure collective et que seul ce fondement aurait pu être invoqué par le liquidateur à l'encontre de l'acte du 25 février 1993 ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y..., ès qualités, et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société CDR Créances ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille cinq.