LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° P 04-42.555 au n° 04-42.600 ;
Attendu que le 12 mars 1999 a été conclu un accord-cadre relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail dans les établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées relevant de la convention collective du 15 mars 1966 ; qu'un accord d'entreprise répondant aux dispositions de la loi du 13 juin 1998 et du chapitre 1er de l'accord-cadre susvisé a été signé le 20 décembre 1999 entre l'association AFAPEI et les organisations syndicales CFDT, CGT et FO ; que l'agrément ministériel et la conclusion d'une convention avec l'Etat qui conditionnaient la mise en oeuvre de l'accord d'entreprise n'étant intervenus respectivement que les 26 juillet et 19 octobre 2000, l'employeur a maintenu jusqu'à cette dernière date l'horaire de travail à 39 heures hebdomadaires ; que faisant valoir que celui-ci avait l'obligation de fixer, dès le 1er janvier 2000, l'horaire collectif de travail à 35 heures conformément aux dispositions de l'article L. 212-1 bis du Code du travail, un certain nombre de salariés à temps plein et à temps partiel ont saisi la juridiction prud'homale le 1er juin 2001 en paiement de sommes au titre de l'indemnité de réduction du temps de travail ;
Sur les pourvois principaux de l'employeur :
Sur le premier moyen :
Attendu que l'association fait grief aux jugements (conseil de prud'hommes de Calais, 13 février 2004) d'avoir accueilli la demande des salariés, alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte expressément des dispositions cumulées de l'accord national de branche du 1er avril 1999 et de l'accord-cadre du 12 mars 1999 que la mise en place de la réduction du temps de travail est subordonnée à la conclusion d'un accord d'entreprise ;
2 / que ledit accord d'entreprise ne peut être mis en oeuvre qu'après l'agrément par le ministère du Travail selon les dispositions de l'article 16 de la loi du 30 juin 1975 ;
3 / qu'il résulte des dispositions de l'accord d'entreprise que l'application de celui-ci était subordonnée à la conclusion d'une convention d'aide de l'Etat pour bénéficier de l'aide prévue par la loi "Aubry I" ; qu'en conséquence l'AFAPEI était en droit d'attendre le 31 octobre 2000 pour réaliser la mise en place de la réduction du temps de travail ; qu'il s'ensuit que la cassation desdits jugements est encourue de ces chefs ;
Mais attendu qu'en l'état d'un accord collectif fixant la durée du travail à 35 heures et prévoyant le versement d'une indemnité de réduction du temps de travail pour maintenir le salaire à son niveau antérieur, les salariés qui ont continué à travailler pendant 39 heures par semaine ont droit à cette indemnité et au paiement des heures accomplies au-delà de 35 heures majorées de la bonification alors applicable ;
Et attendu, d'une part, que l'article 14 de l'accord-cadre susvisé dispose que, conformément à l'article L. 212-1 bis du Code du travail alors en vigueur, la durée du travail est fixée à 35 heures hebdomadaires au plus à compter du 1er janvier 2000 dans les entreprises dont l'effectif est de plus de 20 salariés ; que, d'autre part, l'article 18 du même accord prévoit le maintien du salaire lors de la réduction de la durée du travail par la création d'une indemnité de réduction du temps de travail correspondant à la différence entre le salaire conventionnel base 39 heures et le salaire conventionnel correspondant à la durée du travail après réduction du temps de travail à 35 heures, cette indemnité s'ajoutant au salaire base 35 heures ; que l'application des textes susvisés à compter du 1er janvier 2000 n'est pas subordonnée à la conclusion d'un accord d'entreprise prévu en cas d'anticipation, avant cette date, de la réduction du temps de travail, ni à la mise en oeuvre effective dans l'entreprise ou l'établissement de la réduction du temps de travail ; qu'ayant constaté que les salariés avaient continué à travailler 39 heures par semaine, le conseil de prud'hommes a exactement décidé qu'ils avaient droit, à compter du 1er janvier 2000, au paiement de l'indemnité conventionnelle de réduction du temps de travail ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'association fait grief aux jugements de l'avoir condamnée à payer aux salariés à temps partiel une somme au titre de l'indemnité de réduction du temps de travail, alors, selon le moyen, que, par nature et par définition, les salariés à temps partiel, c'est-à-dire ceux dont l'horaire avant la réduction du temps de travail était inférieur à la durée légale ou conventionnelle, n'ont en fait et en droit effectué aucune heure supplémentaire au sens de l'article L. 212-5 du Code du travail après le 1er janvier 2000, dont le paiement aurait dû intervenir par le moyen de l'indemnité de réduction du temps de travail, laquelle a, pour finalité, de maintenir pour 35 heures la rémunération antérieure basée sur 39 heures ;
Mais attendu que l'accord-cadre susvisé dispose en son article 18 que l'indemnité de réduction du temps de travail s'applique également aux salariés à temps partiel ;
Et attendu qu'ayant fait ressortir que les salariés concernés, à temps partiel, doivent bénéficier proportionnellement des avantages consentis aux salariés à temps plein, le conseil de prud'hommes n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique des pourvois incidents des salariés qui ne serait pas de nature à permettre l'admission des pourvois :
REJETTE les pourvois tant principaux qu'incidents ;
Condamne l'AFAPEI aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de chaque salarié ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille cinq.