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31/05/2005 | FRANCE | N°03-16440

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 31 mai 2005, 03-16440


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 13 février 2003) que MM. X... et Y... ont été chargés d'une mission d'architecte par la commune d'Issenheim en vue de la construction d'une maison de retraite, le gros oeuvre étant effectué par l'entreprise Savonitto, aux droits de laquelle se trouve la société Dumez-Anstett ; que la société Jacob intervenue à la demandes des architectes pour assurer divers travaux, a fait assigner MM. X... et Y... ainsi que la société Dumez-An

stett devant le tribunal de grande instance de Strasbourg, aux fins de paie...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 13 février 2003) que MM. X... et Y... ont été chargés d'une mission d'architecte par la commune d'Issenheim en vue de la construction d'une maison de retraite, le gros oeuvre étant effectué par l'entreprise Savonitto, aux droits de laquelle se trouve la société Dumez-Anstett ; que la société Jacob intervenue à la demandes des architectes pour assurer divers travaux, a fait assigner MM. X... et Y... ainsi que la société Dumez-Anstett devant le tribunal de grande instance de Strasbourg, aux fins de paiement d'une somme de 143 624,60 francs représentant, selon elle, le montant de travaux supplémentaires ; que l'arrêt attaqué a dit, par un moyen relevé d'office, que le litige ne relevait pas de la compétence de la juridiction judiciaire ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Jacob fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / que, lorsque le juge se propose de décliner d'office la compétence des juridictions judiciaires, il a l'obligation d'avertir les parties du moyen qu'il se propose de relever et de les inviter à s'expliquer sur le bien fondé de ce moyen ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce ; que l'arrêt attaqué encourt dès lors la censure pour violation de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que, la circonstance qu'au cours des débats oraux, l'avocat de l'une des parties ait évoqué la question de la compétence, et le fait que l'avocat d'une autre partie lui ait répondu, ne sauraient dispenser le juge d'une réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur le moyen qu'il se propose de relever d'office ; qu'en effet, le conseil du demandeur n'a pas à s'expliquer spécialement sur la compétence dès lors que les explications de l'avocat du défendeur, qui évoque l'incompétence, sont relatives à un moyen irrecevable pour n'avoir pas été invoqué en première instance et in limine litis avant toute défense au fond, et, en toute hypothèse, n'avoir pas été développé par écrit ; que pour avoir adopté une solution contraire, les juges du fond de nouveau ont violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, pour relever d'office l'incompétence de la juridiction judiciaire, s'est fondée sur l'article 92, alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile, a constaté qu'à l'audience du 8 janvier 2003, le conseil des architectes avait fait observer que, bien que le moyen d'incompétence n'ait pas été proposé, l'instance relative à un marché de travaux publics ressortissait normalement à la compétence de la juridiction administrative ; qu'elle a ajouté que le conseil de l'appelante avait répliqué que l'action de celle-ci était fondée sur la gestion d'affaires et relevait donc, selon lui, de la compétence judiciaire ;

que, par ces énonciations, elle a respecté le principe de la contradiction, sans être tenue de provoquer des explications complémentaires écrites des parties, et peu important que le moyen eut été irrecevable selon l'article 74 du nouveau Code de procédure civile, pour n'avoir pas été soulevé par une partie avant toute défense au fond, dès lors que cette obligation ne s'impose pas à la juridiction soulevant elle-même un moyen d'ordre public ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la demanderesse au pourvoi reproche encore à l'arrêt d'avoir décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de l'action en paiement fondée sur la gestion d'affaires dirigée par elle contre la société Dumez-Anstett, alors, selon le moyen :

1 / que, le litige opposant les participants à l'exécution de travaux publics, et relevant comme tel de la compétence administrative, suppose que chacun des participants entretienne un lien contractuel avec le maître de l'ouvrage et que les actes ou les faits qui sont à l'origine du litige se rattachent à l'exécution du contrat conclu avec le maître de l'ouvrage ; qu'en s'abstenant de rechercher si tel était le cas en l'espèce, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790 et de la loi du 28 pluviôse an VIII, ensemble au regard du principe de la séparation des pouvoirs ;

2 / qu'en tout cas, lorsqu'un tiers prend en mains les affaires et l'un des participants à une opération de travail public, dans le cadre d'une gestion d'affaires, leurs rapports, à l'instar des rapports contractuels que le participant au travail public peut contracter avec un tiers, relèvent de la compétence judiciaire ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé la loi du 16-24 août 1790, la loi du 28 pluviôse an VIII, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

Mais attendu, d'une part, que, contrairement à ce qui est soutenu à la première branche du moyen il n'est pas nécessaire que les participants à un travail public soient unis par contrat avec le maître de l'ouvrage pour que le litige les opposant relève de la compétence de la juridiction administrative ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, qui n'a pas retenu l'existence d'une gestion d'affaires alléguée par la société Jacob, a relevé que le litige était fondé sur les conséquences pour une entreprise de la mauvaise exécution par une autre de son marché de travaux publics, et qu'il n'existait aucun contrat de droit privé entre les parties ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision sans violer le principe de séparation des pouvoirs ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Jacob reproche encore à l'arrêt d'avoir décliné la compétence de la juridiction judiciaire, alors, selon le moyen, que pour que la compétence de la juridiction administrative soit retenue, encore faut-il que la partie, qui a la qualité de participant à une opération de travail public, ait agi dans le cadre de la mission que lui a confiée le maître de l'ouvrage ; qu'en s'abstenant de rechercher si, au moment où la société Jacob s'est substituée à la société Savonitto dans le cadre d'une gestion d'affaires, les architectes étaient encore dans la mission de maître d'oeuvre que leur avait confiée le maître de l'ouvrage, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, de la loi du 28 pluviôse an VIII et du principe de la séparation des pouvoirs ;

Mais attendu que la société Jacob ayant fait valoir dans ses conclusions qu'elle réclamait le prix des travaux réalisés par ses soins pour permettre la finition de l'opération de construction, ce dont il résultait que c'était bien dans le cadre de leur mission de maître d'oeuvre que les architectes lui avaient confié lesdits travaux, le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Jacob aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Jacobs, la condamne à payer à la société Dumez Anstett la somme de 2 000 euros et à MM. X... et Y... la somme globale de 1 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 03-16440
Date de la décision : 31/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section A), 13 février 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 31 mai. 2005, pourvoi n°03-16440


Composition du Tribunal
Président : Président : M. ANCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.16440
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