AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a, le 27 septembre 1989, subi une hémorroïdectomie et une sphinctérotomie, réalisées par M. Y..., chirurgien, à la clinique Saint-Jean ; que, le 15 janvier 1990, M. Z..., chirurgien, a pratiqué une dilatation anale sous anesthésie, en raison de la persistance de troubles fonctionnels et de douleurs ; que cette intervention n'a pas permis d'y remédier et que de nouveaux troubles sont apparus ayant nécessité plusieurs opérations ;
que M. X..., ayant gardé des séquelles, a recherché la responsabilité de M. Y... et de la clinique Saint-Jean qui ont été mis hors de cause par jugement devenu définitif du 14 octobre 1999, ainsi que celle de M. Z... ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche qui est préalable :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour déclarer M. Z... responsable des dommages subis par M. X... et le condamner au paiement de différentes indemnités, la cour d'appel relève que la responsabilité de M. Y... et de la clinique Saint-Jean ne peut plus être recherchée, qu'il résulte du rapport d'expertise que l'intervention pratiquée par M. Z... était justifiée sur le plan médical dans la mesure où le patient présentait une sténose qui aurait dû être opérée, que néanmoins il apparaissait que cette intervention n'était pas conforme aux données de la science à l'époque des faits et qu'elle avait entraîné une dilacération antérieure du sphincter anal responsable de la dyschésie rectale dont souffrait le patient, que si un rapport critique établi par un professeur de médecine à la demande de M. Z... exonérait ce dernier de toute faute et insistait sur les erreurs des autres praticiens, il n'avait pas été établi contradictoirement et il était impossible de revenir sur l'absence de faute de M. Y..., que ce document n'émettait que des hypothèses et n'excluait pas la faute de M. Z... dans les causes possibles de l'état de M. X... et qu'il ne saurait, dès lors, remettre en cause de manière probante les conclusions de l'expert judiciaire selon lesquelles l'intervention n'était pas conforme aux données de la science à l'époque des faits ;
Qu'en statuant ainsi, sans expliquer en quoi l'intervention n'était pas conforme aux données de la science à l'époque des faits, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour retenir la responsabilité de M. Z..., l'arrêt attaqué se fonde sur les conclusions de l'expert judiciaire, selon lesquelles l'intervention n'était pas conforme aux données de la science à l'époque des faits, qui avaient été énoncées lors d'une première expertise à laquelle M. Z... n'avait pas été appelé, ni représenté et dont l'inopposabilité avait été expressément soulevée par ce dernier, et qui ont été reprises, sans nouvelle discussion, lors d'une seconde expertise opposable à M. Z... ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 juin 2003, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne M. X... et la Caisse mutualité sociale agricole du Tarn et Garonne aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille cinq.