AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X..., avocat allemand, inscrit au barreau de Paris, a, le 15 avril 1994, conclu, en application de l'article 84 du décret du 27 novembre 1991, un contrat de stage avec M. Y..., alors "rechtsanwalt" au barreau de Munich, en vue de l'accomplissement par ce dernier d'un stage au sein de son cabinet parisien ; qu'après renouvellement de ce stage au-delà des prévisions du texte évoqué, M. Y... a lui-même été inscrit, en janvier 2000, en tant qu'avocat au tableau du barreau de Paris ; que leurs relations s'étant dégradées, M. X... a notifié à M. Y... qu'il mettait fin à leur collaboration ; qu'ils ont sollicité l'arbitrage du bâtonnier qui s'est reconnu compétent pour statuer sur le litige né du contrat de collaboration pour la période postérieure à l'inscription de M. Y... au barreau de Paris ;
Sur la recevabilité du mémoire en défense et du pourvoi incident de M. Y..., après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Vu l'article 982 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le mémoire en défense a été signifié au-delà du délai fixé par ce texte ;
Déclare irrecevable le mémoire en défense et, partant, le pourvoi incident de M. Y... ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches, du pourvoi principal de M. X... :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner M. X... à payer à M. Y..., une certaine somme, au titre de la rétrocession mensuelle d'honoraires, pour la période considérée, et une autre somme, au titre du préavis, l'arrêt attaqué retient, par motifs adoptés, qu'aucune modification n'était possible sans l'accord de l'autre partie, sauf, à défaut d'accord, à obtenir la résiliation des conventions à l'initiative de la partie la plus diligente, que M. X... ne pouvait mettre fin à la convention de collaboration sans respecter le délai de deux mois prévu à l'article 17 de l'annexe 7 du règlement intérieur et que M. Y... ne pouvait prétendre imputer ni la cotisation de l'Ordre ni la prime d'assurance responsabilité civile d'avocat, les déductions faites par M. X... étant justifiées, et, par motifs propres, que l'arbitre s'est livré à une juste appréciation des conséquences de la rupture dont M. X... avait pris l'initiative au mépris du préavis et qu'il n'y avait pas lieu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions par lesquelles M. X... avait, pour justifier ses prétentions à voir réduire la rétrocession d'honoraires et à être exonéré du paiement de l'indemnité de préavis, invoqué, d'une part, l'exception d'inexécution des obligations contractuelles de M. Y... et, subsidiairement, le paiement pour le compte de celui-ci de la cotisation de l'Ordre et de l'assurance de responsabilité civile professionnelle, et, d'autre part, des manquements graves aux règles professionnelles, susceptibles d'écarter le préavis, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal de M. X... :
Vu les articles 1832 et 1382 du Code civil ;
Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes reconventionnelles, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que M. Y... ayant perçu un complément de rémunération prenant en compte le résultat d'ensemble du cabinet et pouvant apparaître seul à l'égard des clients, il avait existé, au-delà du contrat de collaboration, une "société de fait" et qu'il était légitime que M. Y... puisse continuer de suivre les dossiers confiés, l'attribution de la clientèle constituant en quelque sorte la liquidation de la société créée de fait ;
Attendu qu'en se déterminant par ces motifs qui ne caractérisent pas l'existence d'une société créée de fait entre avocats, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du second moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté M. Y... de ses demandes, l'arrêt rendu le 18 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant aux autres dispositions, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille cinq.