AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Central auto a commandé en septembre 1999 un véhicule automobile à la société Altrans qui a tiré sur elle-même une lettre de change à échéance du 31 décembre 1999 pour la somme de 13 091,56 euros ; que l'effet a été accepté par la société Central auto et mis à l'escompte par la société Alltrans auprès de sa banque, la société Bonnasse lyonnaise de banque (la banque) le 26 septembre 1999 ; que la lettre de change n'ayant pas été payée à son échéance, la banque a assigné le tiré en paiement ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 511-12 du Code de commerce ;
Attendu que, pour rejeter la demande en paiement formée par la banque contre le tiré, l'arrêt retient qu'au 26 septembre 1999 le compte était débiteur, malgré la mise à disposition le 10 septembre 1999 d'un prêt de 130 000 francs, que, redevenu créditeur pour 22 286,15 francs le 27 septembre 1999 que par l'effet d'un virement de 50 000 francs, il était au 30 septembre 1999 à nouveau très largement débiteur ; que ce compte a connu un incident de paiement au mois de juillet 1999, quatre incidents au mois d'août 1999, seize incidents au mois de septembre 1999 ; que la banque a refusé d'escompter une seconde lettre de change émise dans les mêmes conditions le 27 septembre 1999, et que, dans ce contexte d'une trésorerie critique, l'escompte de la seule lettre de change de 85 875 francs, acceptée par la société Central auto, révèle l'intention de la banque d'user des garanties du droit cambiaire et de réduire le débit du compte de sa cliente par un transfert de risque opéré en connaissance de cause au détriment de la société Central auto ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, desquels il ne résulte pas que la banque savait, à la date où elle a escompté la lettre de change, que la provision de celle-ci ne serait pas constituée à son échéance ou que la situation de la société Alltrans était irrémédiablement compromise, et qu'ainsi elle avait conscience, à ce moment, d'empêcher la société Central auto de se prévaloir de l'exception de défaut de provision, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y a lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau ;
Condamne la société Central auto aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Central auto ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille cinq.