AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 30 septembre 2003, n° 707), que la société Européenne de conseils et d'études financières (la société Eurocef) a déclaré son état de cessation des paiements auprès du tribunal de commerce de Marseille, qui par décision du 6 juin 1994 s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce d'Auxerre ; que ce tribunal ayant, par jugement du 20 juin 1994, mis la société Eurocef en redressement judiciaire, le Crédit agricole a déclaré sa créance dans le délai légal ; que sur contredit, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement du 6 juin 1994 et renvoyé la procédure devant le tribunal de commerce de Marseille qui, par jugement du 20 juillet 1994, publié au BODACC le 28 août 1994, a ouvert le redressement judiciaire de la société Eurocef et désigné M. X... représentant des créanciers ; que le Crédit agricole a déclaré sa créance le 27 décembre 1994 auprès de ce dernier ;
Attendu que la société Eurocef reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à ce que soit constatée la forclusion de la créance du Crédit agricole, alors, selon le moyen, qu'à défaut de déclaration de leur créance dans un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture concernant leur débiteur, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes, à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ;
que lorsque le jugement ayant initialement ouvert une procédure de redressement judiciaire est infirmé du chef de la compétence et qu'une autre juridiction est désignée, qui ouvre également une procédure collective, les déclarations de créances qui ont été effectuées à la suite du jugement infirmé sont rétroactivement privées de tout fondement juridique, de sorte que les créanciers doivent justifier de déclarations effectuées en bonne et due forme entre les mains du représentant des créanciers désigné par le second jugement d'ouverture, dans les délais prévus par la loi c'est à dire dans le délai de deux mois à compter de la publication de celui-ci au BODACC ; qu'en estimant que le Crédit agricole avait pu, sans encourir la forclusion, déclarer ses créances entre les mains de M. X..., représentant des créanciers de la société Eurocef, plus de deux mois après la publication au BODACC du jugement d'ouverture prononcé par le tribunal de commerce de Marseille, au motif qu'il avait déjà déclaré sa créance entre les mains de M. Y..., désigné par le tribunal de commerce d'Auxerre, avant que l'incompétence de cette juridiction soit reconnue, la cour d'appel, qui a méconnu tout à la fois la portée de l'infirmation du chef de la compétence du premier jugement d'ouverture prononcé par le tribunal de commerce d'Auxerre ainsi que les conséquences s'attachant au jugement d'ouverture prononcé par le tribunal de commerce de Marseille, seule juridiction compétente, a violé les articles L. 621-46 du Code de commerce et 97 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient exactement que l'annulation du jugement du tribunal de commerce d'Auxerre par suite de l'infirmation par la cour d'appel d'Aix-en-provence de la décision d'incompétence du tribunal de commerce de Marseille ne s'étend pas à la déclaration de créance effectuée par le Crédit agricole, dès lors que le tribunal de commerce de Marseille, après que le dossier lui a été retourné par la cour d'appel, a ouvert une procédure collective ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eurocef aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille cinq.