La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2005 | FRANCE | N°04-10038

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 juin 2005, 04-10038


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 septembre 2003), que la société JB distribution, exploitant un commerce en franchise dans le cadre d'un contrat conclu avec la Société lyonnaise de développement commercial (la SLDC), a, contrairement à la majorité des membres du réseau, refusé d'agréer le cessionnaire choisi par ce franchiseur ; que les parties ayant convenu que le contrat de franchisage poursuivrait ses effets

jusqu'à son terme, la société JB distribution a dénoncé ce contrat en reprocha...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 septembre 2003), que la société JB distribution, exploitant un commerce en franchise dans le cadre d'un contrat conclu avec la Société lyonnaise de développement commercial (la SLDC), a, contrairement à la majorité des membres du réseau, refusé d'agréer le cessionnaire choisi par ce franchiseur ; que les parties ayant convenu que le contrat de franchisage poursuivrait ses effets jusqu'à son terme, la société JB distribution a dénoncé ce contrat en reprochant à la SLDC de ne plus assumer ses obligations d'approvisionnement et de promotion, puis a assigné celle-ci en indemnisation de son préjudice ;

Attendu que la SLDC fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à ce titre au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :

1 / que le franchiseur, dès lors qu'il conserve le droit de céder le réseau de magasins dont il est chef de file, sauf pour lui à ce que son cessionnaire ne modifie pas l'économie des contrats de franchise en cours et la situation juridique ou économique des franchisés, ne saurait être tenu, une fois la cession intervenue, dans ses relations avec les franchisés ayant refusé d'agréer le cessionnaire et nouveau franchiseur, d'assurer l'animation et le développement d'un réseau identique et dont il n'est plus titulaire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil,

2 / qu'en se déterminant par ces motifs, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si l'article 2.7 du contrat de franchise, qui précisait que le financement des actions promotionnelles était assuré par une cotisation prélevé sur les franchisés et proportionnelle au chiffre d'affaires réalisé par ces deniers, n'aboutissait pas, fatalement, à faire dépendre le montant affecté par le franchiseur à ces actions du nombre de franchisés, si bien que ce montant pouvait varier, indépendamment de la volonté des parties, sans générer aucune faute de la part du franchiseur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil,

3 / que constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et à l'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée ; que, pourvu que le forfait convenu ait pour but de réparer le dommage lié à l'inexécution du contrat, il est indifférent que ce forfait tienne compte du préjudice réellement éprouvé par le créancier, la pénalité pouvant lui être supérieure ou inférieure; qu'en l'espèce, le contrat précisait, en son article 12.2, que "pour le cas où le contrat de franchise prendrait fin par anticipation, en raison de fautes commises par le franchiseur, le franchisé pourra réclamer au franchiseur une indemnité établie et calculée dans les mêmes conditions que ci-dessus" ; que l'article 12.1, relatif à la résiliation aux torts du franchisé, et auquel renvoyait l'article 12.2, stipulait que dans ce cas, "le franchisé devra verser au franchiseur, à titre d'indemnité forfaitaire de rupture, une indemnité égale à la moitié des redevances proportionnelles qui auraient été dues pour le temps restant à courir du contrat, estimée sur la base des douze derniers mois" ; qu'en estimant, en dépit de ces dispositions claires et précises, que l'article 12.2 du contrat n'avait pas "la nature d'une clause pénale liant le franchiseur", sous prétexte, notamment, que les modalités de calcul de l'indemnité forfaitaire que le franchisé était susceptible de réclamer en cas d'inexécution ne tenaient pas compte de son préjudice réel, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1152 et 1226 du Code civil,

4 / que dès lors que le forfait mis à la charge d'une partie a pour but de réparer le dommage lié à l'inexécution du contrat, aucune exigence sacramentelle n'impose que la clause pénale soit rédigée dans les termes utilisés, pour la définir, par l'article 1226 du Code civil ; qu'en l'espèce, le contrat de franchise précisait, en son article 12.2, que "pour le cas où le contrat de franchise prendrait fin par anticipation, en raison de fautes commises par le franchiseur, le franchisé pourra réclamer au franchiseur une indemnité établie et calculée dans les mêmes conditions que ci-dessus" ; que l'article 12.1, relatif à la résiliation aux torts du franchisé, et auquel renvoyait l'article 12.2, stipulait que dans ce cas, "le franchisé devra verser au franchiseur, à titre d'indemnité forfaitaire de rupture, une indemnité égale à la moitié des redevances proportionnelles qui auraient été dues pour le temps restant à courir du contrat, estimée sur la base des douze derniers mois" ; qu'en estimant, nonobstant ces dispositions claires et précises, que l'article 12.2 du contrat n'avait pas "la nature d'une clause pénale liant le franchiseur", sous prétexte, notamment, que le contrat ne mentionnait pas que le franchiseur "pour assurer l'exécution de la convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution, selon les termes de l'article 1226 du Code civil", la cour d'appel a derechef violé les articles 1134, 1152 et 1226 du Code civil ;

5 / que sauf à ce qu'un dol lui soit imputable, le débiteur d'une obligation contractuelle n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus lors du contrat ; que, conformément à ce principe, le préjudice susceptible d'être réparé par le franchiseur en cas de rupture anticipée du contrat ne saurait être constitué par des frais, engagés par le franchisé, dont il n'est pas démontré qu'ils étaient indispensable à sa reconversion ; qu'en se bornant à énoncer, pour réparer le préjudice allégué par la société JB distribution, que celle-ci justifiait avoir effectué des dépenses nécessaires à sa reconversion à concurrence de 59 455,12 euros, sans constater, comme elle y était expressément invitée, que les dépenses évoquées étaient indispensables au passage de la société JB distribution sous une nouvelle enseigne, et qu'elles étaient prévisibles lors de la formation du contrat de franchise, la cour d'appel a méconnu les exigences du principe de prévisibilité et de ce chef violé l'article 1150 du Code civil,

6 / qu'en matière contractuelle, les dommages et intérêts ne doivent comprendre à l'égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé que ce qui est une conséquence immédiate et directe de l'inexécution ; que, conformément à cette exigence, le préjudice susceptible d'être réparé par le franchiseur en cas de rupture anticipée du contrat ne saurait être étendu à des dépenses qui ne constituaient pas la suite directe de l'inexécution, parce qu'il n'était pas établi qu'elles étaient indispensables à la reconversion du franchisé ; qu'en se bornant à énoncer, pour réparer le préjudice allégué par la SARL JB distribution, que cette dernière justifiait avoir effectué des dépenses nécessaires à sa reconversion à concurrence de la somme de 59 455,12 euros, sans rechercher ni constater, comme elle y était invitée, que lesdits frais étaient indispensables au passage de la société JB distribution sous une nouvelle enseigne, de sorte que le préjudice allégué pouvait être considéré comme une suite directe et immédiate de l'inexécution des obligations de la SLDC, la cour d'appel a violé l'article 1151 du Code civil ;

7 / que le juge ne pouvant augmenter la peine convenue que si celle-ci présente un caractère "manifestement dérisoire", ce caractère n'est pas établi par le simple constat que le forfait déterminé par les parties est inférieur au montant réel du dommage ; qu'en se bornant à énoncer, pour augmenter le montant de la pénalité prévue par le contrat de franchise, que celle-ci était manifestement dérisoire "eu égard au préjudice réellement subi" par la société JB distribution, la cour d'appel qui, par delà cette motivation de pure forme, ne s'est en réalité aucunement expliquée sur le caractère manifestement dérisoire de la pénalité litigieuse, a violé l'article 1152 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a pas exigé que le franchiseur assure l'animation et le développement d'un réseau identique à celui existant avant la cession, mais appréciant son comportement au regard des obligations essentielles restant lui incomber à l'égard d'un franchisé minoritaire, et retenant une succession de manquements de plus en plus graves aux obligations contractuelles, dès lors que l'approvisionnement du magasin n'était plus assuré correctement et que les opérations promotionnelles n'étaient plus effectuées, en a exactement déduit que la rupture du contrat de franchise était imputable au franchiseur qui avait manqué à ses obligations contractuelles ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant ainsi constaté l'absence de toute opération promotionnelle, la cour d'appel a par là-même répondu, en les écartant, aux conclusions objectant l'existence d'une simple variation, dans les termes du contrat, des dépenses consacrées à cette activité ;

Attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel ayant écarté la qualification de clause pénale en retenant que le franchiseur n'était pas tenu d'un engagement ferme et définitif en cas d'inexécution fautive, le moyen s'attaque en ses troisième et quatrième branches à des motifs surabondants ;

Attendu, en quatrième lieu, que l'arrêt retenant qu'à la suite de la rupture anticipée du contrat de franchise, la société JB distribution a été contrainte de s'affilier à un nouveau réseau et d'engager des frais pour assurer cette reconversion, et qu'elle justifie avoir effectué des dépenses nécessaires liées à cette reconversion à concurrence de 59 455, 12 euros, la cour d'appel s'est livrée aux recherches prétendument omises quant au caractère indispensable et prévisible de ces dépenses en cas d'inexécution du contrat par le franchiseur ;

Et attendu, enfin, que le moyen s'attaque en sa dernière branche à des motifs surabondants ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en ses deux premières branches, et ne peut être accueilli pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société lyonnaise de développement commercial aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la condamne à payer à la société JB distribution la somme de 2 000 euros, et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 04-10038
Date de la décision : 28/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (3e chambre civile), 25 septembre 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 jui. 2005, pourvoi n°04-10038


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.10038
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award