AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause MM. Yves et Bruno X... ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 10-3 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Attendu que le droit de préemption reconnu au locataire lors de la vente consécutive à la division initiale ou à la subdivision de tout ou partie d'un immeuble par lots ne s'applique pas aux ventes portant sur un bâtiment entier ou sur l'ensemble des locaux à usage d'habitation ou à usage mixte dudit bâtiment ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 janvier 2004), que les consorts Y... ont procédé à la division en quatre lots d'un immeuble donné en location, suivant état descriptif de division publié à la conservation des hypothèques les 7 août 1989 et 15 janvier 1990 ; qu'au mois d'août 1989 la commune d'Uzès a exercé son droit de préemption et a acquis un des lots ; que, par acte du 2 juillet 1994 M. Z... et M. X... ont promis d'acquérir "conjointement pour le tout et divers pour moitié" l'ensemble des lots restant disponibles ; que les actes notariés sont intervenus le 22 octobre 1994 au profit de M. Z... et de la société civile immobilière Saint-Julien, dont M. X... était associé ; que Mme A..., locataire d'une partie de l'immeuble depuis 1950, a demandé la nullité de ces actes et la reconnaissance de son droit de préemption sur les locaux par elle loués ;
Attendu que pour rejeter ces demandes, l'arrêt retient que c'est la cession à la commune d'Uzès exerçant son droit de préemption en août 1989 sur un logement qui n'était pas loué aux consorts A... qui a opéré la première division de l'immeuble litigieux ; que cette cession est sans incidence sur le litige concernant Mme A... et que les cessions consenties par acte du 2 juillet 1994 à M. X... et à M. Z..., qui s'étaient organisés pour acquérir ensemble la totalité de l'immeuble disponible après l'exercice par la commune de son droit de préemption, constituaient une "vente en bloc" de ce bien ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'après la publication de l'état descriptif de division, un lot à usage d'habitation avait été cédé à titre onéreux, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne les consorts Z...-X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de civile, condamne les consorts Z...-X... à payer à Mme A... la somme de 2 000 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts Z...-X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille cinq.